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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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lance d’Ogier archonna (43) et se brisa dans son premier tiers tandis que celle de son adversaire se cassait dès sa rencontre avec le bouclier quadrillé de corne.
    Déjà, Ogier atteignait l’aire de départ du félon, jetait son tronçon aux pieds de Leignes, remerciait son destrier d’une tape sur l’encolure et revenait vers ses compagnons, non sans saluer les spectateurs des échafauds, les dames, et enfin les bourgeois et manants, provoquant ainsi des applaudissements et des cris :
    – Noël ! Noël !
    – Gloire au chevalier au Poing Vermeil !
    Cette voix, c’était celle d’Hérodiade, perdue quelque part dans la cohue des vilains, lesquels aussitôt reprirent :
    – Gloire au chevalier au Poing Vermeil !
    Raymond et les deux bateleurs couraient à sa rencontre ; Marcaillou flatta la joue de Marchegai puis, levant sa tête ronde :
    – Ah ! messire… Ça va si vélocement, ces choses, qu’on ne peut rien voir, surtout d’où nous étions placés… Mais ce que je peux vous dire…
    –… c’est que sa lance a craqué dans son poing !
    – Un beau coup, messire, dit Thierry, à pied, tenant Veillantif par la bride, et impatient de courir.
    Montant un cheval gris, sans housse ni harnais décorés, un maréchal de lice s’avança :
    – Est-ce un ho (44) , messire, ou vous faut-il une autre lance ? demanda-t-il, le visage triste comme s’il savait déjà la réponse.
    – Pardi ! fit Raymond. Messire… Ar… Fenouillet va recommencer.
    Ogier sourit sous son fer bien qu’à sa griserie d’avoir ébranlé Blainville se fut substituée, presque aussitôt, une crainte que son sergent ne pouvait soupçonner : « Deux courses encore. Et il n’y a pas que lui : le Bertrand et les autres m’attendent ! » Que pensait la reine ? Et Blandine ? Avait-elle frémi ? Avait-elle crié comme ses voisines aux craquements des lances ?… Si l’emprise de la pucelle n’était d’aucun soutien pour son bras senestre qui, pourtant, avait supporté et supporterait la percussion des rochets adverses, ce qui le fortifiait corps et âme, c’était l’exaltation que lui procurait sa présence, même s’il ne pouvait la voir.
    « Elle sera mienne un jour. »
    Ce fut une certitude si formelle qu’il en gémit, le cœur soudain aggravé (45) tandis qu’au loin, Blainville prenait son temps.
    « C’est de bonne guerre… Il pense à se revancher, mais je suis solide !… Sa paume le brûle encore, j’en jurerais… Le griffon de sa targe en a pris un bon coup ! On dirait qu’il va choir sur l’herbe. Ce grand ruin (46) doit écumer de fureur ! »
    Ogier se pencha : quelqu’un s’approchait, qu’il vit mal tout d’abord dans ses orbites de fer. Il reconnut la voix d’Herbert Berland :
    – Son cheval est puissant… Le coup doit être rude !
    Et le seigneur poitevin disparut, claudiquant, heureux d’une saillie à laquelle son rire ajoutait une épice désagréable.
    – Merdaille ! Aussi vrai que je m’appelle Champartel, on dirait qu’il attend… et même qu’il souhaite votre défaite. Et pourtant vous portez le gage de sa fille !
    – Ou cet homme est un sot, ou bien il vous déteste, conclut Denis, placidement.
    – Prenez, messire, dit Raymond. Cette lance est aussi bonne que la première.
    D’autant plus ébranlé par la remarque de Thierry qu’elle éclairait durement sa pensée, sa déception et son trouble, Ogier empoigna la lance offerte, la soupesa et fut irrité du silence des chevaliers et écuyers groupés si près de son cheval que Denis, aimable mais efficace, entreprit de les repousser :
    – Allons, gentils sires, laissez-le s’apprêter ! Vous en exigeriez autant à sa place.
    Si certains de ces guerriers s’étaient moqués de lui lors des défis à Saint-Léger, ils ne le jugeaient plus comme un niais présomptueux. Connaissant l’âpreté de Blainville – pour en avoir éprouvé les effets –, sans doute confrontaient-ils le heurt auquel ils venaient d’assister avec certains des Pâques précédentes où le Normand avait obtenu l’avantage. Ils sentaient que la réputation de l’homme au griffon se trouvait compromise et qu’il ne tomberait pas lui, Fenouillet, comme… Herbert Berland !
    – Prêt ? demanda de loin un maréchal de lice.
    Ogier fut tenté de provoquer un faux départ. Il y renonça de crainte d’exaspérer l’impatience des assistants, lesquels eussent confondu subterfuge et couardise.
    « Cette

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