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La Gloire Et Les Périls

La Gloire Et Les Périls

Titel: La Gloire Et Les Périls Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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père et La Surie, refaire l’interminable
chemin d’Aytré à Coureille pour visiter Monsieur de Schomberg, lequel nous
trouvâmes dans la commode petite maison que Toiras venait à peine de quitter.
    J’avais choisi Monsieur de Schomberg comme l’objet de ma
première négociation pour ce que je savais qu’il gardait, et garderait jusqu’à
la fin des temps, en sa remembrance, le service que je lui avais rendu au
moment où il avait, sur un méchant rapport, encouru l’ire et la disgrâce de
Louis. Il n’ignorait pas qu’en intervenant auprès de Sa Majesté pour qu’Elle
redressât cette injustice, je courais moi-même le risque d’être « tronçonné »,
tant Louis était jaloux de son pouvoir et ne souffrait pas d’être contredit,
une fois qu’il avait tranché.
    Belle lectrice, j’aimerais que votre cœur s’intéresse à
Schomberg, ne serait-ce que pour la raison qu’on le tenait, urbi et orbi, pour
le parangon de la fidélité conjugale : vertu que tous admirent et que bien
peu pratiquent, en particulier à la Cour.
    Il y avait vingt-neuf ans que Monsieur de Schomberg avait
marié la belle Françoise d’Épiant et il l’aimait comme au premier jour. Il
était meshui âgé de cinquante-deux ans, mais on eût été fort malvenu de le
traiter de barbon. Il était grand, l’épaule large, l’œil bleu, la face carrée
et pas l’ombre d’une bedondaine. Assurément, il n’avait pas les traits aussi
délicatement ciselés que My Lord Duke of Buckingham. Mais il était plus mâle et
il ne faillait pas à la Cour de pimpésouées qui eussent aimé se frotter à sa
rude écorce. Mais Schomberg ne voyait ni ne sentait ces pattes de velours et
ces regards en dessous. Il aimait sa femme et craignait Dieu.
    Il était, en effet, dévot, mais dévot non politique, sans le
moindre penchant pour ces ultramontains qui tiennent que le pape, outre ses
pouvoirs spirituels, est aussi le prince des rois et des empereurs et détient
le droit de commander leurs alliances : opinion à laquelle Louis opposait
une hostilité telle et si vive qu’il accusa un jour ses évêques de n’être pas
« de véritables Français ».
    Français par le sol sinon par le sang, Schomberg était issu
de bonne noblesse saxonne. Quand son père, colonel des reîtres allemands,
devint français par la grâce de Charles IX, il n’eut pas le moindre mal à
changer son von en de. Son fils, à qui ce « de »
paraissait naturel, puisqu’il l’avait toujours porté, se sentait lui tout à
plein français, tout en ayant hérité de son père de solides vertus allemandes,
dont la méticulosité et la fidélité n’étaient pas les moindres. À sa mort, il
hérita aussi de ses charges : le gouvernement de la Marche et le
maréchalat de camp des troupes allemandes en France. On disait à la Cour que le
roi n’aurait jamais pensé à prendre comme valet de chambre un autre homme qu’un
Berlinghen, ni à se passer d’un Schomberg dans ses armées. Dès que Louis l’eut
détronçonné, Schomberg, tout au bonheur de son retour en grâce, ne garda jamais
la moindre mauvaise dent à son souverain. Bien le rebours. Le roi lui avait
rendu justice : il ne l’en aima que davantage et ne l’en servit que mieux.
Et Louis, reconnaissant au cours des ans sa vaillance, son expérience, sa
rigueur et sa fidélité, le nomma en 1625 maréchal de France. Ce fut un grand
jour pour Schomberg quand le roi, en accueillant le nouveau maréchal au Louvre,
observa strictement le protocole et l’appela « mon cousin ».
    Dès que nous nous fîmes connaître par son exempt, Schomberg,
après les brassées que l’on devine, nous accueillit à sa table, nous invitant
tous, y compris Nicolas, étant lié avec son frère aîné, lequel était, si l’on
s’en ramentoit, capitaine aux mousquetaires du roi. C’était la première fois
que Schomberg voyait mon père, lequel fit naître en lui un vif émerveillement
et point seulement pour la raison que le marquis de Siorac avait vingt ans de
plus que lui, mais parce que, ne mettant jamais le pied à la Cour, il était
devenu une sorte de légende, ses missions périlleuses sous Henri III et Henri IV
étant connues de tous, et plus encore cette fameuse botte de Jarnac qu’à la
mort de Giacomi, il avait été le seul à posséder en France jusqu’au moment où
il avait pris soin de m’en instruire à mon tour, craignant que les bretteurs de
la Cour ne voulussent ajouter à leur gloire en

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