La Fin de Fausta
ferai-je, par le Dieu vivant !
Il avait mis une force extraordinaire dans ces dernières paroles.
– Bravo ! Sire… applaudit Pardaillan. Mettez autant d’énergie à vous défendre que vous venez d’en mettre à signifier votre intention, et je vous réponds que tout ira bien.
– Je n’ai pas quinze ans. Il me semble que la vie doit être belle. Je veux en goûter, je veux vivre, monsieur, assura Louis XIII avec la même force.
Et reprenant :
– Dites-moi donc, chevalier, en quoi je suis menacé. Et dites-moi aussi ce que je dois faire, selon vous, pour conjurer le danger qui me menace, sans contrarier votre action personnelle. Car vous n’êtes pas homme à être venu ici sans savoir ce que vous voulez faire. Et comme je suis sûr que vous ne demeurerez pas inactif de votre côté, j’ai résolu, et ceci depuis longtemps, de m’en remettre entièrement à vous. Je ne saurais mieux faire, au reste, puisque l’ordre de mon père a été de vous obéir en tout, comme je lui obéirais à lui-même, s’il était encore de ce monde.
– S’il en est ainsi, rassura Pardaillan, nous avons partie gagnée d’avance, Sire.
– Et moi, j’en suis tout à fait sûr, affirma le roi avec un accent de conviction que rien ne paraissait devoir ébranler.
Et il répondit avec une force qui prouvait sa confiance absolue :
– Si nombreux et si redoutables qu’ils soient, je suis sûr de triompher de mes ennemis, tant que vous serez là pour me guider et me défendre. Parlez, maintenant, monsieur, je vous écoute.
Et Pardaillan parla en effet.
Nous pensons qu’il est à peine besoin de dire qu’il n’était jamais entré dans sa pensée de dénoncer Fausta. Le lecteur – nous voulons l’espérer – connaît suffisamment notre héros pour savoir qu’il n’était pas homme à s’abaisser à ce rôle abject de délateur. Ce qu’il voulait, c’était mettre le roi sur ses gardes d’abord. Ensuite, l’amener à prendre certaines mesures qui lui paraissaient indispensables à sa sécurité.
En conséquence, en quelques phrases brèves, il raconta purement et simplement une partie de la vérité. Il le fit sans entrer dans des détails qui l’eussent gêné, et sans nommer personne. Le roi s’avisa bien de poser quelques questions et de demander précisément ce que Pardaillan avait résolu de ne pas lui donner : des noms. Mais, aux réponses qui lui furent faites, il comprit qu’il ne tirerait de son interlocuteur rien de plus que ce qu’il avait décidé de dire. Et il eut le bon esprit de ne pas insister.
Pour ce qui est des mesures que Pardaillan conseilla et que le roi, tenant la promesse qu’il avait faite de s’en remettre entièrement à lui, adopta sans hésiter, nous n’en parlerons pas : on les verra se dérouler avec les événements.
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Chapitre 9 OU VALVERT TIENT LA PROMESSE QU’IL A FAITE A ROSPIGNAC (suite)
C ette espèce de conseil, qui se tenait, devant toute la cour attentive, fut assez bref. En moins de dix minutes, Pardaillan dit tout ce qu’il avait à dire. Il attendait maintenant que le roi lui donnât congé. Mais le roi, décidément, se plaisait en sa société. Non seulement il ne lui donna pas ce congé, mais encore, après avoir fait signe à ses intimes qu’ils pouvaient approcher, il continua de s’entretenir familièrement avec lui.
– Holà ! fit-il tout à coup, que se passe-t-il donc là-bas ?
Et il désignait cette porte auprès de laquelle nous avons vu qu’Odet de Valvert se tenait et près de laquelle un brouhaha se produisait en ce moment même.
Voici ce qui se passait :
Nous avons dit en son temps que Rospignac s’était éclipsé pour aller exécuter un ordre que lui avait glissé Concini. Nous rappelons que ceci se passait avant que Pardaillan se fût présenté lui-même au roi. La faveur toute particulière que le roi avait bien voulu accorder au chevalier avait donné fort à réfléchir au favori. Elle lui avait donné si bien à réfléchir qu’il était parti à son tour, en faisant signe à Louvignac, Roquetaille, Eynaus et Longval – lesquels surveillaient Pardaillan – de le suivre.
Disons que, si discrètement que se fût opérée cette sortie, si attentif qu’il parût à son entretien avec le roi, elle n’avait pourtant pas échappé à l’œil sans cesse en éveil du chevalier.
Suivi de ses quatre lieutenants, Concini se mit à la recherche de Rospignac. Il le trouva sur le grand escalier, comme il
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