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La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christophe Verneuil
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yeux rivés sur les solitudes immenses et terrifiantes des montagnes. Et soudain, il sut que ce n'était pas l'obscurité proprement dite qu'il redoutait, mais quelque chose qui s'y était tapi en ce soir maudit du 6 juillet. Il regardait en direction de la parcelle de terrain située non loin de la route, cet endroit mystérieux o˘ ils s'étaient rendus la veille pour communier avec le paysage dans l'espoir d'y découvrir un quelconque indice.
    Faye était arrivée à sa hauteur et Ernie ne l'avait pas repoussée quand elle lui avait posé la main sur l'épaule. Mais voici que l'étranger revenait le prendre par le bras et il avait encore suffisamment de colère en lui pour rejeter cette aide-là.
    ´ D'accord, fit l'inconnu, vous êtes un vieux barou-deur et votre fierté va devoir en prendre un sacré coup si vous voulez guérir. Si vous voulez jouer les têtes de mule, allez-y, faites-moi la gueule. Mais c'est seulement votre rage qui vous a permis d'avancer jusqu'ici, pas votre passé de Marine. Rien que votre fureur.
    Alors, continuez à me détester et vous arriverez peut-
    être jusqu'au restaurant. ª
    Ernie sut que ce type dont il ne savait rien faisait tout pour l'inciter à marcher jusqu'au restaurant et que son comportement n'avait rien de cruel. Détestez-moi assez, lui disait-il, et vous aurez moins peur du noir. Ne pensez qu'à moi, Ernie, et mettez un pied devant l'autre.
    Ne songeant plus qu'à sa colère, Ernie progressa lentement et poussa un soupir de soulagement quand il entra dans la salle à la suite de l'inconnu. Les lumières s'allumèrent.
    Ón gèle ici ª, dit Faye, qui alla régler le thermostat.

    Assis sur une chaise au milieu de la pièce, le dos tourné à la porte, Ernie récupéra tandis que les autres arrivaient. Il observa le nouveau venu aller d'une fenêtre à l'autre, vérifiant la solidité des plaques de bois apposées en remplacement des vitres brisées. Ce fut alors qu'il se rendit compte, à sa grande surprise, qu'il ne haÔssait plus du tout l'inconnu.
    Ce dernier examina le téléphone public installé près de la porte. Il était impossible de le débrancher. Il prit donc le combiné, en arracha le fil et le reposa sur son berceau.
    Íl y a un poste privé derrière le comptoir ª, dit Ned.
    L'autre lui dit de le débrancher et Ned s'exécuta.
    Puis il commanda à Brendan et à Ginger de réunir trois tables et demanda des chaises pour tout le monde.
    Le nouveau venu semblait très préoccupé par la porte d'entrée du petit restaurant. En effet, sa vitre, d'un verre bien plus épais, ne s'était pas brisée au cours de l'étrange incident du samedi soir. Elle n'était pas recouverte de contre-plaqué et présentait donc un point faible pouvant être mis à profit par quiconque voudrait les espionner avec un micro directionnel. Il voulut savoir s'il restait du bois; Dom lui répondit que oui, et il envoya Ned et Dom en chercher une plaque dans l'appentis. Ils revinrent peu de temps après et l'homme appliqua le contre-plaqué devant la porte avant de le coincer avec une table. Će n'est pas formidable, dit-il, mais cela devrait suffire pour un micro-fusil. ª Il alla ensuite jeter un coup d'oeil dans l'arrière-salle et, sur le chemin, demanda à Sandy de brancher le juke-box et de sélectionner plusieurs disques. ´ Le bruit de fond est très gênant quand on veut épier quelqu'un. ª Avant même qu'il e˚t fini sa phrase, Sandy enfonçait des touches sur le clavier du juke-box, désireuse de lui obéir.
    Tout à coup, Ernie comprit pourquoi cet inconnu le fascinait. La rapidité de ses réflexions, la précision de ses mouvements, sa capacité à commander, tout indiquait qu'il était-ou avait été-un militaire de carrière, un officier, de qualité de surcroît. Sa voix pouvait être très dure quand il le fallait, devenir enjô-leuse quand c'était nécessaire.

    Mais bien s˚r, se dit Ernie, ce type me fascine parce qu'il me fait penser à moi !
    C'était aussi pour cela que l'étranger avait pu s'adresser aussi durement à Ernie dans l'appartement.
    Il savait pertinemment o˘ darder ses traits parce que lui et Ernie étaient, d'une certaine façon, de la même trempe et qu'il connaissait ses points faibles.
    Ernie se prit à rire. Moi aussi, quand je m'y mets, je peux me montrer vraiment salaud.
    L'homme revint de l'arrière-salle et eut un sourire de satisfaction lorsqu'il vit tout le monde attablé. Il s'approcha d'Ernie et dit: ´Vous ne m'en voulez plus

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