La campagne de Russie de 1812
MM Adnet, Péroud,
Saint-Clair, Bellecour, Bertrand
Mmes André et Fusil.
Prix des places
1ère galerie .......... 5
roubles ou 5 Fr.
Parquet ................ 3
roubles ou 3 Fr.
Seconde Galerie ..... 1 rouble
ou 1 Fr.
On commencera à
6 heures précises.
« Il
n'y eut point de cabale, nous dit Bausset, ni dans la salle, qui
était remplie de militaires, ni sur le théâtre où
n'existait aucune rivalité d'amour-propre. Le parterre était
rempli par les soldats, les deux rangs de loges étaient
occupés par des officiers de toutes armes. L'orchestre était
excellent : c'étaient les musiciens de la Garde. »
Les opinions sont
mitigées. Spectacle « assez mauvais »,
écrivent certains combattants à leurs familles. « Assez
n'est pas le mot, précise un adjoint aux commissaires des
guerres à sa femme Mme Pehguilly L'Haridon, rue de Grammont n°
65 à Paris. Extrêmement mauvais leur convient mieux. Ils
disent à contresens, mais cependant l'on y va, parce que ça
distrait. » Il y eut onze représentations. Napoléon
n'assiste à aucune, mais fait venir au Kremlin et à
deux reprises une soprano italienne accompagnée par le ténor
Tarquinio.
Les liaisons entre
Moscou et l'Empire se font de plus en plus mal. À ce sujet, il
est, me semble-t-il, intéressant de se pencher sur le service
en voiture légère ou à cheval des estafettes et
des courriers organisé par Caulaincourt et dont la ponctualité
est étonnante. Chaque jour le « porte-manteau »
contenant les dépêches destinées à
l'Empereur arrive à Moscou. Les postillons des relais de poste
de Paris à Erfurt se chargent de la besogne. Puis des
estafettes « espacées par des brigades de quatre »
se chargent de la suite du transport. Les postillons polonais leur
succèdent. Enfin, à travers la Russie, les postillons
français, dépendant de Lavalette, directeur général
des Postes du vaste Empire, « prennent le relais ».
Ceux-ci sont quatre ou cinq dans chaque maison de poste fortifiée,
qui sont placées à distance de cinq à sept
lieues. De ce fait, le courrier et le porte-manteau destiné à
l'Empereur mettent entre quatorze et seize jours pour franchir la
longue route qui
se trouve protégée par de petits détachements 17 .
« Le portefeuille de Paris, nous dit Caulaincourt, le
paquet de lettres venant de Varsovie et de Vilna étaient le
thermomètre de la bonne ou mauvaise humeur de l'Empereur. »
Bien souvent, le « paquet » voyage seul, porté
de relais en relais. Sinon, c'est le même homme qui galope de
Paris à Moscou.
Presque chaque
jour, des officiers, des médecins et des employés de
l'administration viennent rejoindre l'armée et apporter des
nouvelles du vaste Empire. Caulaincourt affirme que l'on venait alors
« aussi facilement de Paris à Moscou que de Paris à
Marseille ». Cependant, bien des courriers sont
interceptés sur leur route par les cosaques.
Un jour, il y eut
un retard de quinze heures, ce qui irrita l'Empereur « au
denier point ». Tous les quarts d'heure, il demandait à
Caulaincourt ou à Berthier s'ils connaissaient les raisons de
ce retard. Le grand écuyer pense faire escorter militairement
les courriers, mais Napoléon l'en empêche :
– Il y
faudrait un détachement considérable. La cavalerie est
déjà fort réduite. Du reste, c'est une
précaution inutile : la route est très sûre.
Elle ne l'était
toutefois que dans sa pensée.
L'approvisionnement
devient déjà difficile. Le général de
Fezensac affirme que l'armée ne se procurait qu'avec peine du
pain noir et de la bière. Pour découvrir de la viande,
il fallait envoyer de forts détachements dans la campagne
prendre des bœufs dans les bois où s'étaient
réfugiés les paysans. On possède des liqueurs ou
des confitures, mais on manque de viande et de pain. On se couvre de
fourrures, mais on a besoin d'habits et de sou liers.
Les occupants regorgent de diamants et de pierreries, et de tous les
objets de luxe imaginables, mais n'en sont pas moins à la
veille de mourir de faim ! L'armée forme un cercle autour de
Moscou – et fourrager devient un exploit pour la cavalerie. Il
faut parfois acheter une botte de paille « au prix de son
sang ». On peut assurément faire une constatation
inattendue en voyant l'attitude des paysans russes en 1812. Ceux-ci,
dans le passé, s'étaient révoltés
sporadiquement contre l'esclavage et avaient même parfois
assassiné leurs maîtres et leurs intendants.
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