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La Cabale des Muses

La Cabale des Muses

Titel: La Cabale des Muses Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gerard Hubert-Richou
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Vois-tu, je ne distingue pas les liens qui peuvent exister entre la mort du capitaine des mousquetaires, l’acharnement de la veuve à mon encontre, la cabale naissante en Normandie et le visiteur nocturne chez le brave et inoffensif Affinius. Il n’y en a sans doute aucun, me diras-tu, dans la simplicité de ton raisonnement de jument qui n’a d’intérêt que pour son picotin… Le pire est que tu dois avoir raison !
    Septembre roussissait le bout des feuilles avec nonchalance et une sorte d’indifférence, laissant à la faune des sous-bois un délai supplémentaire pour amasser quelques provisions. Songeur et détendu, le commissaire Lebayle rentra par la porte Saint-Antoine, longea la Bastille dont la sombre masse imposante aux huit tours lépreuses aurait dû faire réfléchir tout tire-laine néophyte, puis se laissant mener par la place Baudot, passa devant Saint-Gervais, déboucha place de Grève où le gibet exposait deux loques à forme encore humaine, pendues de quelques jours et assaillies par les corbeaux et les corneilles, croasseurs de lugubres oraisons. Deuxième sommation à l’intention des brigands et futurs assassins ! Mais tout cela était-il assez dissuasif ? Aux yeux des honnêtes gens, sans doute. Les services diligents de monsieur de La Reynie, plus répressifs que jamais sur Paris, parviendraient-ils à endiguer la violence nocturne et à réduire les rixes diurnes ?
    Toutefois, les efforts de celui-ci, de monsieur de Louvois et du roi étaient louables pour protéger le bon peuple. Et puis, l’installation de la cour à Versailles n’allait-elle pas disperser un peu l’essaim des malfaisants qui s’acoquinaient ou rivalisaient d’arrogance et d’intrépidité ?
    Avant d’ensemencer une terre, ne faut-il pas la débarrasser des anciennes souches, des pierres remontant sans cesse des tréfonds, des mauvaises herbes, des nids de larves, puis l’engraisser d’un bon fumier ?
    Géraud hocha la tête pour approuver sa comparaison. Les pensées vagabondes et l’esprit rendu folâtre par les vapeurs d’alcool, baladé par sa jument au milieu d’une foule rassurante, il avait relâché sa vigilance. Il émergea trop tard de sa rêverie quand Jurance, entraînée par l’anneau du mors vers le fond d’une impasse ombreuse, renâcla : cinq coupe-jarrets l’entouraient !
    Aussitôt, il reconnut la trogne embrochée et couturée du spadassin de la veuve de Sainte-Croix.
    Quelle obstination !
    Le mercenaire se savait maître de sa proie. Son rictus d’hyène sanguinaire n’augurait rien de bon pour l’avenir du commissaire Lebayle.
    — Madame de Chancely se serait-elle ravisée à propos de ses fils ?
    — Point. Il est juste question de régler la facture.
    — Je n’ai pas un liard sur moi.
    — Ta peau effacera la dette.
    C’était dit. Il n’y avait pas d’équivoque possible, sauf que Géraud ignorait la nature de la dette. Ne pouvant en discuter en gentilshommes qu’ils n’étaient ni l’un ni les autres, ne lui restait qu’à pousser les enchères.
    — Très bien. S’il faut en découdre, concéda-t-il en quittant les étriers.
    Il se pencha sur l’encolure comme pour mettre pied à terre, prit son élan et se propulsa en arrière, plaquant son fourreau contre sa hanche. Il pirouetta sur la croupe de Jurance qui, surprise par cette manœuvre insolite, avança d’un pas, facilitant le rétablissement au sol de son maître. Sur son erre, Lebayle recouvra son équilibre après une belle embardée qui le colla le dos au mur. Il dégaina. D’un coup d’œil, il comprit que la fuite entre les échafaudages instables de caisses, de tonneaux, de planches dressées offrirait la cible de son échine à ses adversaires qui devaient ignorer les règles élémentaires de l’escrime traditionnelle.
    D’ailleurs, ceux-ci s’étaient déployés en éventail ; quatre pointaient des rapières, le cinquième brandissait une miséricorde 1 à la large lame. L’épée de d’Artagnan allait poursuivre son service ! Pourvu que de là-haut le Grand Mousquetaire guide encore sa main. La poignée bien adaptée à sa dextre le rassurait. Bien qu’il ne s’agisse que d’une arme d’entraînement, l’équilibre en était parfait. Trois doigts fermes et solides lui permettaient d’esquisser les passes les plus fines, capables de tenir à distance le quintet assassin.
    Les trois manouvriers qui s’activaient à l’entrée de l’impasse refluèrent et

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