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La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christophe Verneuil
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à
    l'objectif. Il était assis sur une chaise tout près d'un bureau, une valise posée à terre à côté de lui. Il se tenait très raide, les épaules carrées, les genoux serrés. Ce cliché étonna Dom parce que l'expression du visage du prêtre n'était pas loin de celle d'un cadavre.
    L'homme était cependant vivant, il se tenait trop droit, mais son regard semblait vide, glacé.
    La seconde photographie lui fit beaucoup plus d'effet. Elle montrait une jeune femme qui, d'une certaine façon, ne lui était pas étrangère. Bien que Dom ne p˚t se rappeler o˘ il l'avait rencontrée, il était persuadé qu'ils se connaissaient. Elle avait près de trente ans. Des yeux bleus, des cheveux blond argenté. Un visage agréablement proportionné. Elle aurait été
    exceptionnellement belle si elle n'avait eu la même expression que le prêtre: le regard vide, comme mort.
    On ne la voyait que jusqu'à la taille. Elle était couchée sur un lit et les draps remontaient pudiquement jusqu'à son cou. Des courroies la maintenaient. Un bras était partiellement dénudé et une aiguille enfoncée dans la veine du poignet.
    Cette photographie lui rappela instantanément le cauchemar o˘ des hommes qu'il ne pouvait voir lui criaient après et lui enfonçaient la tête dans une cuvette de lavabo. A plusieurs reprises, le rêve n'avait pas commencé par l'épisode du lavabo mais dans un lit, dans une chambre étrange, o˘ sa vision était troublée par une brume couleur safran. En observant la jeune femme, Dom fut convaincu qu'il existait quelque part une photo de lui prise dans des circonstances semblables: attaché sur un lit, une aiguille dans le bras, les yeux morts.
    quand, le vendredi, il eut montré les deux clichés à son ami Parker Faine, le peintre arriva à la même conclusion que lui: Śi je me trompe, que j'aille rôtir en enfer et que je serve à faire des sandwiches au diable, mais je jurerais que c'est là la photo d'une femme qu'on a droguée et à qui on a fait subir le même lavage de cerveau qu'à toi. Seigneur, cela devient de plus en plus dingue de jour en jour ! Normalement, tu devrais tout raconter aux flics-mais c'est impossible, parce qu'on ne sait pas avec qui ils sont. Malgré toi, tu t'es peut-être fourré dans les affaires d'une agence gouvernementale. En tout cas, tu n'es pas le seul à être dans de beaux draps. Le prêtre et la jeune femme y sont aussi. Le coup est encore plus gros que je ne l'imagi-nais. ª
    A présent, assis dans sa chambre d'hôtel, Dom tenait une photo dans chaque main et contemplait alternati-vement le prêtre et la jeune femme. ´ qui êtes-vous ?
    demanda-t-il tout haut. Comment vous appelez-vous ?
    qu'est-ce qui nous est arrivé ? ª
    Un peu plus tard, Dom s'attacha au lit avec une de ces cordes dont les montagnards se servent pour escalader des parois à pic. Il entoura d'abord son poignet de gaze qu'il fixa à l'aide d'adhésif, puis il noua la corde qui, avec ses six ou sept millimètres de diamètre, devait résister à une traction de plus de mille deux cents kilos.
    Une corde aussi robuste n'avait rien d'inutile. La nuit du 28 décembre, il avait sectionné la première corde en la m‚chonnant et en la tranchant brin après brin.
    La corde de montagne n'avait donc rien d'exagéré.
    Cette nuit-là, à Portland, il s'éveilla à trois reprises, luttant furieusement pour se débarrasser du lien qui le retenait prisonnier, transpirant, haletant, le coeur battant la chamade et répétant inlassablement: ´ La lune ! La lune ! La lune ! ª
    Las Vegas, Nevada
    Le lendemain de NoÎl, Jorja Monatella conduisit Marcie chez le Dr Louis Besancourt. L'examen tourna à l'épreuve de force, ce qui réussit à la fois à frustrer le praticien, à effrayer Jorja et à les gêner tous les deux. Dès l'instant o˘ Jorja la fit entrer dans la salle d'attente, la petite fille se mit à pousser des hurlements stridents et à sangloter. Ńon, pas de docteurs, ils vont me faire du mal ! ª
    Sa terreur connut son apogée quand le médecin voulut lui examiner les yeux à l'aide d'un ophtalmoscope.
    Elle urina sous elle comme elle l'avait fait la veille.
    Cette miction soudaine fut accompagnée d'une brusque modification de comportement. Marcie se renferma tout à coup sur elle-même, ainsi qu'elle l'avait fait brièvement la veille. Elle était extraordinairement p‚le et tremblait sans pouvoir s'arrêter. Elle affichait cette sorte de curieux détachement qui, pour Jorja, évoquait

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