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La Cabale des Muses

La Cabale des Muses

Titel: La Cabale des Muses Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gerard Hubert-Richou
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changement de tactique tandis que le lit arc-bouté ripe sur le plancher. La porte est ébranlée, traversée par des insultes et des gueulements hargneux pas aussi efficaces qu’une bonne hache. Le lit dérape encore sur les lattes et capitule avec la bénédiction de Lebayle. La porte s’ouvre sur un coup d’épaule plus violent. Les deux brutes se précipitent sur le balcon, interpellent en bas leur acolyte.
    — C’est moi que vous cherchez ? s’informe Géraud dans leur dos.
    Le premier qui se retourne réceptionne une escabelle en pleine face. Il recule et, avant de s’écrouler, heurte son comparse penché sur le garde-fou. Sans difficulté et sur cet élan, Géraud qui l’a cueilli aux jambes, l’aide à basculer par-dessus bord.
    — Et de deux ! se rassure le commissaire.
    Le plongeon éclabousse jusqu’à l’étage. Geignant, le comateux se redresse déjà sur un genou. Le sacrifice d’un vase de nuit vide ébréché l’endort pour un temps indéterminé. Lebayle lui subtilise son pistolet qu’il glisse dans ses fontes, dégaine sa rapière, sort de la chambre, descend prudemment en crabe, les épaules contre la paroi.
    Le troisième larron, qui a dû assister à la pirouette de son compère, fait irruption dans la salle, l’épée au poing. Géraud regrette d’avoir rangé l’arme à feu. Trop tard pour se raviser ! L’autre, sans grande technique, se fend trois fois, l’obligeant à rompre d’autant, à parer les estocs rageurs et riposter en revers. Le furieux adversaire tente une manœuvre grossière pour le tourner vers la porte. Lebayle s’écarte d’un pas chassé, simule le retrait, pivote, ralenti par le poids de ses affaires sur l’épaule gauche. On ne saurait penser à tout !
    Le bretteur en profite pour charger et l’acculer contre le montant de la cheminée d’une pointe qui griffe la boucle de la sacoche. Les coquilles des gardes se heurtent et tintent. Adossé, Géraud n’a aucun mal à le repousser, puis il dégage sur la droite.
    — Je croyais que l’odeur du fumier pénétrait jusqu’ici, ironise-t-il. Ce ne sont que les exhalaisons putrides de ta bouche, estafier !
    La rage est mauvaise conseillère. L’homme pointe le cœur et se jette en avant. D’une tierce, sa lame est écartée, enroulée, laissant le flanc à découvert. Sur son embardée, le bougre s’empale à hauteur du foie.
    — Quel manque d’expérience, se navre Lebayle en se débarrassant du moribond tombé dans ses bras.
    Il n’est pas tiré d’affaire pour autant car le dernier – le perforé aux deux bubons – reparaît… suivi de celui qui devait surveiller les alentours. Deux, c’est beaucoup car Géraud s’épuise. Il pose son épée rougie sur la table où il a soupé, ressort le pistolet.
    — Pourvu qu’il soit en état de marche…, marmonne-t-il.
    Les deux survenants, armés de longues dagues, ont un instant d’arrêt, puis ils s’écartent. Celui de gauche n’a pas le temps d’atteindre l’angle protecteur de l’escalier qu’il intercepte sans broncher une balle sous l’œil droit. Géraud, satisfait de la réponse à son interrogation, récupère son épée et interpelle le balafré :
    — Deux petits renseignements et j’oublie de t’occire ! Combien êtes-vous encore et qui vous envoie ?
    Négligeant le marché pourtant à son avantage, le fripon se détourne et s’enfuit.
    — À ta mine, je t’aurais cru plus courageux !... Il était sans doute seul, conclut le commissaire qui essuie sa première escarmouche, puis sa lame sur l’habit crasseux du souilleur.
    Son cœur s’est emballé, mais lui a fourni le surplus d’énergie indispensable. Il souffle et s’apaise. La vieille a disparu, la servante a la prudence de ne pas se montrer. Il n’est plus question de s’attarder et encore moins de passer la nuit dans une maison aussi mal fréquentée. Il décide de s’esquiver par la cuisine, et pousse la porte. Le fiston, qui décortiquait des pieds de porcs sans s’alarmer du charivari, sursaute. Il ne s’attendait pas à cette visite. Il lâche son couteau, recule, disparaît par la porte arrière.
    — Toi, mon gaillard, tu n’as pas la conscience tranquille !
    Lebayle se lance à sa poursuite afin de ne pas subir un revers, si celui-ci se trouvait secondé par l’autre déserteur. Le cuistot file à travers champs. Inutile d’aller s’égarer sur un terrain inconnu. Géraud préfère dériver vers l’appentis qui sert

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