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La confession impériale

La confession impériale

Titel: La confession impériale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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que tes soldats ne touchent à rien
d’autre qu’à l’herbe pour les chevaux et les bœufs, à l’eau pour étancher leur
soif et au bois pour cuire leurs aliments… »
    Trop souvent, hélas, j’allais être incapable
de faire respecter ces paroles empreintes d’humanité. Je prie le Seigneur de me
le pardonner.
    Pour provoquer le
rassemblement de mes corps d’armée, j’adressais à mes vassaux et alliés des
« capitulaires » : des missives dans lesquelles je détaillais
leurs droits et leurs devoirs. J’y fixais le nombre de combattants que
j’attendais d’eux, pour la plupart des serfs de leurs domaines astreints au
service armé, en veillant à ce qu’ils fussent normalement équipés et armés,
avec chacun pour trois mois de subsistances. J’insistais sur la nécessité d’une
discipline stricte : châtiments pour pilleries, viols ou mauvais
traitements envers les populations, répression de l’ivrognerie. Pillages et
massacres n’auraient lieu qu’en toute extrémité, avec mon autorisation et pour
l’exemple.
    Les mêmes décrets s’imposaient pour les camps.
Ils devaient être installés sur le modèle des légions romaines : terrain
plat, ceinture de palissades, tours de bois, cabanes pour les services et les
entrepôts, alignements de tentes séparées par des allées, parc pour les chevaux
et les animaux de boucherie… Somme toute, un grand village dressé sur un espace
restreint et appelé à une existence précaire.
    J’avais défini les couleurs de notre
étendard : il serait noir et rouge, mais nos vassaux avaient le leur, qui
se mêlait au mien dans la marche. Signe de ralliement et symbole sécuritaire,
il était déployé à l’approche d’une ville ou au moment d’une charge. Une
fanfare précédait chaque corps d’armée. Ce superbe tintamarre jetait l’effroi
chez l’ennemi, le plus souvent des paysans qui ne connaissaient que la flûte de
roseau et le tambour.
    Je m’en tenais à ma résolution de vivre au
milieu de mes hommes, partageant leur détresse lors d’une bataille perdue et
leur joie lors d’une victoire. Ma seule présence suffisait pour leur donner de l’allant
ou les réconforter le cas échéant. Je ne leur ménageais ni les exhortations, ni
les compliments, ni parfois les flatteries, déclarant qu’ils étaient les
meilleurs soldats du monde et qu’aucune armée n’aurait pu leur résister.
    Nos ennemis n’étaient pas de taille à nous
affronter en rase campagne, et s’y risquaient rarement. Ils se battaient avec
un courage et un esprit de sacrifice impressionnants, mais sans la moindre
méthode et en usant de stratégies rudimentaires.
    Ils étaient vêtus comme des sauvages, de peaux
de bêtes, avec des bandelettes d’écorce pour protéger leurs jambes, coiffés de
casques de cuir ou de bucranes d’où s’échappaient d’épaisses nattes. Leurs
armes étaient à l’avenant : lances de bois à la pointe durcie au feu,
courtes haches de mauvais métal, coutelas appelés sachs, boucliers
d’osier… Au moindre accrochage sérieux, ils fondaient sur nous en hurlant comme
des loups, tuaient quelques hommes, éventraient quelques chevaux et se
débandaient avec des rires méprisants.
    Les territoires de
l’Est dans lesquels nous allions nous engager durant cet été de l’an 775, au
départ de Quierzy, avaient, à peu de chose près, les dimensions de la Francie.
Ils étaient limités au nord par les frontières du Danemark, au sud par la Hesse
et la Thuringe, à l’est par la Frise et à l’ouest par l’Elbe, frontière
naturelle avec les mystérieuses peuplades slaves. C’était un inextricable
mélange de tribus qui s’adonnaient à de fréquentes razzias et à des guerres
intestines. Ces Barbares n’avaient ni roi ni chef capable de les réunir pour
faire face à une armée d’invasion organisée.
    Il n’entrait pas
dans mes projets d’obtenir la soumission générale de ces immenses territoires
où des légions romaines s’étaient perdues corps et biens. Je devrais me
contenter de montrer ma puissance par des opérations punitives limitées, sur
des points précis. L’annexion totale ? Une illusion à laquelle je ne cédai
pas. Il eût fallu une centaine de milliers d’hommes ; je n’en avais pas le
dixième…
    J’avais adopté pour cette campagne une
nouvelle stratégie : au lieu de passer comme une tornade et laisser
derrière moi un bain de sang et des terres dévastées, je prendrais d’assaut

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