La campagne de Russie de 1812
moins de sept couvents et
de dix églises.
Le matin du jeudi
25, il monte à cheval – un cheval baptisé
Moscou... – traverse sur un pont de bateaux la Wilya, dont les
eaux ont grossi par l'orage de la veille, puis passe en revue la
division d'Oudinot et presse leur passage. Il en sera de même
le lendemain vendredi 26 juin. C'est seulement le dimanche 28 qu'il
prendra la route de Vilna. Il laisse derrière lui une intense
pagaille, un désordre indescriptible, puisque deux cent trente
mille hommes, un immense charroi et plusieurs milliers de chevaux
doivent s'écouler par trois ponts. Et il n'y a que cinq cent
vingt gendarmes pour maintenir l'ordre !
La maison
impériale, qui était passée la première,
suit son maître. Veut-on savoir de quelle façon se
composaient « les équipages de guerre de
l'Empereur » qui sont alors à peu près
intacts ? Jean Hanoteau s'est penché avec minutie sur les
cartons des archives.
« Cet
équipage, écrit-il, sous la direction du grand écuyer
– Caulaincourt – se décomposait en 1° service
léger ; 2° service d'expédition ; 3° gros
bagages ; 4° Chevaux de selle.
« Le
service léger comprenait six équipages de cantiques de
deux mulets chacun, quatre tentes légères portées
chacune sur un mulet, deux lits de campagne portés chacun par
un mulet, des mulets de conduite, deux brigadiers, trois maîtres
d'hôtel, deux valets de chambre, trois cuisiniers, quatre
valets de pied, huit palefreniers, deux bourreliers ou maréchaux,
tous à cheval ou à mulet. Il y avait en outre deux
mulets de bât portant le bureau et la pharmacie, deux petites
forges attelées à quatre chevaux et deux voitures
légères pour les provisions.
« …
Le service d'expédition comprenait les voitures légères
pour le service de Sa Majesté et de sa suite, les tentes du
quartier impérial, l'état-major mobile, une partie du
cabinet, les bagages légers, en tout vingt-six voitures
attelées par cent soixante chevaux.
« Les
gros bagages comportaient vingt-quatre voitures attelées par
deux cent quarante chevaux. Parmi elles : une berline pour
l'Empereur, deux berlines de suite, une calèche de rechange,
deux voitures pour les secrétaires, cartes et papiers, une
voiture de garde-robe, contenant la chaise percée
impériale..., deux pourvoyeuses, huit fourgons pour la bouche,
pain, office, cave, provisions, linge et argenterie, etc.
« L'équipage
de selle comprenait dix brigades de treize chevaux chacune (au total
cent trente chevaux), savoir : deux chevaux de bataille et un cheval
d'aller pour l'Empereur (dits du « rang de empereur »)
un pour le grand écuyer, un pour le page de service, un pour
l'écuyer de service, un pour le chirurgien, un pour le
piqueur, un pour le mamelouk, un pour le guide, trois pour les
palefreniers.
« L'effectif
total, y compris la réserve, s'élevait
réglementairement à cinquante-deux voitures et six cent
trente chevaux et mulets.
« Le
camp impérial se composait de la tente de l'Empereur, de celle
des grands officiers, de celle des aides de camp, de celle des
officiers d ordonnance, de celle des officiers de service, maréchaux
des logis, fourriers et secrétaires, enfin de celle de la
suite. La tente de l'Empereur était composée de deux
salons, d'un cabinet et d'une chambre à coucher le tout porté
dans un seul fourgon 4 . »
Les combattants
devaient porter dans leurs sacs, trois paires de chaussures de
rechange, trois chemises, l'uniforme dit de sortie et dix kilos de
vivres de réserve... Ces vivres que, vu leur poids, bien des
hommes abandonneront, comptant sur les fourgons de l'intendance qui,
eux, nous le verrons, seront distancés par la Grande Armée.
Tout en marchant
vers Vilna, Napoléon enrage. Il espérait pouvoir livrer
une bataille, peut-être même décisive en terre
lituanienne, mais le général Barclay de Tolly, ministre
de la Guerre, s'est replié avec son armée. En effet, la
faiblesse relative des effectifs tsaristes, la jonction retardée
des deux armées, dites de Barclay et de Bagration, ont
contraint le haut commandement russe à la retraite. En outre,
la tactique de la terre brûlée s'impose pour les deux
armées. Ainsi que le promet aux envahisseurs un officier du
tsar : « Les Français n'ont pas de quoi se réjouir
de ce que nous nous retirons. C'est pour leur perte... Nous
reviendrons prendre le pays que nous abandonnons à présent
en le dévastant et en les affamant. »
L'Empereur
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