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La chambre du diable

La chambre du diable

Titel: La chambre du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Harding
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leur pelle et leur pioche. Hig, le porcher, jetait des
regards noirs à la ronde comme si le monde entier lui en voulait. Ils saluèrent
Athelstan à grands cris et ce dernier les bénit.
    Près de la berge, les baillis s’affairaient eux aussi.
Bladdersniff, nez rubicond, yeux larmoyants, dirigeait la mise au pilori de
deux ivrognes ramassés ivres morts dans une rue.
    –  Caeci ducunt caecos : les aveugles
conduisent les aveugles, traduisit le dominicain. Bladdersniff boit comme un
trou.
    Ils parvinrent aux marches humides du quai. Moleskin
était là et un sourire fendit sa figure tannée. À bord de son embarcation, il
esquissa un salut prudent et fit signe à Athelstan de le rejoindre sans tarder.
    – Ce sera bientôt encombré, mon père.
    Il aida Athelstan à prendre place dans la barque
instable et examina avec curiosité Sir Maurice. Haussant les épaules, il se
pencha sur ses rames et tourna le bateau vers le large.
    Bien que la brume matinale flottât encore sur l’eau, le
fleuve était déjà couvert de nacelles, de cogghes de guerre, de naves, de
lourdes barges lestées des ordures et des détritus provenant des rues de la
ville qu’elles allaient larguer au mitan de la Tamise. Quelques navires étaient
pourvus de cloches qu’ils faisaient sonner pour avertir les autres. De temps en
temps, Moleskin s’arrêtait pour saluer une connaissance et, une fois, il rentra
les avirons quand une nef royale pleine de courtisans, d’officiers et de clercs
descendit le fleuve vers la Tour. De grands oriflammes bleu et pourpre
faseyaient avec vigueur à sa poupe et à sa proue. Un esquif sortit de la brume,
la cloche à l’avant sonnant le glas.
    – Par le Ciel ! souffla Sir Maurice.
    Athelstan se retourna en repoussant son capuchon. C’était
une embarcation longue et basse sur l’eau. En son centre, étendu sur une
planche de bois, gisait un cadavre trempé et dégoulinant entouré d’hommes
masqués et encapuchonnés. Le chef se tenait à la proue, figure de la mort
elle-même, capuche rejetée révélant son étrange visage osseux et son crâne
chauve. Il jeta un coup d’œil au dominicain quand leurs barques se croisèrent.
    – Bonjour, mon père.
    Athelstan reconnut le Pêcheur d’hommes dont la besogne
– payée par l’échevinage – consistait à fouiller la Tamise pour en retirer les
corps. Le dominicain fit un signe de croix à l’adresse de la dépouille.
      – Un suicide ?
s’enquit-il.
    Le Pêcheur d’hommes ordonna d’un ton rogue aux rameurs
de s’arrêter. Sa barque se souleva et retomba près de celle de Moleskin qui
détourna le regard, se racla la gorge et cracha.
    – Non, ce n’est pas un suicide, mais un trépas
malencontreux. Ce malheureux a été mordu par un chien enragé près de Dowgate. On
l’a jeté à l’eau en croyant que cela le guérirait. Le pauvre homme s’est noyé. Son
âme revient donc au Seigneur et son corps à l’échevinage. Allez, mes gaillards,
souquez ferme !
    Il leva la main pour les saluer et sa macabre
embarcation s’enfonça dans la brume.
    – Je déteste le croiser. Fouiller le fleuve en
quête de morts ! commenta Moleskin.
    – C’est œuvre de miséricorde, riposta Athelstan, et
Dieu le sait. Dieu nous rappelle tous un jour à lui, Moleskin !
    À Fennel Alley, au débouché de Catte Street, Sir John
Cranston, coroner de la ville, aurait partagé l’opinion de son secrétaire. Il
repoussa son chapeau de castor, se gratta le crâne et contempla sans y croire
le chaos auquel il était confronté. Le cadavre d’un vieillard, chausses autour
des chevilles, gisait dans les ruines de la chiouère 1 qui s’était
effondrée en précipitant au sol le bonhomme et les latrines sur lesquelles il
était assis.
    – Redis-moi ce qui s’est passé, demanda-t-il en
examinant les demeures de chaque côté.
    – Oui, Sir John. La maison sur la gauche
appartient au trépassé, Elias Ethmol, autrefois peaussier mais à présent retiré.
Celle de droite appartient à Humphrey Withrington, teinturier de son état. Et, comme
vous pouvez le constater, Sir John, continua le bailli d’un ton lugubre, elles
sont très proches l’une de l’autre, ou du moins leurs étages supérieurs le sont.
Elias et Humphrey sont des hommes âgés.
    – Où est Humphrey à présent ?
    Un vieillard aux yeux chassieux sortit de la petite
foule qui s’était rassemblée et leva sa canne de frêne.
    – C’est moi, Sir John.
    – Messire le coroner pour

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