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La fuite du temps

La fuite du temps

Titel: La fuite du temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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les
circonstances, il fallait reconnaître que les épouses de Gilles et de Richard
s'étaient montrées d'une discrétion rare en évitant d'aborder ce sujet scabreux
en présence de leurs beaux-parents. Il n'y avait eu que Denise, l'aînée, qui
avait cherché maladroitement à consoler sa
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    mère le dimanche
suivant, au retour de sa famille de NotreDame-
    de-la-Merci.
     
    — C'est des
choses qui arrivent, m'man, avait-elle murmuré à sa mère alors que Carole
s'était cantonnée dans sa chambre.
     
    — Arrête-moi ça,
toi, avait répliqué sa mère avec humeur. Ça arrive pas chez les filles qui
savent se tenir, bonyeu! Veux-tu ben me dire ce qu'on a fait au bon Dieu pour
mériter une épreuve comme ça? — Je le sais ben, m'man, avait repris l'aînée,
mais le mal est fait et...
     
    — Et rien nous
oblige à accepter ça, tu m'entends? Rien! Ça fait que reviens pas là-dessus.
     
    Denise se l'était
tenu pour dit et n'avait plus osé aborder le sujet avec sa mère. Dans un sens,
elle enviait l'aisance de son mari qui était allé rejoindre son beau-père sur
le balcon ce soir-là et s'était entretenu avec lui du travail qui avait été effectué
sur son lot durant la fin de semaine.
     
    À aucun moment,
il n'avait mentionné sa participation à l'expédition du vendredi soir ni le
fait que l'Oldsmobile d'André Cyr n'était plus dans la cour.
     
    Il était tout de
même à noter que la soeur aînée n'avait pas cherché à parler à sa cadette. Ce
qui arrivait à cette dernière heurtait trop fortement ses valeurs pour qu'elle
l'accepte. Elle craignait qu'une trop grande compréhension de sa part soit
interprétée comme une approbation.
     
    Bref, Carole
était aussi isolée après son aveu qu'elle l'avait été avant. Pire, maintenant,
les membres de sa famille l'évitaient comme une pestiférée. Depuis le fameux
vendredi soir, aucun de ses frères n'avait proposé de lui venir en aide. Par
exemple, Jean-Louis, toujours aussi près de ses sous, avait même pris la
précaution de la prévenir qu'il n'avait pas les moyens financiers de lui prêter
de l'argent pour qu'elle aille vivre ailleurs.
     
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    Dès le lundi
matin suivant, la jeune fille s'était mise à la recherche d'un emploi. Pour
elle, c'était devenu une question de survie. Dès qu'elle aurait trouvé quelque
chose, elle pourrait plier bagage et fuir le climat empoisonné qui régnait à la
maison.
     
    La chance lui
sourit enfin après une dizaine de jours de démarches stériles et épuisantes.
     
    Au moment où elle
désespérait de se trouver un emploi, elle avait décroché un poste de secrétaire
à la Commission de transport de Montréal. Elle avait commencé à travailler au
bureau de l'organisme de la rue Bleury le jour même.
     
    Ce retour de la
chance avait été un véritable rayon de soleil pour la future mère.
     
    Le soir, la jeune
femme dressa des plans. Elle allait occuper la fin de sa première semaine de
travail à se trouver une chambre à louer hors du quartier qui l'avait vue naître.
     
    Évidemment, elle
aurait préféré un appartement, même minuscule, mais elle avait beau scruter les
petites annonces de La Presse, elle ne dénichait rien que son maigre budget
aurait pu lui permettre de louer.
     
    Le premier jeudi
de septembre, Carole rentra à la maison à l'heure du souper. Son père, sa mère
et son frère Jean-Louis finissaient leur repas. Elle les salua. Seuls sa mère
et son frère lui répondirent.
     
    Chez les Morin,
on soupait toujours un peu plus tôt les deux derniers jours de la semaine parce
que le caissier devait retourner à la banque pour six heures trente ces
soirs-là.
     
    La jeune fille
alla déposer son sac à main et enlever ses souliers à talons hauts dans sa
chambre avant de revenir dans la pièce.
     
    — Il y a du pâté
chinois sur le poêle, lui dit sa mère déjà en train de déposer la vaisselle
souillée sur le comptoir.
     
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    Son père avait
aussi quitté la table et venait d'allumer le téléviseur pour écouter Gaétan
Montreuil en train de lire les nouvelles de la journée à Radio-Canada.
     
    Carole alla se
servir et vint manger à sa place, à côté de Jean-Louis.
     
    — Marthe Paradis
aimerait ça que tu viennes la voir à soir, après l'ouvrage, lui dit son frère
d'une voix neutre.
     
    — Pourquoi? — Je
le sais pas. Elle m'a rien dit.
     
    — Ça me tente
pas. Je suis fatiguée, dit-elle d'une voix lasse.
     
    — Fais ce que tu
veux,

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