Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Cabale des Muses

La Cabale des Muses

Titel: La Cabale des Muses Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gerard Hubert-Richou
Vom Netzwerk:
direction aléatoire, étourdi et la prunelle en feu :
    — Me prenez-vous pour un naïf, un niais, un benêt ? Je connais le roi mieux que vous et que quiconque ! Croyez-vous qu’il acceptera votre petit marché et vos minables tractations ? Pauvres songeards utopistes ! C’est un raz-de-marée qui déferlera sur la province et, l’instant de stupeur estompé, nous écrasera tous. Avant la sauvegarde de son fils, c’est sa propre couronne qu’il défendra tel un fauve blessé. S’il n’entreprenait pas tout pour la préserver, à qui pourrait-il la transmettre ?
    — Précisément, s’interposa Affinius profitant d’une respiration du chevalier… Précisément, parlons de sa couronne. Croyez-vous que nous en restions là, que nous n’ayons pas imaginé une troisième et dernière phase décisive à ce triptyque ?
    — Que voulez-vous dire ? frémit Rohan.
    — N’avez-vous pas remarqué que ne s’interpose aucun fleuve, aucune rivière entre Rouen et Paris pour nous interdire de fondre sur la capitale et frapper au cœur ? Le groupe d’élite constitué et entraîné à pied d’œuvre est prêt à anéantir toute velléité du pouvoir ébranlé, à peine protégé par quelques dizaines d’hommes. Quelques dizaines, pas plus ! Le peuple, las de cette tyrannie, se soulèvera et offrira la couronne à celui qui, fort d’un passé glorieux, se portera à la tête de l’armée de libération, épaulé par « l’Union des gentilshommes de France » et leur promettra un avenir meilleur. La Hollande et l’Espagne le soutiendront ; les protocoles sont déjà signés. L’Angleterre ne bougera pas. Tout a été apprêté avec une extrême minutie dans l’éventualité où les événements tourneraient en notre faveur comme nous en avons la certitude aujourd’hui. Le seul véritable stratège qui nous souciait, d’Artaignan, a été tué à Maëstricht.
    — Grand bien vous fasse ! explosa soudain Rohan. Mais ce sera sans moi ! Sans moi ! Vos théories fumeuses sont chimériques !
    Il rafla son manteau, son chapeau et sortit, laissant la porte béante par laquelle s’engouffra la froidure. La flamme des bougies vacilla. La Tréaumont se leva et referma.
    — Il reviendra, assura calmement le philosophe en se resservant à boire. Il reviendra manger dans notre main et nous suppliera d’accepter son oriflamme froissée.
    Le géant tendit son verre :
    — J’ignore s’il servira notre cause, mais il reviendra… pour la bonne raison que c’est moi qui ai la clef du jardin.
    1 - Il consignera cet épisode dans ses mémoires.

XXIX
    L ORSQUE L’HIVER S’IMPOSA, on sut que c’était pour de longs mois d’hibernation. La neige se substitua aux tempêtes qui avaient brossé le royaume en tous sens, fine, sèche et tenace. « Elle en attend une autre », assurèrent les sages paysans fatalistes en hochant la tête, le regard interrogeant l’horizon. Puis on murmura : « Quand on voit un hiver avant Noël, on est sûr d’en avoir deux. » Des flocons larges comme des hosties blanchirent le Nouvel An. La couche s’épaissit, durcit, ralentit toute vie, brisa les branches. Il y eut, c’est certain, plus de vieillards et de nourrissons qui ne se réveillèrent pas aux aurores glacées. Cependant, le froid élimine aussi les larves et les insectes, repousse les épidémies… pour ceux qui réchappent à la famine. Mais on crève en silence dans les chaumières. L’hiver fut rude, sans plus, et les loups chassèrent plus longtemps.
    En janvier 1674, le Danemark et divers princes allemands vinrent compléter la « grande alliance » contre la France.
    Le 24 février, le prince Guillaume-Egon de Fürstenberg, dévoué aux intérêts de notre royaume, était enlevé à Cologne 1 .
    Le 27 du même mois, Louis XIV notait dans son journal secret : notre cousin Charles II, roi d’Angleterre, a fait sa paix avec les Provinces -Unies ; ce n’est point une bonne nouvelle (par le traité de Westminster en date du 19).
    Le lendemain, la ville de Gray, en Franche-Comté (espagnole) occupée depuis le 24 par les troupes françaises, capitulait et se rendait au duc de Navaille.
    « Pluie de mars ne vaut pas pisse de renard. »
    « Le vent d’avril n’a pas d’abri, pas plus que le pauvre d’ami. » On verra bien s’il en sera ainsi…
    *
    Pistol guettait du Cauzé de Nazelle depuis son observatoire habituel. Dès qu’il le vit franchir les portes de l’école des Muses

Weitere Kostenlose Bücher