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La guerre de l'opium

La guerre de l'opium

Titel: La guerre de l'opium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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mouvement de recul face à cette pécheresse qui était en train de lui expliquer qu’elle refusait de suivre son mari.
    Bien décidé à remettre cette femme dans le droit chemin, il lui fit signe de s’asseoir sur l’une des deux chaises à moitié disloquées qui faisaient face à sa table de travail avant de passer derrière celle-ci puis de s’affaler dans son fauteuil, une imposante cathèdre d’allure néogothique réalisée par un ébéniste de La Nouvelle-Orléans, cadeau de ses parents lorsqu’il avait été ordonné pasteur.
    —  Madame Clearstone, vous n’êtes pas sans savoir qu’une femme chrétienne ne saurait abandonner son époux…
    Il n’avait pas pu achever sa phrase qu’elle le coupa avec véhémence :
    —  C’est mon époux qui m’abandonne, mon révérend   ! Il a décidé de repartir à Londres…
    —  Et pourquoi ne souhaitez-vous pas retourner en Angleterre, madame Clearstone   ?
    —  J’ai pris goût à la Chine… murmura Barbara, butée. Je connais peu ce pays mais je l’aime déjà de toutes mes forces. Les gens y sont si attachants   ! Et puis ils méritent qu’on les évangélise… comme vous le faites, monsieur Roberts.
    —  Sur ce point, je ne serai pas enclin à vous contredire, mais il…
    —  Ici, une vie comme la mienne a un sens. Depuis que je suis arrivée à Canton, je me suis aperçue qu’à Londres, je m’ennuyais à mourir… Si j’y étais restée, j’aurais péri sur pied.
    —  Je pense que vous exagérez… Il ne faut pas…
    —  Si vous saviez ce que j’ai besoin de me rendre utile… de sortir les gens de ces ténèbres spirituelles où ils se trouvent… de faire en sorte qu’ils connaissent le lumineux visage du Christ   !
    —  Je suis sûr que Londres est remplie de mécréants qui mériteraient qu’on se penche sur leur sort… réussit à répondre Roberts, qui n’arrivait pas à placer un mot.
    —  Ici, les gens pauvres le sont infiniment plus que là-bas   ! La misère atteint un degré indépassable   ! Insupportable   !
    —  La misère, ici, hélas, n’a pas de limites… convint le pasteur, sans pouvoir terminer sa phrase, Barbara, imperturbable, continuant à dérouler son raisonnement comme si de rien n’était.
    —  Et puis, ces épreuves que le Seigneur envoie à Brandon, je les prends comme un signe de Sa part. S’il m’a envoyée en Chine, ce n’est pas pour que j’en reparte à peine arrivée   ! conclut-elle d’une voix vibrante et les mains jointes, après de longues explications sur ses motivations et sur les circonstances qui l’amenaient à rester à Canton.
    A cet instant précis, si sa timidité naturelle ne l’en eût pas empêchée, Barbara se fût volontiers jetée à genoux devant le pasteur pour lui baiser les mains.
    —  Je comprends votre souhait de vous consacrer à ce pays, madame Clearstone… mais il s’agit là - croyez-le bien   ! - d’une tâche éminemment surhumaine… tenta d’objecter le baptiste qui commençait à se douter qu’il serait très difficile de faire changer d’avis une femme aussi têtue et exaltée.
    —  Mais vous l’accomplissez à merveille, mon révérend…
    - —  C’est mon métier. Mon Eglise me l’a demandé. Je n’ai aucun mérite à cela. Je n’ai pas de charges de famille… Toute mon existence, j’ai juré de ne la consacrer qu’à Dieu   ! Et vos enfants   ?
    —  Je ne demande rien d’autre que d’être votre humble servante, monsieur Roberts… souffla-t-elle, tandis que sa main tentait d’effleurer celle du pasteur qui la retira en se raidissant.
    —  Et vos enfants   ?
    —  Ils restent en Chine avec moi   ! Ils sont ce que j’ai de plus précieux sur cette terre. Et puis Brandon serait bien incapable de s’en occuper   !
    —  Madame Clearstone   ?
    —  Oui, révérend Roberts   ! souffla Barbara dont le regard éperdu suppliait le pasteur.
    —  Si vous avez besoin d’un toit, sachez que je ne refuse jamais l’hospitalité aux sans-abri.
    Roberts avait compris que rien ne pourrait la faire dévier de la voie qu’elle s’était choisie.
    —  Je le savais, mon révérend   ! J’en étais sûre… Un pasteur n’abandonne jamais son troupeau, n’est-ce pas, mon révérend   ? Je vous en serai éternellement reconnaissante… murmura l’Anglaise en haletant.
    Bien qu’elle fût épuisée par son plaidoyer, elle se sentait pleinement heureuse du choix qu’elle avait fait.
     
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