La fabuleuse découverte de le tombe de Toutankhamon
photos des groupes d’objets numérotés. Hall et Hauser se chargeaient alors de faire le plan à l’échelle de la chambre, chaque objet étant dessiné en projection. Callender et moi établissions ensuite les premières notes et supervisions le transport des objets jusqu’au laboratoire. Là, Mace et Lucas les enregistraient, notaient leurs particularités en détail et s’occupaient de les traiter et de les restaurer.
Nous sortîmes d’abord le coffre de bois peint. Puis opérant du nord au sud, et remettant à plus tard de nous attaquer à l’enchevêtrement des chars, nous dégageâmes peu à peu les grands lits à têtes d’animaux. Chaque objet était placé sur une sorte de civière rembourrée et attaché avec des bandages. Pour éviter une double manipulation, nous les laissions presque toujours sur leur civière respective. Lorsque nous en avions chargé un nombre suffisant – une fois par jour, en moyenne –, nous les faisions partir en convoi, sous escorte, jusqu’au laboratoire.
C’était le moment qu’attendaient les visiteurs, agglutinés autour de la tombe. Aussitôt, jaillissaient les calepins des reporters, cliquetaient les appareils photographiques, et il fallait littéralement se frayer un chemin dans la foule pour pouvoir passer. Je crois bien qu’on a gâché plus de pellicules dans la Vallée cet hiver-là que n’importe où ailleurs depuis l’invention de la photographie. Un jour, nous eûmes besoin, au laboratoire, d’un morceau de linge de momie pour faire des expériences. Il fut photographié huit fois avant de nous parvenir sur une civière !
Le retrait et le transport des objets les plus petits ne posèrent pas de difficultés particulières. Mais il en fut tout autrement quand on arriva aux grands lits et aux chars. Chaque lit se composait de quatre éléments : les deux montants formés par le corps et la tête des animaux, le sommier proprement dit, et la base dans laquelle s’ajustaient les pieds des animaux. Ils étaient manifestement trop larges pour passer à travers le couloir et on avait dû les assembler sur place. On voyait d’ailleurs des raccords autour des joints. Il était évident que, pour les sortir de la tombe, nous devions les démonter à nouveau. Ce n’était pas chose facile, car, après trois mille ans, les crochets de bronze s’étaient enfoncés profondément dans les encoches. Il fallut se mettre à cinq pour y arriver. Deux d’entre nous soutenaient la partie centrale du lit, deux autres tenaient les montants, pendant que le cinquième dégageait doucement les crochets à l’aide d’un levier.
Même démontés, les montants restaient encombrants, et ce n’est qu’avec d’infinies précautions qu’on réussit à sortir tous les morceaux sans accident et à les emballer aussitôt dans les boîtes que nous avions préparées juste à l’entrée de la tombe.
Le plus compliqué fut le déménagement des chars. De construction fragile, ils avaient considérablement souffert du traitement que leur avaient infligé les pillards. On avait dû démonter les roues et scier les axes pour les faire entrer dans la tombe et, après le passage des voleurs, on avait empilé toutes les parties les unes sur les autres sans grand soin. Pour compliquer encore les choses, les harnais de cuir non tanné s’étaient transformés en une pâte visqueuse qui avait coulé sur les chars eux-mêmes et les objets environnants. Heureusement, je l’ai dit, nous avions, pour les reconstituer, les ornements d’or qui les recouvraient.
Il nous fallut sept semaines pour vider l’antichambre. On imagine notre soulagement qu’aucun désastre ne se soit produit au bout du compte. Un ciel menaçant nous tint pourtant dans l’angoisse pendant deux ou trois jours. Il semblait bien que nous n’échapperions pas à l’un de ces puissants orages qui éclatent de temps en temps à Thèbes. La pluie alors se déverse à torrents et, si l’orage persiste, le lit de la Vallée se transforme en une véritable rivière. Rien n’aurait pu empêcher que notre tombe soit inondée. Par bonheur, les nuages s’éloignèrent, et nous ne reçûmes que quelques gouttes de pluie. Certains correspondants se plurent à broder sur les conséquences désastreuses qu’aurait pu avoir cet orage. Cela nous valut un télégramme assez obscur, envoyé sans doute par un adepte zélé des sciences occultes qui nous conseillait, « pour éviter d’autres ennuis, de verser sur le
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