La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours
il se lança dans un véritable numéro. ´ Vous n'avez pas entendu parler des progrès de la technologie ? Ceux qui vous espionnent n'ont pas eu besoin de venir jouer les plombiers. Les micro-fusils d'aujourd'hui sont bien supérieurs à tous ceux que vous avez pu manipuler. Et les mouchards téléphoniques, ça ne vous dit rien ? ª Il passa devant Ernie sans même s'excuser et désigna le poste posé sur une petite table, à côté du canapé. Íl existe un petit appareil, un oscillateur électrique, qui coupe la sonnerie quand on vous appelle, mais qui ouvre le micro du combiné. Vous ne savez même pas qu'on vous a téléphoné, pourtant vous êtes surveillés. Ici, à la réception, dans n'importe quelle chambre o˘ il y a un poste. ª Il décrocha le combiné et le lui tendit d'un air thé‚tral. ´ Voici votre espion, c'est vous-même qui l'avez fait installer. ª Il le reposa violemment. ´ Vous pouvez parier qu'ils vous écoutent attentivement depuis quelque temps. Toute votre conversation pendant le dîner, par exemple. Maintenant, si vous voulez signer votre arrêt de mort, allez-y, continuez à déballer toutes vos découvertes. ª Seul un silence de mort lui répondit. Il avait fait son effet et n'en était pas mécon-tent. ´ Bien. Est-ce qu'il y a une pièce dépourvue de fenêtres et assez grande pour abriter un conseil de guerre ? Peu importe s'il y a le téléphone, on le débran-chera. ª
Une femme d'‚ge moyen - très certainement la femme d'Ernie, Jack se souvenait vaguement de l'avoir vue à la réception l'été de l'année dernière-dit au bout d'un instant de réflexion: Íl y a bien le restaurant... ª
-Votre restaurant n'a pas de fenêtres ? demanda Jack.
- Les vitres ont été... brisées, dit Ernie. On a mis du contre-plaqué.
-Parfait. Allons là-bas discuter tranquillement de notre stratégie. Ensuite, nous reviendrons manger le dessert. Je vous ai entendus parler d'une tarte à la citrouille qui m'a mis l'eau à la bouche. ª
Jack descendit tranquillement l'escalier, certain que tous le suivraient.
Ernie eut horreur pendant cinq minutes de cet individu prétentieux arrivé sans crier gare. Puis, peu à
peu, le dégo˚t se changea en respect.
En premier lieu, Ernie appréciait la façon dont il était apparu au Tranquility Motel. Il n'était pas venu les mains vides, comme les autres. Il avait apporté une mitraillette.
Pourtant, quand il vit celui qui se faisait appeler Thornton Wainwright passer à l'épaule la bretelle de son Uzi et marcher d'un pas décidé vers la porte d'entrée de la réception Ernie se souvint des vives critiques dont il venait de faire l'objet. Et sa colère fut si grande qu'il sortit de la réception et se dirigea vers le restaurant en oubliant de revêtir son manteau. Il pressa le pas et, une fois à hauteur de l'étranger, il jeta entre ses dents: Á quoi ça vous sert de jouer les caÔds comme vous faites ? Vous auriez pu nous mettre au courant sans vous montrer aussi méprisant.
-Oui, mais cela aurait pris plus de temps. ª
Ernie se préparait à rétorquer quand il se rendit compte qu'il était dehors, la nuit, dans l'obscurité, donc vulnérable. A mi-chemin du motel et du restaurant. Ses poumons allaient s'effondrer sur eux-mêmes, le moindre souffle d'air lui était interdit. Il émit un son pitoyable.
A la grande surprise d'Ernie, l'étranger le prit immédiatement par le bras pour le soutenir sans afficher l'air supérieur qui ne l'avait pas quitté depuis son arrivée. Állons, Ernie, nous y sommes presque. Appuyez-vous sur moi, nous y sommes presque. ª
Furieux contre lui-même de permettre à cet inconnu d'être le témoin de sa déchéance, humilié, Ernie repoussa la main secourable.
Écoutez, Ernie, dit le nouveau venu, en vous épiant, j'ai su de quoi vous souffriez. Je ne trouve pas cela risible. D'accord ? Si votre peur du noir a quelque rapport avec la situation o˘ nous nous trouvons tous, ce n'est pas votre faute. Ce sont ces salauds qui sont responsables. Nous avons besoin les uns des autres pour nous en tirer. Appuyez-vous sur moi. Je vais vous aider à marcher jusqu'au restaurant et là, nous allu-merons la lumière. ª
quand l'étranger commença à parler, Ernie était incapable de respirer, mais son problème était exactement l'inverse quand l'homme eut fini son petit discours: il respirait maintenant à pleins poumons.
Comme attiré par une force magnétique, il s'immobilisa et se tourna vers le sud-est, les
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