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La chambre du diable

La chambre du diable

Titel: La chambre du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Harding
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Athelstan avait l’impression d’avoir remonté le temps, quand on les
conduisait, lui et son frère Francis, dans l’arrière-cuisine pour que leur mère
les réprimande. Des gouttes de sueur coulaient de son front et il se demanda s’il
avait été bien avisé. Les yeux gris acier de Lady Monica les scrutaient. Athelstan
aperçut un éclair d’amusement sur sa figure sévère.
    – Cela fait longtemps, Sir John.
    Le coroner rougit et s’agita, mal à l’aise.
    – Vous souvenez-vous du tournoi ? dit-elle
en soupirant. Vous et mon bien-aimé, Sir Oliver, aviez combattu tous les
entrants. Le roi vous a couronnés champions de la joute !
    – Quelle époque superbe ! marmonna le
magistrat, les yeux pleins de larmes. Je suis plus vieux, madame, et beaucoup
plus gros, mais vous, vous n’avez pas changé le moins du monde : vous êtes
restée aussi belle.
    – Toujours grand flatteur, John, et grand buveur
de vin. Vous plairait-il d’en boire un peu ?
    Lady Monica fit signe au tourier immobile derrière
elle.
    – Cuthbert, du vin pour nos hôtes. Ton meilleur
clairet !
    Un sourire adoucit ses traits austères.
    – Sir John a un penchant pour lui !
    On servit la boisson et le portier sortit. Lady Monica
n’avait cessé d’égrener le chapelet d’ivoire posé sur la table. Elle prit des
nouvelles de Lady Maude et félicita le coroner pour la naissance des deux
marmousets. Enfin, elle enroula le rosaire autour de ses doigts et se carra
dans sa chaire. Athelstan, ne pouvant croiser son regard, examinait les beaux
tableaux pieux, dans leurs cadres noir et or, qui ornaient les murs d’un blanc
éclatant.
    – Pourquoi êtes-vous céans, John ?
    Ce dernier toussa et fit rouler le petit gobelet
filigrane entre ses mains.
    – Sir Thomas Parr, madame.
    – Ah, Angelica ! Une jouvencelle fort
entêtée. L’amour est chose redoutable, n’est-ce pas, John ? Il tourneboule
l’âme et obscurcit la cervelle.
    Elle rassembla les grains du chapelet.
    – M’avez-vous jamais aimée, John ?
    Il baissait la tête, penaud comme un gamin.
    – Je vous ai posé cette question, jadis, reprit
Lady Monica.
    – Madame, vous étiez fiancée. Sir Oliver m’était
plus cher qu’un frère.
    – Mais vous m’aimiez, alors ! insista-t-elle.
    Fasciné, le dominicain regardait les larmes monter aux
yeux de Sir John. Pour une fois, l’impétueux coroner au franc parler semblait
incapable de prononcer un mot.
    – Vous avez toujours été directe, madame. Je
crois que vous savez ce qu’il en est. Et, que Dieu me pardonne si j’ai offensé
quiconque, mais Oliver fit de même.
    – Madame, intervint Athelstan, désireux de voler
au secours de son ami, Sir Thomas Parr vous a confié sa fille. Et il m’a prié
de venir la voir pour lui apporter du réconfort spirituel.
    – Faut-il, pour cela, que vous soyez trois ?
rétorqua la supérieure en scrutant le prêtre. J’ai entendu parler de vous, dit-elle
en tendant l’index. Je prête toujours l’oreille à ce qui concerne John. À tous
vos exploits. Mais pourquoi trois ?
    – Messire le coroner est ici parce qu’il vous
connaît. Moi, en tant que son secrétaire, et frère Norbert revient tout juste
du couvent de Bridgettine, à Oxford, où il a dispensé de sages conseils et un
appui spirituel aux bonnes nonnes, répondit Athelstan d’un ton calme tout en
priant en silence pour qu’il ne lui soit pas tenu rigueur de son mensonge.
    – En fin de compte, quelle est la raison de votre
présence ? trancha Lady Monica en fixant sans détour Sir Maurice.
    – Je suis ici, madame…
    Il se tut.
    Athelstan ferma les yeux.
    – Vous me semblez fort peu disert pour un homme
chargé de l’assistance spirituelle ! remarqua-t-elle d’une voix où perçait
une légère moquerie.
    – Je suis ici, reprit le chevalier avec défi, pour
rappeler à Lady Angelica ce qu’est l’amour, sa véritable nature, sa fonction et
son but.
    Lady Monica se prit le menton entre les doigts et fit
claquer sa langue.
    – Je vous ai déjà vu quelque part. Quoi qu’il en
soit – elle prit une clochette qu’elle agita – je suis responsable de Lady
Angelica. Ce sera donc pour répondre au souhait de Sir Thomas Parr que vous lui
prodiguerez votre soutien.
    Elle eut un mince sourire.
    – Il m’a écrit à ce sujet. Mais, ajouta-t-elle, l’entretien
doit se dérouler en ma présence.
    Athelstan sentit le cœur lui manquer. « Frère
Norbert » se pencha en avant

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