La fabuleuse découverte de le tombe de Toutankhamon
décidâmes de ne pas le briser. Nos doutes étaient dissipés, et nous ne pouvions aller plus loin pour l’instant sans risquer d’endommager le monument. Je crois aussi qu’en ouvrant les portes de la chapelle nous avions éprouvé le sentiment de profaner un lieu sacré, sentiment renforcé par la présence presque vivante d’un voile, décoré de rosettes dorées, qui recouvrait la seconde chapelle. Nous avions vraiment l’impression de nous trouver en présence du roi défunt, et cela nous rappelait au respect que nous lui devions. Nous pouvions voir en imagination les portes des chapelles successives s’ouvrir devant nous jusqu’à ce que le souverain lui-même nous apparaisse. Nous refermâmes silencieusement les grandes portes et poursuivîmes notre exploration.
Au bout de la chambre, une nouvelle surprise nous attendait. Une porte basse, sur la droite, donnait accès à une autre pièce, plus petite que les précédentes, et moins haute. Contrairement aux autres, cette porte n’avait été ni bouchée ni scellée. D’où nous étions, nous pûmes donc voir ce qu’elle contenait. Un seul coup d’œil suffit à nous faire comprendre que c’était elle qui renfermait les véritables trésors de la tombe. Face à la porte, contre le mur le plus éloigné, il y avait un coffre monumental, le plus beau que j’aie jamais vu, devant lequel nous restâmes muets d’admiration. C’était un tabernacle, entièrement recouvert d’or et surmonté par une frise de cobras sacrés. Autour de lui, se tenaient les quatre déesses tutélaires du mort, les bras tendus en signe de protection, si naturelles et si vivantes dans leur pose, leur visage exprimant tant de compassion et de pitié qu’on osait à peine les regarder. Elles veillaient chacune sur un côté du coffre mais, tandis que celle de devant et celle de derrière avaient le regard fixé sur le coffre dont elles avaient la charge, les deux autres, la tête tournée de côté, regardaient par-dessus leur épaule, comme pour surveiller l’entrée.
La chambre contenait bien d’autres merveilles, mais nous avions du mal à détourner nos yeux des magnifiques petites déesses. Tout près de l’entrée, se dressait la statue du chien Anubis sur son naos, enveloppée d’une étoffe de lin et posée sur des brancards. Derrière le dieu, on apercevait une tête de vache, symbolisant, elle aussi, l’univers des ombres. Contre le mur sud de la chambre, étaient déposés des coffres et des tabernacles de bois noir, tous fermés et scellés, à l’exception d’un seul, dont les portes ouvertes laissaient apparaître des statues de Toutankhamon montées sur des léopards noirs. Vers le mur du fond, des boîtes en forme de naos et des cercueils miniaturisés en bois doré contenaient sans doute des statues funéraires du roi. Au centre de la pièce, à la gauche d’Anubis, se trouvait une rangée de coffres en bois et ivoire, incrustés d’or et de pâte de verre bleue. En soulevant le couvercle de l’un d’eux, nous découvrîmes un riche éventail en plumes d’autruche au manche d’ivoire, qui semblait sortir de l’atelier de l’artisan. Il y avait aussi, distribuées un peu partout dans la chambre, des maquettes de bateaux, avec voiles et cordages, et sur le côté nord un autre char.
Nous cherchâmes anxieusement des signes d’intrusion dans cette dernière chambre, sans en trouver aucune. Les voleurs y étaient certainement entrés, mais ils n’avaient pas eu le temps d’ouvrir plus de deux ou trois coffres. La plupart des boîtes portaient encore leurs sceaux, et l’arrangement des objets semblait indiquer qu’ils n’avaient pas été déplacés.
Je ne sais plus combien de temps nous restâmes à contempler ces merveilles, mais notre absence dut paraître une éternité à ceux qui nous attendaient. On ne pouvait admettre plus de trois personnes à la fois ; aussi, lorsque lord Carnarvon et M. Lacau sortirent, les autres vinrent-ils par deux. Ce furent d’abord lady Evelyn Herbert, la seule femme présente, et sir William Garstin, puis le reste de la compagnie. Quand ils revenaient dans l’antichambre, émerveillés, stupéfaits, ils ne pouvaient qu’écarter les bras, dans un geste d’impuissance, incapables de formuler une quelconque description des merveilles qu’ils avaient vues. Elles étaient, en vérité, indescriptibles, et les émotions qu’elles faisaient naître en nous étaient d’une nature trop intime pour les
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