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La couronne et la tiare

La couronne et la tiare

Titel: La couronne et la tiare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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tout : Waldemar III, le roi du Danemark, viendra aussi.
    – Pourquoi ? demanda Tristan.
    Guy d’Azai se rengorgea, vida son hanap, l’offrit à un échanson qui passait et le lampa encore. Puis, regardant ses compères :
    – La Croisière 55 … Pour se débarrasser des routiers, quoi de mieux que de les envoyer outre-mer pour y meurtrir les infidèles et reconquérir la Terre Sainte ? Pierre de Lusignan a reconquis avec ses chevaliers la cité de Satalie 56 . Nul doute que si nous nous y mettons tous, la Terre Sainte nous appartiendra, cette fois définitivement.
    Tristan hocha la tête, aussi peu enclin à participer à ce grand dessein qu’Archiac.
    –  Cela fut le rêve de Philippe le Sixième. Il fit construire une flotte nombreuse puis renonça. Cette flotte, les Anglais l’envoyèrent par le fond à l’Écluse. Jamais, depuis, la mer fut nôtre. Et voici que le roi Jean va se prendre pour Godefroy de Bouillon !
    Il serait temps, dit Tristan, qu’il remporte une victoire.
    – Hé ! Hé ! fit Archiac, pourquoi ne conquerrait-il pas sa voisine ? Voyez-le se paonner (257) et faire le joli cœur ! Il en ignore le Pape !
    Jean II n’était qu’attentions et paroles. Cependant, s’il déployait, auprès de Jeanne de Naples, des trésors de séduction, il apparaissait qu’il l’agaçait et parfois même, la courrouçait. Elle le regardait juste ce qu’il fallait pour ne point se montrer discourtoise et devait réprimer des soupirs de mésaise, voire des bâillements. Mais le roi de France ne voyait rien, trop occupé à séduire. Certes, il ignorait que cette femme n’était sensible qu’à la fermeté. Ses façons de béjaune allaient à l’inverse de ce qu’elle attendait d’un homme et surtout d’un roi. « Le dauphin Charles n’a rien à craindre » songea Tristan. « Il ne la subjuguera point. » Et à haute voix, sur un ton de confidence :
    – On n’épouse pas un roi qui doit repartir pour l’Angleterre purger son otagerie, et qui devra y demeurer jusqu’à ce que son énorme rançon soit acquittée.
    – Ce beau mariage et la dot qu’il en retirerait lui permettraient d’écourter son supplice.
    –  Supplice , dites-vous, Archiac. Vous savez, tout comme moi, qu’il n’existe aucune captivité plus dorée que la sienne… Et je vous le demande : pourquoi essaierait-il d’y échapper pour aller se sécher la chair et peut-être quérir la mort en Terre Sainte ?
    Archiac eut un geste évasif si éloquent toutefois que son couteau faillit atteindre Tristan au visage.
    – Le suivriez-vous, Castelreng, s’il vous en priait ? Vous établiriez-vous en ce pays de soleil et de sable ?
    – Il faudrait que j’en reçoive commandement… Et je ne puis vous dire si j’obéirais.
    – Même loin, très loin, le droit d’épavité laverait votre conscience de toutes les inquiétudes qui pourraient l’assombrir 57 .
    Guy d’Azai souriait sans savoir que sa flèche était émoussée.
    – Je me soucie peu de mon héritage, messire. Ce que je me dis, c’est que nous avons déjà tant à faire avec les Anglais que ce serait une folie de traverser la mer sans nécessité impérieuse.
    – Le royaume du Christ… commença Archiac.
    – Nous pourrions essayer de le conquérir après avoir vaincu les Anglais. Après avoir délivré notre royaume des meutes qui se le disputent.
    La conversation prenait une aigreur que Tristan réprouva. Guy d’Azai, qui semblait un homme d’une sérénité sans faille, tourna son visage vers les convives, côté Pape, et demanda :
    – Et lui ? Pensez-vous qu’il serait des nôtres pour guerroyer en Palestine ?
    Il désignait Audrehem tout occupé par son écuellée de poisson dont il extrayait du bout des ongles les arêtes pour les jeter sous la table.
    – Je ne crois pas qu’il viendrait avec nous, dit Tristan. Comme à Poitiers, il ferait en sorte de nous laisser aller de l’avant. Il arriverait au port après le départ des nefs.
    –  Poitiers, dites-vous, fit Archiac. S’il n’y avait que Poitiers !… Il fut en retard aux sièges de Newcastle et de Durham (258) mais fut un des premiers à fuir quand Édouard III montra sa hure. Il fut aussi de ceux qui assiégèrent le château de Wark, parce que sa défense était assurée par une femme : la comtesse de Salisbury. A Ploërmel, l’année suivante, il recule. A Aiguillon, il se musse. A Taillebourg, il se fait capturer. Le roi Jean qui l’aime bien

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