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La gigue du pendu

La gigue du pendu

Titel: La gigue du pendu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ann Featherstone
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sur les mers par un méchant oncle quand il avait seulement quatorze ans, puis capturé par des flibustiers, dont il devient un des plus grands chefs, bardé d’honneurs – si pareil état peut exister ! –, mais qui retourne travailler dans sa forge à la basse saison.
    « Cela ne se peut ! s’est écriée Susan.
    — Mais si ! Ferme les yeux, Susan, et fais confiance à ton cœur, qui bat à l’unisson du mien ! »
    Et c’est exactement ce qu’a fait Miss Jacques, déclenchant une vague d’hilarité à travers toute la troupe. Chacun sait en effet qu’elle en pince pour Will, et nous nous divertissons de la voir insister pour répéter plusieurs fois les scènes d’étreintes passionnées. Mais nos rires ont brisé l’élan, et Mr Carrier a saisi cette occasion pour mettre fin aux répétitions. Il avait peu de commentaires à faire (aucun n’a été noté), mais tous étaient judicieux.
    « Mesdames et messieurs les comédiens : voici mes remarques habituelles à ce stade. Lors de notre prochaine répétition, vous serez parfaits en tout point. Passons aux rôles principaux. Mr Lovegrove, articulez davantage, et n’essayez pas d’en faire trop. Miss Jacques, un peu plus de charme et moins de rigidité, s’il vous plaît. Vous campez une héroïne vertueuse, pas une soubrette de comédie. Mr Pettifer, je vous paie pour être comique, pas bucolique. » Et ainsi de suite.
    La troupe a accepté ces commentaires avec le sourire (sauf Miss Jacques, qui s’est mordu la lèvre et a tapé du pied). Nous devions nous retrouver pour travailler avec le ballet de M. Villechamps, a conclu Mr Carrier, puis les principaux comédiens procéderaient à des essayages. « Rendez-vous à deux heures, s’il vous plaît. »
    Il s’est alors tourné vers moi. J’étais patiemment assis avec Brutus et Néron sur le bord de la scène, et j’écoutais la pièce de Trim avec le plus grand intérêt. J’avais suivi les aléas de son humeur à mesure que son œuvre était révisée, récrite, et je pensais la connaître déjà par cœur. Mais en l’écoutant ainsi, in extenso pour la première fois, et surtout en entendant Mr Carrier dire : « Là, Brutus et Néron entrent en scène », et « À ce stade, les chiens de Mr Chapman bondissent et saisissent le méchant à la gorge », l’ensemble a pris vie à mes yeux.
    « Bien, Mr Chapman, a continué le patron, à la fin de la journée, Mr Pocock aura fini de copier votre texte. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, vous verrez avec lui. Je suis sûr que vous et vos magnifiques animaux ferez un triomphe. Bonne journée à vous, monsieur. »
    Il m’a serré la main et a gratifié mes deux compagnons d’une caresse sur la tête avant de s’éloigner en hâte en remettant ses gants et en faisant signe à Mr Lombard. Je me sentais aussi important que tout autre comédien sur scène ! C’est mon texte que rédigeait Mr Pocock. Mes chiens qu’admirait Mr Pettifer, tel un juge à un concours canin. Et Will Lovegrove, mon ami, auquel tout le monde jetait des regards admiratifs, s’est approché pour me taper sur l’épaule en me disant : « Et voilà, Bob ! Comme je te l’avais annoncé. À présent, allons nous chercher quelque chose de décent à manger ! », m’emmenant ensuite vers la salle, flanqués de Brutus et Néron. Quel bonheur, en vérité !
    Je n’avais jamais vu la vaste scène du grand Pavilion pour ainsi dire déshabillée. Comme la plupart des gens, je la connais avec un décor et des acteurs, aussi, en me retrouvant debout dans l’allée centrale, cela m’a paru bien étrange de la découvrir dans un tel désordre, les décors du soir recouverts de tissus, une rue de Londres suspendue à mi-hauteur à une grille, les voix des comédiens remplacées par un chœur de cliquetis, de coups sourds et de cris. Le décor précédent est remonté comme par magie jusqu’au plafond, tandis qu’un autre prenait sa place (montrant un ciel et une mer d’azur, ainsi qu’une plage de sable doré), descendant des hauteurs, pour s’arrêter à quelques centimètres du sol. Sont apparus des cocotiers de plâtre et de planches, des collines couleur sable, et de derrière a surgi Mr Lombard, le chef décorateur, son chapeau vissé sur la tête, aboyant des ordres à droite et à gauche. Une respiration d’asthmatique a annoncé l’arrivée de Mr Parry, le musicien, venu accompagner la répétition avec son violon et un

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