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La chambre du diable

La chambre du diable

Titel: La chambre du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Harding
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prier le jouvenceau de se relever. Comment osez-vous lever les yeux sur
ma fille ? Qu’êtes-vous, si ce n’est un chevalier impécunieux !
    – Je possède un manoir et des terres dans le
Berkshire, avait rétorqué Sir Maurice.
    – Un misérable cottage et quelques porcheries !
    Sir Maurice avait porté la main au pommeau de son épée
mais son interlocuteur n’avait pas bronché. Ses gardes, restés sur le seuil, s’étaient
avancés d’un pas. C’était une bande de brutes, de scélérats de la ville
conduits par le châtelain Ralph Hersham, homme cauteleux, visage en lame de
couteau et regard rusé. Parr s’était penché, les yeux lançant des éclairs.
    – Allez-y ! avait-il grincé. Tirez donc
votre épée ! Qu’on en finisse sur-le-champ !
    Au lieu de s’exécuter, le jeune homme s’était redressé
et, les invectives de Parr résonnant encore à ses oreilles, s’était enfui de la
maison. Après avoir noyé son chagrin dans une taverne, il avait regagné le
Savoy et retrouvé assez de courage pour s’entretenir avec son seigneur. Jean de
Gand s’était montré compatissant mais peu efficace. Le régent s’était affalé
dans sa chaire et, de son dur regard perçant, l’avait observé avec attention. Tout
en l’écoutant, il caressait sa moustache argentée et son bouc. De temps en
temps, il hochait la tête et posait une question.
    – Mais je ne peux rien faire, avait-il conclu
avec tristesse.
    – Monseigneur, vous êtes le régent !
    – Je suis l’officier du roi, avait-il répliqué en
souriant. Je peux commander ses armées, émettre ses mandats, mais je n’ai nul pouvoir
sur Sir Thomas ni sur ce qu’il entend faire de sa fille.
    Il avait levé la main en énumérant les divers points
sur ses doigts.
    – Premièrement, mon ami, cela plairait fort à nos
adversaires des Communes que Jean de Gand, le mauvais régent du roi, pousse l’un
de ses chevaliers dans la couche de la fille d’un des puissants marchands de
Londres ! Comme les commérages iraient bon train ! On me traiterait
de tyran, pire encore que Néron ou Caligula !
    Bien que Sir Maurice ignorât de qui il s’agissait, il
avait jeté un coup d’œil désespéré à Gand.
    – Deuxièmement, avait continué celui-ci, impitoyable,
Sir Thomas Parr est un homme très, très fortuné. Oh, il sort de rien mais il
détient, en fait, tout le commerce de laine avec les Pays Bas. Il possède dix
naves qu’il a mises à notre disposition. Troisièmement, la Couronne lui doit de
l’argent. Quatrièmement, et c’est le plus important, Sir Maurice, moi aussi. Si
Sir Thomas exigeait d’être remboursé…
    Jean de Gand avait tambouriné sur la table.
    – Bon, avait-il soupiré, mieux vaut ne pas penser
à ce qui pourrait arriver !
    Il s’était levé et avait pris les mains du jeune
chevalier.
    – Maurice, avait-il repris, affable, vous êtes
mon homme en temps de paix comme en temps de guerre, ainsi que l’était votre
père. Dans la bataille, je ne pourrais rêver d’un meilleur soldat. Vous avez
capturé ces deux navires, le St Sulpice et le St Denis , et, pour
cet exploit, vous avez à jamais gagné ma faveur. Le moment venu, je vous
récompenserai par des terres, des castels, des champs et des prairies, mais pas
maintenant. Pourtant, dans l’affaire de la fille de Sir Thomas Parr, je ne peux
intervenir.
    Fort contrit, Sir Maurice s’était retiré. Il n’avait
pas revu Angelica après sa confrontation avec son père. Il avait cru sa cause perdue
mais, quelque temps plus tard, Rosamunda lui avait remis un bref message.
    « Êtes-vous un simple valet pour quitter ainsi le
champ de bataille ? disait la lettre. Votre amour est-il si volage qu’il
renonce au premier obstacle ? »
    Son ardeur ainsi piquée, il avait recommencé sa cour
bien que, cette fois, ce fût plus difficile. Quoi qu’il en soit, grâce à
Rosamunda, lui et Angelica s’étaient retrouvés, s’étaient promis fidélité et s’étaient
mis d’accord pour fuir ensemble cette nuit même. Sir Maurice n’avait pas de
plan précis. Ils se rendraient dans le Berkshire et paieraient les services d’un
prêtre itinérant pour qu’il les marie et leur serve de témoin quand ils
échangeraient leurs vœux sur le parvis de l’église.
    Le jouvenceau recula de quelques pas sur le chemin. Plus
bas, des chats pourchassaient des rats sur les ordures amoncelées de chaque
côté de l’égout à l’évent. Un chien bâtard

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