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La Dernière Bagnarde

La Dernière Bagnarde

Titel: La Dernière Bagnarde Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernadette Pecassou-Camebrac
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piétements de bronze. I n différent
à toute civilité d'usage, le directeur ne se leva pas.
Apparemment il ne s'embarrassait de rien et Louis Dimez nota qu'au
négligé de sa tenue s'ajoutait celui de son la n gage.
    — Oui,
oui, on sait, vous êtes arrivés. Nous l'avons noté,
expliqua-t-il, et d'ailleurs, comme vous avez pu le constater, un
o f ficier
était là avec des hommes pour l'encadrement. Nous avons
fait notre boulot.
    — C'est
vrai, acquiesça Louis Dimez, décontenancé par
cette r é ponse
qu'il ne pouvait contredire. Mais les sœurs affirment qu'elles
n'ont pas été prévenues de l'arrivée des
détenues et que rien n'est prévu pour les accueillir.
Comment c e la
est-il possible ?
    — C'est
leur affaire, pas la nôtre, répliqua le dire c teur.
    — Comment
cela ? s'exclama Louis Dimez, stupéfait. Vous n'avez pas
prévenu les sœurs ?
    — Mon
jeune ami, au cas où vous ne l'auriez pas remarqué, je
ne suis pas un homme d'Église. Je suis au service de la
R é publique,
payé par elle. Les prières publiques parlementaires,
c'est fini, et les prières publ i ques judiciaires
et les messes rouges aussi, c'est terminé. Ça fait
trois ans que notre cher ministre de la Justice Martin-Feuillée
les a rendues non oblig a toires.
Vous ne vous en étiez pas aperçu ?
    — Mais
le rite des prières publiques n'a rien à voir
avec nos pr a tiques
communes instaurées depuis longtemps. Nous travaillons avec
les sœurs.
    — Et
alors ? Ça, ça ne change pas. Mais je n'ai aucun ordre
à do n ner
aux sœurs. Et je n'ai rien à leur anno n cer.
C'est à leur hiérarchie de s'en préoccuper. On
ne va quand même pas faire le travail à leur place, non
? Leur chef, ce n'est pas moi.
    Louis
Dimez en fut soufflé. Ainsi, un sous-fifre avait bien noté
l'a r rivée
du convoi des détenues, mais personne ne s'en était soucié. Pou r tant
le directeur n'avait pas tort, les hommes d'Église en haut
lieu étaient eux aussi responsables de ce qui arrivait. Dans
le flou plutôt conflictuel entre les deux mondes, religieux et
civil, des deux côtés, des hommes responsables avaient
laissé arriver ce contingent de dét e nues
dans la plus totale impréparation et la plus grande
indifférence quant à leur
sort. Cette conversation ne déboucherait sur rien. C'était
un dialogue de sourds dont Louis Dimez avait saisi l'essentiel :
pe r sonne
n'était ni ne serait responsable. Et ceux qui auraient dû
en rendre compte étaient à des
milliers de kilomètres. Restaient les femmes épuisées,
et les sœurs abandonnées à leur sort face à ces
dét e nues
dont personne ne voulait ni ne se so u ciait
Louis Dimez regarda le directeur de Saint-Laurent avec des yeux
graves qui en d i saient
long sur ce qu'il pensait de son attitude mais il ravala les mots
cinglants qui montaient à ses
lèvres et, pragmatique, passa froidement à la
question su i vante.
    — Bien.
Parons au plus urgent. Que fait-on de ces détenues ? Où
les installe-t-on ?
    — Les
sœurs n'ont qu'à les installer où elles veulent.
Ça n'est pas notre problème.
    Cette
fois la coupe était pleine. Louis Dimez, qui n'en po u vait
plus de se contenir face à tant d'indifférence, haussa
le ton.
    — Bien
sûr que si, nous sommes responsables des bâtiments et
d e vons
fournir toutes commodités et ga r diennage.
    — Des
commodités ! Ah, là, là, c'est la meilleure,
celle-là. Mais de quoi parlez-vous ? Quelles commodités
? s'énerva alors le directeur, contrarié par son ton.
Vous m'avez l'air bien renseigné, mais pas sur tout
apparemment. D'où tenez-vous vos sources ? Des textes
officiels ? Des conversations en haut lieu ? Ils ne disent pas tout
Et surtout ils ne s a vent
rien ! Alors écoutez bien ce que je vais vous apprendre, moi
qui connais la pénite n tiaire
de Saint-Laurent bien mieux que vous : Sarda-Garriga le premier en
1852, Bonard en 1854, Baudin en 1856, Montr a vel
en 1859, tous les gouverneurs qui sont passés à
Saint-Laurent ont tiré des plans sur la comète. Ils
avaient tous leur idée pour en faire un pénitencier exemplaire.
Hélas, tous ces beaux projets sont restés à
l'état d'ébauche. Même l'architecte Mélinon
qui, en 1858, d é couvrit
l'empl a cement
idéal au bord du Maroni où nous sommes n'a rien pu
construire. Rien du tout ! À part les bâtiments pour
e n fermer
les hommes, rien de rien. Et pourtant il en avait prévu, des
choses, Melinon ! Salle de travail, salles de repos, salles d'étude,
piscine, il y
en avait,

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