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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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étranger, et vous ne m’avez pas recueilli ; j’ai été nu, et vous ne m’avez point vêtu ; j’ai été malade et en prison, et vous ne m’avez point visité. Alors ceux-là aussi lui répondront, en disant : Seigneur, quand est-ce que nous t’avons vu avoir faim, ou avoir soif, ou être étranger, ou nu, ou malade, ou en prison, et que nous ne t’ayons point secouru ? Alors il leur répondra, en disant : En vérité, je vous dis, que parce que vous n’avez point fait ces choses à l’un de ces plus petits, vous ne me l’avez point fait aussi. »
    Saint-Clair parut frappé de ce dernier verset ; il le lut une première fois, puis une seconde plus lentement, comme s’il en pesait chaque mot.
    « Tom, dit-il, ces gens si sévèrement châtiés me semblent n’avoir fait précisément que ce que j’ai fait : – mener une vie douce, facile, honorable, sans s’inquiéter de la foule de leurs frères qui avaient faim, qui avaient soif, qui étaient malades ou en prison. »
    Tom ne répondit pas.
    Saint-Clair se leva et marcha du haut en bas de la véranda, enseveli dans ses pensées. Il fallut qu’à deux reprises Tom lui rappelât que la cloche du thé avait sonné.
    Il se rendit au salon, toujours distrait et pensif.
    Après le thé, Marie s’étendit sur une chaise longue, et, recouverte d’une moustiquaire, fut bientôt profondément endormie. Miss Ophélia tricotait activement en silence. Saint-Clair s’assit au piano, et improvisa sur un mode doux et mélancolique. Plongé dans une profonde rêverie, il semblait s’entretenir avec lui-même en une langue mélodieuse. Il s’interrompit, ouvrit un tiroir, en tira un vieux cahier de musique, et se mit à en tourner les feuilles jaunies par le temps.
    « C’était un des cahiers de ma mère, dit-il à miss Ophélia ; voilà de son écriture ; – venez-voir. – Elle avait copié et arrangé ce chant d’après le Requiem de Mozart.
    Miss Ophélia s’était avancée et regardait.
    – Elle le chantait souvent, reprit Saint-Clair : je crois encore l’entendre.
    Il préluda par quelques tons graves, et commença l’antique et solennelle prose latine du Dies Irœ .
    Tom, qui entendait de la galerie extérieure, arriva jusqu’à la porte, attiré par le son, et y demeura tout ému. Il ne comprenait pas les mots, mais la musique et la voix lui remuaient l’âme, surtout aux passages les plus pathétiques. Tom aurait sympathisé bien davantage encore avec ce chant, s’il en eût compris les belles paroles :

    Recordare, Jesu pie,

    Quod sum causa tuæ viæ,

    Ne me perdas illa die :

    Quærens me sedisti lassus,

    Redemisti crucem passus ;

    Tantus labor non sit cassus [42]  !
    Saint-Clair y mettait une expression profonde et pénétrante ; cette obscure vallée de larmes lui semblait close, et il croyait entendre la voix de sa mère se mêler à la sienne. La voix et l’instrument vibraient et palpitaient d’une même vie sous les accords puissants trouvés, pour son dernier Requiem , par l’âme de Mozart prête à s’échapper de sa prison.
    Quand Saint-Clair eut fini de chanter, il resta quelques moments la tête penchée sur sa main ; enfin il se leva, et marcha de long en large.
    « Quelle sublime conception que celle du jugement dernier ! dit-il ; le redressement de tous les torts, de tous les griefs amassés depuis des siècles ! la solution de tous les problèmes moraux par une sagesse infinie ! Oui, c’est une grande pensée !
    – Terrible pour nous ! reprit miss Ophélia.
    – Pour moi, surtout, à ce que je suppose, dit Saint-Clair s’arrêtant d’un air rêveur. Je lisais ce soir à Tom le chapitre de saint Mathieu qui décrit ce moment ; j’en ai été frappé. On s’attend à quelque crime affreux, à quelque énormité, mis à la charge de ceux qui sont bannis du ciel ; mais non, – ils sont condamnés pour n’avoir pas fait le bien, comme si cette omission renfermait tout le mal imaginable.
    – Peut-être est-il impossible à celui qui ne fait aucun bien de ne pas faire le mal, dit miss Ophélia.
    – Alors, poursuivit Saint-Clair se parlant à lui-même avec émotion, que dire de l’homme appelé par son propre cœur, par son éducation, par les maux de la société, à une noble tâche, et appelé en vain ? de l’homme qui, au lieu de mettre la main à l’œuvre, a flotté, spectateur neutre, irrésolu, des luttes, des agonies, des misères de ses frères ?
    – Je dis qu’il

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