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La Fille Du Templier

La Fille Du Templier

Titel: La Fille Du Templier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Thibaux
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de Provence. Les mauvaises langues disaient que la
comtesse de Dye le protégeait et avait recours à lui pour certaines besognes en
dehors du fief.
    C’était ce qui se racontait aux veillées, et Aubeline et
Bérarde qui ne l’avaient jamais rencontré malgré la proximité de leur bastide
fortifiée se rappelaient la description qu’en faisaient les conteurs : Robert,
roux de cheveux, chevalier à la longue lance de frêne, chevalier à l’armure
noire de fer martelé arborant l’emblème du loup rouge montait un destrier de
bataille aussi noir que la nuit. Son père Richard, premier croisé ayant écouté
le pape Urbain à Clermont, avait participé à la prise de Jérusalem avec Guigo
et Geoffroy de Signes. Ayant défié Dieu dans le Temple, il avait été maudit à
jamais. Cette terrible malédiction pesait aujourd’hui sur Robert, le dernier
fils que Richard, à l’âge de soixante-dix ans, avait eu avec une Samaritaine.
    Stéphanie se fichait de ce brigand. S’il n’avait tenu qu’à
elle, elle aurait pris la tête d’une compagnie d’archers et des deux guerrières
pour mettre fin aux aventures de ce drôle qui bafouait les règles de la
chevalerie.
    Mais Bertrand de Signes interdisait d’en finir avec Robert
le Roux. Par superstition et par peur de froisser la comtesse de Dye. Pour l’heure,
il n’y avait aucun danger de le rencontrer de ce côté du chemin. Le chevalier
noir ne venait jamais dans le vallon de Massebœuf, peuplé d’une poignée de
pouilleux.
    Le soleil montait au zénith, éclairant les pentes couvertes
de troncs abattus que quelques charbonniers s’évertuaient à déplacer. Çà et là
fumaient des monticules dans lesquels du bois se consumait en charbon. Ces
fumerolles dessinaient un langage incompréhensible, même aux yeux de la muette Bérarde
qui avait détaché sa hache et lançait des regards meurtriers alentour. La
cabane de Germain apparut. Dooudina la désigna d’un doigt tremblant.
    — C’est notre maison.
    Elle avait dit « maison », c’était tout au plus
une masure faite de planches et de branchages au toit recouvert de glaise
séchée et d’écorces.
    Aubeline et Stéphanie se sentirent perturbées à la vue de
cette verrue que la moindre tempête pouvait balayer. Germain ne construisait
pas dans le solide. Comme la plupart des hommes de son temps, il ne croyait pas
en la solidité d’un avenir dans ce monde. Aubeline mesurait, maintenant qu’elle
appartenait à l’assemblée des dames, combien la réalité des petites gens était
éloignée de celle des habitants de la cour d’amour. Jusqu’à ce jour, dans la
précarité de son fief ruiné, elle n’en avait pas pris conscience. Elle était
coupable de cette misère, au même titre que Bertrane, Stéphanie, Adalarie et
les autres nobles. Elle jura tout bas d’y remédier. Dès le lendemain, elle
prendrait des dispositions concernant ses paysans et exigerait par lettre que
le seigneur Bertrand de Château-Vieux débloque les fonds nécessaires afin de
donner un toit en dur à tous ceux qui vivaient sur son domaine. Elle n’en
parlerait pas à Bertrane. Elle dépendait d’abord de Bertrand à qui son père
Othon avait renouvelé son allégeance avant de rejoindre l’ordre du Temple.
    Dooudina refusa d’aller plus loin. Elle sauta à bas du
cheval. Stéphanie ne lui en tint pas rigueur. La cabane se dressait entre deux
gros rochers qui la protégeaient du vent d’est et du mistral. Stéphanie
descendit de cheval et fit signe à Aubeline et Bérarde de protéger ses flancs. Les
deux guerrières mirent pied à terre et se déployèrent armes à la main. Stéphanie
n’affichait aucune peur. Elle marcha d’un pas ferme vers l’habitation devant
laquelle un porcelet retournait des ordures du groin. À dix coudées de l’entrée,
elle se mit en garde et vit sur sa droite la pointe de l’épée d’Aubeline et sur
sa gauche le tranchant arrondi de la hache de Bérarde. Elle pinça du nez. Des
années d’excréments incrustaient la terre alentour et l’odeur soulevée par la
chaleur et la brise collait aux narines, s’insinuait dans sa gorge. Luttant
contre la bile, elle se rapprocha encore. Quelqu’un bougea à l’intérieur de la
cabane.
    — Sors de là !
    Et il sortit. Animal immonde couvert de poux et de crasse. Le
Germain empestait le vin et l’urine. Tous les sens de Stéphanie se révoltèrent
quand elle le vit et le sentit. Aubeline et Bérarde, plus rustiques,

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