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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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conteras ce que tu as fait depuis Chauvigny.
    Sur le chemin passaient toujours des chevaliers et des hommes d’armes. Pour aller où ? Beauvais. Pour trouver quoi ? La mort peut-être, et sûrement la déception.
    – Aude et votre père vont bien ; les serviteurs sont toujours pareils, sauf Guillemette : elle est grosse, mais on ne sait de qui… Ah ! là là, messire, vous avez pu vous échapper d’Angle !… J’en étais sûr, et c’est pourquoi je suis parti…
    – Je t’en parlerai. Qu’as-tu fait en quittant Chauvigny ?
    – Je me suis séparé de Raymond et des autres. Hérodiade, Denis et la singesse ont repris le chemin d’Avignon ; Raymond, Marcaillou, les chevaux et Saladin sont partis pour Gratot… Veillantif et moi, on est allés à Paris.
    Thierry se frotta un œil. La perte de Veillantif l’avait profondément affligé ; le fait d’en parler touchait une plaie trop fraîche. Cette mort, dit-il, c’était pour lui l’aboutissement malheureux d’une géhenne qui consistait à reculer, reculer sans trêve depuis presque cent lieues.
    – Tu me parleras des Goddons après, Thierry. As-tu pu prévenir le roi de ce que nous savions ?
    – Non, messire. Quand je suis arrivé, il séjournait à Vincennes. Rien à faire pour le voir et l’approcher. Un sergent m’ayant appris qu’il chasserait le lendemain dans la forêt à l’entour, j’y suis allé ; je l’ai trouvé. Il était entouré d’une dizaine d’hommes. Je lui ai crié que j’avais des révélations à lui faire. Il m’a dit de les confier à l’un de ses barons. «  Sire  », ai-je insisté, «  j’aimerais vous voir seul un moment pour vous entretenir d’une affaire importante ! » Il a été pris de colère, m’a traité d’impertinent, et se tournant vers ses compagnons, il leur a dit : «  Ce maraud à l’armure noire va nous contraindre à requêter notre cerf… Boutez-le hors de ces taillis ! » Ils ont galopé vers moi, me menaçant de leurs épieux ; je suis parti aussi vélocement que possible, me disant que j’avais perdu mon temps… et que ça vous plaise ou non, je suis revenu à Gratot !
    – Tu as bien fait. Même si tu l’avais prévenu qu’Édouard allait débarquer à la Hogue-Saint-Vaast, Philippe ne t’aurait pas cru. Il ne croit que Blainville.
    – Quand je suis revenu à Gratot, votre père savait, par Raymond, que s’ils venaient jusque-là, les Goddons ne toucheraient pas à son château…
    – Et tu as attendu qu’ils débarquent ?
    – Que faire d’autre ? Quand on a su qu’ils étaient à Valognes, j’ai demandé à votre père ce que je devais faire. Il m’a dit que puisque j’allais entrer dans la famille, ma place était parmi les Normands. Marcaillou, Raymond et les autres sont demeurés à Gratot afin d’en assurer la défense… Je contreste (322) aux Goddons depuis Saint-Lô… J’ai dû reculer devant ces petites compagnies qu’Édouard répand en tous sens pour occire, brûler, semer la peur, mais au pont de Poissy, c’est l’avant-garde de l’ost tout entier que nous avons dû affronter, les gars de Normandie et moi… Je crois qu’avec dix mille hommes de plus, Édouard aurait conquis Paris… Désormais, il bat tout de même en retraite !
    – Une retraite en quelque sorte victorieuse… Viens-tu avec moi ?
    – Certes, mais avec quoi ? Je n’ai plus que mon armure et mon épée.
    – Alençon et le roi ne sauraient tarder. Ils ont des chevaux de réserve ; j’en demanderai un pour toi au comte. Il me l’accordera, seulement tu devras, toi aussi, veiller sur sa personne… Attendons-les ici avec patience !

IV
    Philippe VI était plongé jusqu’au colletin dans une de ses fureurs coutumières. Il venait de s’arrêter en plein champ, à proximité de Noailles, pour uriner, invitant ses maréchaux et capitaines à l’imiter, car on allait cheminer longtemps. Comme il revenait, soulagé, vers ses gens, un coureur était venu lui rendre compte de ce qui se passait à l’avant : dans une poussée irrésistible vers la Flandre, les Anglais gâtaient et ardraient (323) le plat pays du Beauvaisis.
    – Ils s’en prennent, sire, aux abbayes et moutiers… tout ce qui porte une croix ! À Poissy, Édouard avait épargné le couvent des Dominicaines parce que, sans doute, son grand-père Philippe le Bel l’avait fondé… Mais ailleurs !… Il a couché à l’abbaye de Saint-Lucien, près de Beauvais, et l’a mise

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