La confession impériale
décidera.
Mon point faible
était l’état sommaire de ma flotte. Au cours d’une bataille navale avec celle
du basileus, elle eût été prise ou envoyée par le fond. Contre les Danois, la
seule solution eût été de prendre la fuite. Je m’engageai dans un programme de
chantiers navals que je chargeai Adalhard et Walla de prendre en main. Pour
limiter les incursions danoises, j’imposai une amende aux paysans et pêcheurs
proches des estuaires, qui, au lieu de prendre les armes, tenteraient de fuir
vers l’intérieur des terres.
Je n’ai pas eu, à ce
jour, à affronter le roi Hemming.
Au cours de ma dernière campagne en Saxe,
j’avais établi mon camp près de la ville de Hollenstedt, à l’entrée de
l’estuaire de l’Elbe, au nord de la Westphalie, quand j’avais reçu une
délégation de notables et d’officiers danois venus me proposer un entretien
avec le nouveau roi.
Que l’on juge de ma surprise lorsque je me
présentai pour répondre à sa requête : il avait levé l’ancre avec sa
flotte, ne laissant sur place que la trace de quelques feux ! Un événement
grave avait-il contraint Hemming à s’en retourner ? Auquel cas il aurait laissé
quelques-uns de ses gens pour m’en tenir informé et s’en excuser. Je n’osais
croire qu’il eût agi ainsi par provocation ou par mépris.
J’eus, peu de temps après, l’explication de ce
comportement cavalier. Mes alliés, les Obodrites, d’ordinaire pacifiques, ayant
dévasté des zones frontalières, il avait envahi leur territoire, massacré le
chef Drosuk et ses proches et imposé un tribut à ce peuple.
La saison était trop avancée pour que je
puisse envisager une riposte. Je tournai bride pour revenir en Francie.
Après avoir passé les fêtes de Pâques à
Nimègue en compagnie de Walla et d’Adalhard, j’appris avec stupeur que, non
content d’avoir écrasé les Obodrites, Hemming venait de violer les frontières
de la Westphalie !
J’envoyai une armée commandée par mon fils
Charles mettre un terme à cette invasion. Lorsqu’il arriva sur l’Eider, il
chercha à établir le contact avec les Danois, mais en vain. Il apprit des
moines d’Esselfeld qu’Hemming avait, au cours d’une embuscade, perdu un de ses
parents, Reginald, et que son chagrin l’avait fait renoncer à poursuivre sa
campagne.
Redoutant de voir mes armées franchir l’Eider,
Hemming avait établi de gigantesques retranchements le long du fleuve, dans le
but de protéger les limites méridionales de son royaume, avec une seule voie de
passage, mais puissamment fortifiée. Je ripostai à cet acte d’hostilité en
décidant de renforcer la forteresse d’Esselfeld, dont Charles confia la garde à
l’un de ses comtes, Egbert, avec une centaine d’hommes.
Les affaires
allaient en rester à ce point durant des mois, Francs et Danois s’observant
par-dessus l’Eider et les provocations fusant de part et d’autre. Egbert, par
la capture d’une patrouille danoise, avait appris qu’Hemming n’avait pas
renoncé à son intention d’envahir la Germanie, et qu’il amassait des troupes en
nombre suffisant dans l’intention de les conduire jusqu’à Aix me détrôner et
coiffer la couronne impériale ! Je pris cette nouvelle comme une
vantardise d’aventurier.
En revanche, je pris au sérieux le message
d’un de mes envoyés opérant en Frise. Renonçant à des projets démesurés,
Hemming avait décidé de s’attaquer à ce pays que j’avais eu tant de mal à
soumettre, et avait jeté sur ses côtes deux cents drakkars et des milliers de
guerriers.
Sortant de ma retraite, l’été 810, malgré mon
âge, je pris la tête d’une armée, en me jurant que cette campagne serait pour
moi la dernière.
Le rassemblement eut lieu à Lippenham, sur la
rivière Lippe, aux confins de la Frise. J’avais sous mon commandement mon fils
Charles, qui allait avoir une ultime occasion de montrer sa valeur guerrière.
À marches forcées nous avons pénétré dans les
plaines frisonnes, piétinant dans des marécages s’étendant à l’infini où
s’embourbaient nos chariots, quand je constatai que le principal ennemi que
nous aurions à combattre allait être les fièvres des marais. Les sévices
avaient débuté avec les bœufs attelés à nos chariots et ceux que nous
destinions à notre subsistance, décimés par une mystérieuse épidémie. Nous
perdîmes beaucoup de nos hommes, chaque nuit, nos tentes étant envahies par des
nuées de
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