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La danse du loup

La danse du loup

Titel: La danse du loup Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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mes amis. Cela risque d’être pire que la bataille des Vénètes ! En moins grandiose. Notre mestre-capitaine est plus habile à manœuvrer par gros temps qu’à briser un assaut. À la grâce de Dieu ! À nous trois, nous en valons bien trente ! nous exhorta le chevalier.
    — Mais ils sont peut-être dix fois plus nombreux ! m’écriai je, un tantinet inquiet.
    — Peut-être, et alors ? Notre victoire n’en sera que plus belle ! Restez quiet ! Observez l’adversaire ; voyez ses faiblesses et soyez prompt à réagir, à vous battre sans jamais douter de votre courage ! »
     
    Les mains en visière au-dessus des yeux, éblouis par le soleil, nous distinguions à présent le pavillon qui flottait en haut d’un mât unique, voile ferlée : de sable à la tête de mort d’argent et à deux sabres passés en sautoir sur croissant de lune aux mêmes . Il n’y avait plus de doute sur les intentions de nos visiteurs.
    Leurs trois rangées de rames plongeaient et pourfendaient l’eau en suivant les battements endiablés et de plus en plus rapides, du tambour qui commandait l’allure. Une allure de charge.
    Le ciel était d’un bleu délavé, la mer d’un calme plat. Les pirates bénéficiaient de trois avantages sur nous : la position du soleil, l’avantage de la rame sur la voile par temps de curé, et le nombre. Malgré la froidure, je sentis des gouttes de sueur de plus en plus nombreuses perler sur ma nuque, mouiller mes aisselles et ruisseler dans mon dos.
    Nous entendions à présent les claquements secs des coups de fouet que les gardes-chiourme distribuaient généreusement sur le dos des esclaves. De plus en plus forts. De plus en plus proches
    Sur la nef, un coup de sifflet déchira l’air, suivi d’un ordre de changement de cap et d’une question inquiétante :
    « La barre sur bâbord ! Parés à être éperonnés ! Le mestre-charpentier est-il à son poste ?
    Paré à calfeutrer, cap’taine. Mais à quoi bon ? Nous allons tous périr ! Les barbaresques sont trop rapides et trop nombreux ! hoqueta le mestre de manœuvre. »
     
    Un gigantesque éperon d’acier, forgé comme un harpon, fendait les flots à l’avant de la ligne de flottaison de la trirème, à moins de cinq ou six bordées.
    Des boules de feux grégeois, projetées par des catapultes, s’abattirent sur nous, suivies par des nuées de flèches. Je jetai un œil sur le pont. Une douzaine de marins agonisaient. Sur le panier de hune, les trois arbalétriers avaient disparu. Ils gisaient désarticulés, en contrebas, une flèche ou deux fichées en pleine poitrine.
    Des brandons mordaient déjà les haubans, enflammaient les voiles, la mâture et le pont. Des matelots gesticulaient en tous sens pour tenter d’éteindre avec des couvertures le feu qui se propageait partout. Une nouvelle grêle de flèches les cloua au sol.
    «  Bombarda  ! Allumez la mèche ! Feu ! »
    Nous portâmes instinctivement les mains à nos oreilles, espérant un miracle. Nous n’avions encore jamais vu de pot-à-feu. Nous étions attentifs, émerveillés à l’idée de découvrir l’efficacité de ce tout nouvel engin d’artillerie dont nous avions seulement ouï parler.
    Il terrifiait plus l’ennemi, paraît-il, par le bruit assourdissant du coup de tonnerre qui suivait la mise à feu, que par la puissance, pourtant redoutable, des projectiles qu’il expédiait à une vitesse vertigineuse.
    Nous ne serions pas instruits de la puissance de cette arme nouvelle, ce jour d’hui. On n’entendit rien. Rien d’autre que la voix dépitée du mestre de manœuvre :
    « La mèche a fait long feu. Poudre trop humide ! E molto pericoloso   !
    —  Sauve qui peut ! hucha le mestre-capitaine, la barbe roussie par quelque brûlot. Chacun pour soi ! » Lui, si sûr, si adroit dans la tourmente, nous avait habitués à mieux. Il semblait désemparé, impuissant à donner un ordre cohérent, paralysé par l’angoisse face à ce combat d’une autre nature.
     
    Un craquement sinistre se produisit lorsque l’éperon d’acier de la trirème embrocha, aussi aisément qu’on enfile un cochon sur une broche, la frêle coque de notre nef avant d’en pénétrer profondément les entrailles pour en faire ripaille. Il ouvrit une formidable voie d’eau après avoir brisé les carènes en chêne.
    Nous entendîmes les gémissements du bois déchiqueté lorsque l’éperon poursuivit sa course meurtrière à l’intérieur de la

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