La Femme Celte
n’est
pas par hasard que la Vierge Marie se manifeste dans des grottes comme celle de
Lourdes. Ce n’est pas non plus par hasard que la Tradition place la naissance
du Christ dans une grotte servant d’étable. Les églises romanes et surtout les
cryptes ne font que perpétuer cette idée, qui est un héritage des temps
paléolithiques où les êtres humains se terraient dans les cavernes, y vivaient,
y dormaient, y mouraient, y imploraient les divinités, y enfouissaient leurs
morts. Mais chez les Celtes, l’héritage est encore plus direct et date de
l’époque néolithique : ce sont d’abord les grottes naturelles ou aménagées
comme celles de la vallée du Petit Morin, près de Coizard (Marne). La Femme Engloutie
y attend ses zélateurs : elle est figurée en déesse funéraire sur les murs
de craie. Ensuite, ce sont les monuments mégalithiques, les dolmens, avec leur
chambre solitaire, et surtout les allées couvertes, ces étranges allées
couvertes, qui sont constituées d’un long couloir, parfois coudées, conduisant
à une chambre-sanctuaire, au fond de la terre. Et le couloir, qui est très bas
près de l’entrée, devient de plus en plus haut à mesure qu’on s’approche de
l’antre. C’est là que les Gaëls faisaient vivre les dieux et leurs déesses,
celles qui dans le folklore deviendront les fées, les bonnes dames, et dont le
souvenir n’est pas encore perdu dans nos campagnes à l’heure de la télévision
et du bulldozer.
Les Grottes aux Fées :
« Dans la baie de Yaudet en Ploulec’h, sur les bords de la Manche
bretonnante, tout le monde parlait autrefois d’une grotte peu profonde où se
trouvait, non une fée, mais une princesse qui y avait été enchantée avec
d’immenses trésors. Elle doit rester endormie jusqu’au jour où un célibataire,
inaccessible à la peur, sera venu la délivrer » (Paul Sébillot, Folklore de la France , II, 121). Il y a une grotte
des fées à Guernesey où l’on ne peut pénétrer qu’à marée basse et en grimpant
sur de grosses masses de rochers entassés à l’entrée ( Ibid. , II, 116). Un chasseur bossu pénètre dans une
grotte, près de Lourbières (Ardèche) : il voit la grotte illuminée, la
mousse changée en or, et au milieu une table bien servie. Il mange. Alors il
voit tomber des quilles d’or, puis une boule d’or : mais c’était le corps
d’une fée qui se mit à chanter ( Ibid. , I,
437). « Les Fées noires de la région pyrénéenne emportaient les jeunes
vachers qui abandonnaient la surveillance de leurs troupeaux pour chercher des
nids de perdrix blanches. Les Margot-la-Fée gardaient aussi des hommes dans
leurs cavernes, mais sans les y contraindre ; ils s’y plaisaient tellement
que le temps leur semblait moitié moins long qu’il n’était réellement » ( Ibid. , I, 442). « Des fées avaient leur demeure
souterraine dans le voisinage de Giromagny, non loin de Belfort ; souvent
les cultivateurs, en menant leur charrue, les entendait racler leur
pétrin » ( Ibid. , I, 451). Dans les Ardennes,
à Saint-Aignan, des failles profondes qui laissaient échapper une buée parfois
très intense, passaient pour être la demeure des fées. Les gens croyaient que
la buée était la fumée de leur cuisine ( Ibid. ,
I, 452). « Une caverne de la vallée de la Vienne, près de
Saint-Victurnien, était autrefois habitée par des êtres surnaturels, moitié
femmes, moitié animaux, connus sous le nom de fanettes, c’est-à-dire mauvaises
fées » ( Ibid. , I, 453). Sur la côte de la
Manche, de Saint-Brieuc à Dinard, les fées qu’on appelle des houles , habitent des grottes qui « se prolongeaient
bien avant dans les terres, jusque sous les bourgs, d’où l’on entendait chanter
les coqs des fées : l’une d’elles aboutissait à Notre-Dame-de-Lamballe, à
quarante kilomètres de son entrée. Suivant quelques récits, quand on avait
franchi une sorte de tunnel, on voyait un monde pareil au nôtre, qui avait son ciel,
son soleil, sa terre et ses arbres, et même de beaux châteaux au bout de
longues avenues » ( Ibid. , II, 108).
Cette dernière superstition se rapporte curieusement à la
croyance irlandaise selon laquelle, dès qu’on a franchi les limites du tertre aux fées, de ce fameux sidh , on découvre un univers analogue au nôtre.
C’est cet univers qu’habitent les Tuatha Dé Danann, ces dieux de l’ancien
temps, c’est-à-dire les tenants d’une civilisation dont les
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