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La danse du loup

La danse du loup

Titel: La danse du loup Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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croyez-moi, messire Bertrand. Aussi capiteux, mais plus corsé.
    — Ah ? Vous connaissez les vins de la vallée du Rhône, frère Jean ?
    — Un peu, très peu », bafouilla le moine en plongeant le nez dans son écuelle.
    Foulques dégustait ses tranches de jambon en les tranchant en menus morceaux avant de les porter en bouche, de les mastiquer consciencieusement et de piquer un quartier de melone. Arnaud et moi séparions le gras du maigre sur nos tranchoirs de pain rassis, à l’aide de notre coutelas, avant de les mettre en bouche jusqu’à ce que le mestre-capitaine nous rappelle qu’à son bord tout ce qui était servi se mangeait : le sec viendrait bien assez tôt !
     
    La nef gîtait de plus en plus. Le mestre-capitaine se leva brusquement en lâchant un sonore “per Neptuna   ! " et nous planta là pour monter sur le pont où il ordonna un changement de cap pour laisser porter. Ordres et coups de sifflet s’enchaînèrent d’une façon inquiétante puisque nouvelle pour nous. La curiosité l’emporta sur la digestion.
    Nous montâmes tous les quatre sur le château d’arrière par une échelle étroite et abrupte dont les marches gémissaient dès que nous portions le poids de notre corps sur icelles pour nous hisser. Le vent venait de tourner au sud-est en fraîchissant et en nous apportant un air plus chaud. Il avait failli plaquer dangereusement les voiles sur les mâts. Le navire filait à présent vers le sud, s’éloignant des côtes à près de cinq nœuds, nous précisa le timonier. Je l’interrogeai sur cette unité de mesure que j’ignorais pour la traduire en bonnes et solides lieues terrestres qui me parlaient mieux que les milles marins.
     
     

     
     
    Peu avant la tombée du jour, nous descendîmes derechef pour prendre notre souper. Le mestre-capitaine précéda Foulques de Montfort. Arnaud et moi les suivîmes. Frère Jean avait cédé son tour pour nous inviter à le précéder. S’il venait à glisser, il tomberait sur moi et adoucirait sa chute à mon détriment, devait-il penser. Les courroies des simples sandales qui laçaient des pieds qu’il avait nus, manifestaient, il est vrai, des signes de fatigue inquiétants et pouvaient se rompre à tout moment.
    Un frère dominicain est un homme qui réfléchit avant d’agir. N’était-il pas, au fond, investi d’une mission d’ordre divin pour la propagation de la foi qui ne souffrait aucune comparaison dans l’alchimie des valeurs du Tout-Puissant avec celle, tellement plus modeste, d’un simple écuyer ?
    Au moment où j’allais poser le pied sur la première marche, je vis Arnaud prendre appui des deux mains sur la rampe qui encadrait la descente, soulever les pieds et les jambes et se laisser glisser. La pente en était forte.
    Il glissa promptement, les pieds en avant. Il heurta les fesses de Foulques de Montfort au moment où il allait poser le pied sur le plancher et le projeta de telle façon que le chevalier heurta à son tour le mestre-capitaine. Arnaud finit sa course en atterrissant sur le cul plus vite qu’il ne l’avait envisagé.
    Foulques balbutia quelques excuses à notre hôte, aida Arnaud à se relever en lui tendant une main et lui administra de l’autre une paire de claques à toute volée.
    La barbe du mestre-capitaine frémissait. Ses yeux roulaient dans leurs orbites. Il était visiblement furibond et cherchait les mots pour le dire. Il n’appréciait pas les acrobaties d’Arnaud. Moi, je pouffais de rire. Le chevalier me foudroya du regard et, se tournant vers Arnaud, lui intima :
    « Messire de la Vigerie, vous prendrez dorénavant vos repas à l’avant avec l’équipage. Jusqu’à nouvel ordre. Puis, s’adressant au capitaine : si notre homme le permet ? Mestre-capitaine, le permettez-vous ?
    — Non, messire chevalier, trancha ce dernier, courroucé. Les matelots prennent leur pitance entre eux. Ce sont de forts gaillards et la présence de messire Arnaud pourrait déclencher quelque bagarre. Il ne saurait en être question. Ils n’en feraient qu’une bouchée. Votre écuyer prendra ses repas dans la cale sèche jusqu’à ce que j’en décide autrement. » Foulques et Arnaud blêmirent, serrèrent les dents sans prononcer une parole. Le capitaine était seul maître à bord. Après Dieu. Mais Dieu était apparemment retenu par des affaires autrement plus importantes.
    Arnaud n’en était pas à une farcerie près. Le soir même, nous fûmes conduits par un

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