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La Gloire Et Les Périls

La Gloire Et Les Périls

Titel: La Gloire Et Les Périls Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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femmes.
    — N’est-ce point mon devoir de défendre le gentil
sesso auquel j’appartiens ? N’en êtes-vous pas vous-même furieusement
raffolé ? Auriez-vous, par aventure, vergogne à nous tant aimer ?
    — Pas du tout. C’est la joie de ma vie.
    — Pour revenir à Bassompierre, vous n’avez pas lieu, à
mon sentiment, de craindre de sa part un accueil malgracieux. Richelieu a
raison. Il doit nourrir secrètement pour vous « un reste d’amitié »,
puisqu’il vous a prévenu de l’embûche qu’on vous préparait sur le chemin de
Fleury en Bière.
    — Oui-da, belle lectrice, mais la façon ! la façon
dont il m’a averti ! Mon cœur en saigne encore ! Au milieu d’un
escalier désert du Louvre, l’œil épiant et fixé tantôt sur les marches
montantes et tantôt sur les descendantes, parlant à voix basse, m’avisant à
mi-mot d’une façon tout à la fois penaude et furtive… vous eussiez dit qu’il se
reprochait d’avoir à trahir son parti pour me sauver la vie !
    — N’empêche ! Il l’a sauvée ! Et vous lui
rendrez à votre tour un service de conséquence, si vous trouvez un arrangement
qui lui permettra de s’accorder au roi et d’échapper à son ressentiment.
    Le chemin étant bien plus court d’Aytré à Chef de Baie que
d’Aytré à Coureille, il me vint à l’idée, au réveil de ma sieste, ou devrais-je
dire plutôt, de mes songes, de dépêcher Nicolas à Chef de Baie, à la fois pour
annoncer notre visite à Bassompierre et pour demander à son frère aîné, le
capitaine de Clérac, comment les choses se passaient dans cette partie du camp.
    — Me faudra-t-il, Monsieur le Comte, poser des
questions sur le maréchal de Bassompierre ? dit Nicolas, sa belle et
franche face paraissant tourmentée.
    — Nenni, nenni, ne lui pose que des questions banales
et générales et ne pousse pas plus loin ton enquête, surtout si ton frère te
semble rebelute à y répondre. Du diantre ! Nous sommes des gentilshommes
au service du roi et non des agents à la solde du cardinal ! Toutefois,
pour bien entendre une situation, il est toujours utile d’en connaître le mieux
possible à l’avance les quoi et les qu’est-ce. Tu n’es pas que mon écuyer,
Nicolas. Tu es aussi mon homme de confiance et, dans les occasions, mon ami et
mon conseiller.
    — Je m’y efforce à tout le moins, dit Nicolas, non sans
marquer quelque émeuvement. Monsieur le Comte, je ferai comme vous avez dit, et
j’espère y mettre le tact et la légèreté de main qu’il y faudra.
    Deux heures plus tard, je vis par ma fenêtre mon Nicolas
revenir au grand trot et quelques minutes après, toquer à mon huis et moi,
jugeant à son entrant qu’il avait les yeux brillants et les joues comme
gonflées de nouvelles, je priai mon père qui se trouvait dans ma chambre d’y
demeurer afin d’ouïr avec moi ce qu’il avait à dire.
    — Monsieur le Comte, dit Nicolas d’une voix haletante,
le maréchal de Bassompierre vous recevra avec plaisir ainsi que Monsieur le
marquis de Siorac, sur les cinq heures de l’après-dînée.
    — Seulement sur les cinq heures ? dis-je. Est-il
si occupé ?
    — Nenni. Il ne fait rien.
    — Rien ?
    — Rien… Monsieur le Comte, je vous redis ce qu’on m’a
dit.
    — Et en quoi consiste ce rien ?
    — Suivi de ses maîtres de camp, il se trantole à cheval
dans le camp et fait des critiques acrimonieuses sur les forts et les redoutes
construits par Angoulême au début du siège.
    — C’est peu courtois.
    — Encore moins courtoise, la façon dont il traite les
missives qu’il reçoit du duc.
    — L’as-tu vu les recevoir ?
    — Non, on me l’a conté. Il ouvre ladite missive, y
jette un œil, ricane, la froisse, et la fourre dans la poche de son pourpoint.
On me dit que lorsqu’il en reçoit une le soir à la chandelle, il fait
pis ! Il la brûle aussitôt sans rien dire.
    — Pourvoit-il seulement à ses sûretés dans son
camp ?
    — À ce qu’on m’a dit, excellemment. Il tient aussi la
main à la discipline des soldats, comme à l’ordre et la propreté de sa partie
du camp.
    — T’a-t-on dit qu’il ait essayé d’entrer en contact
avec les insurgés de La Rochelle ?
    — Point du tout. Eux non plus n’échappent pas à ses
mordantes critiques. Ce sont, dit-il, de grands fols : l’amour de la
pécune les a perdus. Quand Buckingham occupait l’île de Ré, ils lui ont vendu à
gros prix toutes leurs viandes, sans

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