La confession impériale
une tactique
éprouvée.
Je profitai de la confusion qui agitait les
abords du camp pour jeter sur l’ennemi la cavalerie postée sur les flancs. La
bataille, pour les Angrariens, ne tarda pas à tourner au massacre. La chaleur
se faisant intense, ils amorcèrent leur repli en direction de la forêt, nous
laissant maîtres du terrain.
Nous leur avons tué plusieurs centaines de
guerriers que nous avons jetés dans le fleuve, et capturé une centaine d’autres
que j’ai fait conduire à Brunisberg, liés à des cordes. Là, en présence de la
population rassemblée sur la place centrale, j’ai demandé que soient décapités
les captifs. J’avais souhaité faire un exemple, aussi brutal fût-il ;
cette victoire m’en a donné l’occasion.
Nous avions perdu dans la bataille environ une
centaine de fantassins et de cavaliers, laissés aux loups et aux vautours, avec
une croix pour marquer l’emplacement de notre victoire. Par chance nous avions
préservé nos chariots et notre convoi d’animaux de boucherie et de chevaux de
remonte.
Je laissai au camp proche de Brunisberg une
garnison d’une centaine d’hommes et une dizaine de moines, à charge pour les
premiers de surveiller la région et pour les seconds de construire un monastère
et d’élire un abbé.
J’étais fier de cet exploit qui allait faire
courir dans toute la région le bruit de mon invincibilité et de la rigueur de
mon châtiment. Une leçon dont l’ennemi se souviendrait.
Je ne restai à Brunisberg que le temps de
laisser un peu de repos à nos hommes et à nos chevaux, avant de prendre la
route du sud, en direction de ma forteresse d’Eresbourg.
Nous y célébrâmes notre victoire par un grand
festin, des chants et des danses qui durèrent toute la nuit et auxquels nous
invitâmes les habitants à participer. J’assistai à un office solennel dans la
chapelle de bois de la forteresse dressée au milieu d’un désert d’ajoncs et
d’osiers sauvages.
Il restait, dans une localité proche
d’Eresbourg, au milieu d’un cercle de bouleaux, près d’une fontaine encore
garnie d’offrandes votives, sous forme de bouquets et de colliers, un étrange
monument dont nos soldats ne savaient que faire.
Un vieillard qui connaissait quelques mots de
notre langue m’apprit qu’il s’agissait de l’effigie d’une divinité païenne
vénérée dans le pays : l’ Irminsul . En apparence, ce n’était rien
d’autre qu’un tronc d’arbre qui rappelait vaguement une forme humaine. Ce
monument, me dit le vieil homme, avait été érigé au lendemain de la victoire de
ses compatriotes sur les légions de Varus, il y a huit siècles de cela.
Se trouvait, au milieu d’offrandes misérables :
lambeaux d’étoffes, mèches de cheveux, bouquets de fleurs sauvages, quelques
bijoux d’or et d’argent dont nous fîmes notre butin.
Que faire del’ Irminsul ?
Le laisser en place eût laissé subsister une croyance païenne, ce que je jugeai
inconcevable. L’un de nos moines me conseilla de le livrer au feu, mais cela
risquait de créer des troubles dans la population. J’accédai cependant à cette
idée et fis dresser un bûcher autour du monument. Le feu brûla toute la nuit,
mais, le lendemain, l’ Irminsul se dressait encore, noirci mais intact,
au milieu d’un monceau de cendres fumantes. Il fallut l’abattre et le
tronçonner pour en venir à bout.
À quelques jours de
ces événements, je vis surgir un groupe de cavaliers angrariens à la mine
sombre, venus faire leur soumission, au nom de leur chef, Edeling. Ils me
remirent des présents sous forme de bracelets et de torques d’argent, de fruits
et de venaison. Genou à terre, ils me promirent de ne plus tirer les armes
contre moi.
Par l’intermédiaire de mon truchement, je les
reçus avec courtoisie, les écoutai avec respect et leur demandai, pour
confirmer leur soumission, de me confier une dizaine d’otages. Ils les
prélevèrent sans barguigner dans leur suite. Après avoir promis de les traiter
humainement, je donnai congé aux émissaires d’Edeling en manifestant mon
souhait de le rencontrer dans des circonstances plus favorables.
La rude leçon de Brunisberg n’avait pas tardé
à porter ses fruits.
Dans les premiers
jours de septembre, j’assistai à la consécration de l’église de Sigisburg, sur
la rivière Ruhr et, dans les prières que j’y fis, je louai le Seigneur de ses
bienfaits.
Comme je me préparais à retourner en
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