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La Gloire Et Les Périls

La Gloire Et Les Périls

Titel: La Gloire Et Les Périls Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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lequel
était tout chaffourré des larmes qu’elle avait versées. Ma permission accordée,
elle s’en alla dans un juvénile balancement de son demi-vertugadin qui fit
sourire Nicolas, encore que les pleurs étant si contagieux, il avait lui-même
les yeux mouillés.
    Madame de Bazimont revint, coiffée à merveille et pimplochée
à ravir et dès lors que je lui eus dit que Mademoiselle de Foliange cherchait
un gîte, pour attendre que sonnât l’heure de son hyménée, elle prit sur elle,
comme j’y comptais bien, d’offrir tout de gob à la demoiselle une chambre au
château. Elle ajouta – mais cette fois sous réserve de l’approbation de
Madame de Brézolles – que dès la messe du mariage achevée, les deux jeunes
époux pourraient demeurer céans, ce qui permettrait à Nicolas d’assurer plus
commodément ses devoirs d’écuyer.
    Comme un bonheur ne vient jamais seul, ce fut par une claire
après-dînée de février que Nicolas, Monsieur de Clérac et moi allâmes nous
poster à cheval devant la porte de Trasdon qui jouxtait le fort du même nom,
pour attendre que Mademoiselle de Foliange en sortît.
    Nous avions décidé, d’un commun accord, de nous vêtir tous
trois sobrement et de nous passer, pour nous annoncer, d’un des tambours de Sa
Majesté, afin de ne pas donner ombrage à la garde huguenote du Fort de Trasdon,
et en particulier au sourcilleux capitaine Sanceaux, lequel, comme le lecteur
s’en ramentoit peut-être, avait bien failli, dans sa sotte et suspicionneuse
outrecuidance, refuser à Nicolas et à moi-même l’entrant de la ville, quand
nous étions venus dedans les murs de La Rochelle visiter la duchesse de Rohan.
    Il est bien vrai qu’un roulement de tambour a quelque chose
en soi de guerrier et menaçant et qu’arriver sous les yeux des assiégés qui, du
haut de leurs créneaux, nous regardaient approcher, et les saluer, une fois au
pied de leurs murs, d’un large salut de nos chapeaux, était sans aucun doute
une civilité mieux appropriée à une démarche pacifique. Cependant, plusieurs
bonnes minutes s’écoulèrent encore sans que le grand portail aspé de fer
bougeât le moindrement du monde et l’angoisse nous étreignit de l’échec, tant
est qu’il nous rendit muets, et figés dans une immobilité de pierre.
    À la parfin, sans qu’on n’ouît le moindre bruit de clé, tant
bien sans doute la serrure était huilée, les deux grands vantaux du portail se
séparèrent l’un de l’autre avec une lenteur exaspérante, pouce après pouce,
découvrant à la parfin Mademoiselle de Foliange montée en amazone sur une
haquenée blanche. Celle-ci renâcla de prime à s’avancer vers nos chevaux, mais
ceux-ci s’écartant, la haquenée, prise en main fermement par sa cavalière,
franchit à la parfin la porte, laissant derrière elle la ville de la mort
lente.
    C’est alors que je vis, en me retournant, et le portail
étant encore grand ouvert, quatre rangs de soldats rochelais et je m’imaginai
de prime qu’ils nous allaient poursuivre, laquelle impression était tout à
plein absurde car, en fait, ils nous tournaient le dos. Et à un second coup
d’œil que je leur jetai derechef, j’entendis qu’ils s’employaient à repousser
du bout non pointu de leurs piques un petit groupe d’hommes et de femmes
décharnés qui tâchaient de sortir à vive force à notre suite par le lourd
portail, lequel d’autres soldats, pendant ce temps, s’attachaient à reclore.
    Cette échauffourée – ces quelques Rochelais poussant et
les soldats les repoussant – avait quelque chose de dérisoire, tant les
assaillants et les assaillis étaient faibles et amaigris et si les soldats
prirent à la parfin le dessus, ce ne fut, à mon sentiment, que grâce à leurs
piques, que pourtant ils pouvaient à peine tenir à l’horizontale, tant leurs
bras faillaient en force. Mais le plus étonnant, dans cette rébellion de rue,
fut le silence dans lequel elle se déroula. Ni ordres militaires ni injures de
populace ne se faisaient ouïr, tout le temps que dura l’affrontement. Silence
qui me consterna quand le soir, en y repensant, j’en entendis enfin la
raison : ni les soldats ni les rebelles n’avaient assez de voix pour
crier.
    Nicolas et moi, nous nous plaçâmes à dextre et à senestre de
Mademoiselle de Foliange et le capitaine de Clérac en tête, nous ouvrant le
chemin. Il mit de prime au petit trot, mais s’apercevant, en tournant la tête,
que la haquenée

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