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La Gloire Et Les Périls

La Gloire Et Les Périls

Titel: La Gloire Et Les Périls Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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sot. Et quand on ramentevait à nos bons caquets de Cour
les circonstances où le maréchal avait montré de la finesse, ils
répliquaient : « Nenni ! Nenni ! Fin, il ne l’est
pas ! Nous dirons qu’il est finaud ! » Ce qui était une autre
façon de le rabaisser.
    — Ah, Monsieur le Maréchal, dis-je avec un sourire,
tout n’est pas compromis par le compromis ! Puis-je vous donner un
exemple ? Imaginons, si vous le permettez, que le roi établisse une
parfaite égalité entre le duc et vous et déclare : chacun commandera
l’armée de Coureille à tour de rôle.
    — C’est à y réfléchir, dit Schomberg. Cependant, même
dans cette hypothèse, le duc sera toujours le lieutenant général des armées.
    — Certes ! Il serait, en effet, messéant de lui
retirer ce titre, mais ce titre ne sera plus qu’une coquille vide puisque le
roi est meshui présent, et devient, de ce fait, le commandant suprême.
    — Et comment, dans cette hypothèse que vous suggérez,
dit Schomberg d’un air circonspect, arrangerait-on le tour de rôle ?
    — Un jour, lui. Un jour, vous.
    — Oh oh ! dit Schomberg. Voilà qui est peu
orthodoxe au regard de la stratégie.
    — Je vous donne tout à plein raison, Monsieur le
Maréchal, dit mon père qui vola à point nommé à mon secours. Rien ne serait, en
effet, plus désastreux que d’avoir en alternance deux commandants dans une
guerre de mouvement, l’un tirant à hue et l’autre tirant à dia. Mais dans un
siège où, par définition, on ne change pas le dispositif, puisqu’on se bat aux
mêmes emplacements, l’alternance ne peut guère introduire de changement qui
soit néfaste à la conduite de la guerre.
    J’eusse dû me douter que lorsque mon père avait dit (pour la
deuxième fois) au maréchal : « Je vous donne raison », c’était
pour lui prouver subrepticement et sans l’offenser que, dans le cas présent, il
avait tort.
    Et en effet, une fois de plus, la douce et subtile adresse
de mon père succéda à persuader Schomberg et il dit :
    — Ma fé ! Cela ne laisse pas d’être vrai.
    Puis tout soudain, il se tourna vers moi d’un air
suspicionneux et me dit :
    — Comte, avez-vous déjà proposé cet arrangement au duc
d’Angoulême ?
    — Nullement, dis-je. Vous en avez bien évidemment la
primeur. Si vous l’acceptez, j’en parlerai au roi, et si le roi l’accepte, je
transmettrai ses ordres à Monsieur le duc d’Angoulême.
     
    *
    * *
     
    L’accord du roi à notre arrangement me fut donné à l’oreille
dans le chaud du moment et sans même qu’il en référât à Richelieu, Sa Majesté
se faisant quand et quand de petits plaisirs en lui cachant des décisions
mineures, sans jamais toutefois lui dissimuler les affaires de grande
importance. Cette cachotterie-ci me mettait en position délicate à l’endroit du
cardinal, puisque c’était lui qui m’avait détaillé ma mission. Et le jour même,
j’en glissai un mot à l’oreille de Charpentier qui en informa au bec à bec
Richelieu, lequel fit mine de tout ignorer, quand le roi lui en toucha mot, un
jour plus tard.
    Ces petites malices ne laissaient pas de m’ébaudir, car
elles me faisaient penser à ces vieux couples qui, malgré qu’ils soient soudés
l’un à l’autre par une inébranlable fidélité, ne laissent pas qui-ci qui-là de
se divertir en se cachant l’un à l’autre des petits secrets de nulle
conséquence.
    Le roi me donnant mon congé, il fallait maintenant informer
le duc d’Angoulême, non certes des « ordres », mais de la prière dont
nous étions porteurs.
    Peut-être dois-je ici ramentevoir, ma belle lectrice, que le
duc, âgé d’un an à la mort de son père Charles IX, avait été élevé avec
beaucoup de soin et d’amour par son oncle Henri III, et lui rendait au
centuple son affection, tant est que lorsque Henri fut frappé mortellement au
ventre par le couteau de frère Clément, le Grand Prieur, comme on appelait
alors Angoulême, pâtit d’une immense peine et le roi expirant, le béjaune, qui
avait à peine seize ans, chut de tout son long sur le sol, inanimé. Mon père,
aidé de Bellegarde, le porta sur sa couchette, et eut beaucoup de mal à le
tirer de sa pâmoison. Mais quand, enfin, le jouvenceau revint à la vie, il
retrouva son tourment et sa désespérance, disant qu’il perdait là non seulement
le meilleur des pères, mais aussi le seul protecteur qu’il eût à la Cour et que
d’ores en avant il ne

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