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La grande guerre chimique : 1914-1918

La grande guerre chimique : 1914-1918

Titel: La grande guerre chimique : 1914-1918 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Olivier Lepick
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surprenant de remarquer que les
forces alliées semblent avoir ignoré de nombreux indices qui auraient pu
laisser prévoir une attaque chimique allemande. Le fait le plus troublant fut
sans aucun doute la capture, le 14 avril 1915 par les hommes de la 11 e  division
française du général Ferry, d’un déserteur du 243 e  régiment
d’infanterie du 26 e  corps de réserve allemand du nom de August
Jäger [193] .
Le fantassin allemand passa les lignes alliées dans la nuit du 13 au 14 avril 1915.
Interrogé [194] ,
l’homme révéla la présence dans les tranchées allemandes d’un grand nombre de
cylindres contenant des gaz délétères. Il affirma aussi que des essais
effectués à l’arrière du front avaient montré que le gaz était encore très
toxique sur des bœufs à plus de 2 km du point d’émission. Il signala
également que, pour éviter d’être intoxiqués, les hommes avaient reçu un tampon
respiratoire de protection imbibé de produits chimiques neutralisants.
Étrangement, ce témoignage alarmant ne provoqua aucune réaction et l’information
ne fut même pas portée à la connaissance des autorités politiques belges et
britanniques. Le général Ferry, qui avait mené l’interrogatoire, se vit
répondre par ses supérieurs, que l’affaire ne semblait pas crédible [195] .
Il lui fut même reproché d’avoir transmis cette information à un de ses
homologues britanniques sans suivre la voie hiérarchique. Par la suite, les
déclarations des déserteurs allemands furent évidemment examinées avec un autre
intérêt. Ces indices ne furent pas les seuls. Des tampons respiratoires à base
de tulle imprégné d’un liquide furent ainsi découverts sur des cadavres de
soldats allemands, le 16 avril 1915, près de Langemarck. Les
Britanniques considérèrent ces avertissements avec à peine plus de sérieux que
les responsables français. Le 17 avril, lors d’une attaque de la 28 e  division
britannique sur une colline des environs d’Ypres, les soldats alliés s’étaient
emparés d’une tranchée ennemie où se trouvaient précisément des cylindres
pressurisés de chlore. Bien qu’ils aient été parfaitement identifiés par les
nouveaux occupants, personne ne s’en inquiéta. Les officiers qui attirèrent
cependant l’attention de leurs supérieurs dans leurs rapports journaliers
eurent pour toute réponse que cette affaire de gaz n’était qu’une nouvelle ruse
allemande et qu’elle ne pouvait être prise au sérieux [196] . Un officier
britannique du nom de Hankey fut même dépêché au quartier général du corps
expéditionnaire britannique pour avertir que l’ennemi préparait « quelque
chose comme une attaque chimique » [197] . On lui rétorqua
« qu’il était notoire que les Allemands préparaient quelque chose de la
sorte, mais que ce procédé était destiné à débusquer un ennemi retranché et non
à mener une action offensive d’envergure » [198] . Non seulement
les Alliés refusaient d’admettre l’évidence, mais lorsqu’ils acceptaient d’envisager
la possibilité d’une attaque de gaz, ils balayaient d’un revers de main sa
capacité à obtenir des résultats militaires. Un jugement extrait des notes
personnelles du major Foulkes est à cet égard particulièrement éloquent :
« On considérait que la tentative ennemie serait un échec dans la mesure
où les gaz seraient aisément dispersés. » [199] La légèreté avec
laquelle furent traités les indices d’une attaque chimique allemande imminente
demeure, aujourd’hui encore, une singulière énigme.
    Après des heures d’attente, le 22 avril 1915 [200] à 17 heures, les 150 t de chlore contenues dans les 5 830 cylindres
furent enfin libérées dans l’atmosphère sur un front de 6 km de large,
depuis Steenstraat sur le canal de l’Yser jusqu’à l’est de Poelcappelle. L’objectif
principal, près du village de Langemarck, était situé entre ces deux points et
était tenu par les forces françaises du détachement d’armée de Belgique
(général Putz) de la 45 e  DI (général Quinquandon) et
des territoriaux de la 87 e  DI (général Roy) [201] .
Aussitôt, un lourd nuage vert-jaunâtre flottant à 1 m au-dessus du sol
commença à dériver à la vitesse de 2 à 3 m/s vers les lignes françaises,
poussé par un léger vent de nord-est [202] . Quinze minutes
plus tard, munie des tampons respiratoires, l’infanterie allemande sortit de
ses

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