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La guerre des rats(1999)

La guerre des rats(1999)

Titel: La guerre des rats(1999) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Robbins
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s’étaient ajustées à ce qui l’entourait en même temps que son regard. Il était prêt à se figer comme un caméléon au moindre bruit, au moindre mouvement dans les gravats.
    Il progressait sans se faire repérer, mû par une force qui ne résidait pas seulement dans ses bras et ses jambes. Elle était aussi dans ses tripes, dans chacun de ses sens. Il savait qu’en ce moment la guerre ne s’occupait pas de lui ; elle était absorbée ailleurs. Lui, il était à son zénith, plus puissant et rusé que jamais. Attentif à toute menace, prêt à affronter le danger, à ramper le long des coutures de la bataille, à disparaître dans le tissu de la guerre. Bien qu’il eût maintes fois tenté, devant une bouteille et un paquet de cigarettes, dans des dizaines de tranchées, à la lumière tremblante des fusées, avec des bleus comme avec des combattants aguerris, de trouver les mots pour l’exprimer, il n’y était jamais parvenu : la guerre, quand on la connaît, quand on l’a en soi, est comme un animal. Vous pouvez la chasser, la cacher, ou lui jeter à manger quelque chose d’autre que vous. Vous ne pouvez pas la contrôler, mais vous pouvez penser comme elle. C ‘était cela que Zaïtsev ne pouvait apprendre à ses lièvres. Ça vivait en lui au niveau viscéral, sous les mots et la conscience. Ça avait commencé à respirer dans la taïga, éveillé dans son sang par son grand-père. Un soldat le possédait d’instinct, comme Viktor et Tchekov, finissait par l’acquérir, comme Tania, ou en était totalement dépourvu, quels que soient son courage et son intelligence. Il songea au jeune Moscovite, Fedya.
    Et le professeur nazi, est-ce qu’il l’a ? Son art de tuer est-il dans sa tête ou dans ses tripes ? C’est un professeur, un soldat ou un chasseur ?
    Qu’est-ce que Thorvald me montrera ? Il est patient ? Il attend que j’avance dans son réticule ou il essaie de m’attirer ?
    Zaïtsev regarda les carcasses des bâtiments devant lui, les maisons brûlées des cités ouvrières, au nord des vestiges d’Octobre-Rouge, et, plus loin dans la fumée, les Barricades. Il pensa à la ville qui s’étendait derrière lui, traçant le long de la rive arquée de la Volga un croissant de désolation. Elle était différente, maintenant. Avant, Stalingrad était un champ de bataille, avec des cartes, des secteurs, un front, des flancs, des lignes de ravitaillement, un fleuve, des pâtés de maisons qui la définissaient. Il avait appris à la connaître, il avait appris à connaître le terrain de la meilleure façon possible : en s’y cachant. Dès son arrivée dans les troupes d’assaut, il avait senti le rythme de cette ville comme il avait senti la forêt ou les marées du Pacifique, à Vladivostok. Mais dans les ombres et les crevasses rôdait maintenant un élément imprévisible : un seul homme avec une seule mission : trouver et tuer le Lièvre. Un colonel de SS, un maître tireur plus doué que tout ce que Zaïtsev pouvait imaginer, armé de la photographie de sa proie et des articles de Danilov détaillant les innovations tactiques du Sibérien.
    Si Thorvald était bien celui qui avait tiré sur le mannequin dans le secteur 2, il était d’une rapidité et d’une précision extraordinaires. En revoyant le visage transpercé de Piotr, Zaïtsev sentit qu’il y avait quelque chose d’autre chez cet homme. Quelque chose de tordu, de bizarre.
    Il se porta suffisamment loin à l’ouest pour découvrir le dépôt ferroviaire jouxtant les maisons ouvrières d’Octobre-Rouge. Il se trouvait dans la zone des entrepôts frigorifiques, juste au nord de la Lazur. Striakov avait contre-attaqué à cinq cents mètres derrière lui. Sur sa gauche, les échos des grondements des chars et des claquements des bottes rebondissaient sur les façades de pierre dénudées : les Allemands avançaient pour répondre à Striakov.
    Les trous de tireur qu’il avait partagés avec Koulikov et Baugderis se trouvaient à proximité. Il inspecta le secteur avec sa lunette — les jumelles auraient mieux convenu, mais il préférait avoir un doigt sur la détente dans des situations incertaines comme celle-ci —, chercha les cinq wagons délabrés. Ils lui indiqueraient la tranchée allemande, la réserve de chasse de Koulikov.
    Il avança d’une vingtaine de mètres encore. Le premier wagon lui apparut au bout du dépôt, sur un talus, sous une rangée d’entrepôts. Il reconnut le terrain. La tranchée de

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