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La guerre des rats(1999)

La guerre des rats(1999)

Titel: La guerre des rats(1999) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Robbins
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Es-tu contente de faire partie de ses lièvres ?
    Elle chercha quelque chose à répondre, constata avec surprise qu’elle avait plus à dire sur le sujet qu’elle ne l’aurait pensé, mais ce n’étaient pas les mots que Danilov souhaitait entendre. Il s’attend à ce que je brosse un portrait héroïque, pensait-elle, du genre : « Zaïtsev s’est conduit magnifiquement la nuit dernière. C’est un honneur de servir sous un tel chef. » Je ne peux pas lui dire la vérité, à savoir que j’ignore si l’adjudant est un héros ou un couard qui fanfaronne. Il me semble qu’il apprécie de devenir une vedette de Pour la défense de notre pays, une des nombreuses nouvelles icônes de la cause russe. Non, je ne peux pas dire à ce petit tchékiste que je trouve Zaïtsev troublant, que j’ai envie de toucher ses mains aux veines saillantes, son visage plat de Sibérien. Quand sa voix me dit d’avancer ou d’arrêter, de viser à droite ou de sauter à gauche, mon corps suit. J’ai terriblement envie qu’il soit réellement le héros que Danilov est en train de construire.
    — Le camarade adjudant est un homme hardi, finit-elle par déclarer tandis que le crayon du commissaire se mettait à courir sur la page. C’est un héros ; tous ceux qui combattent à ses côtés accompliront eux aussi des actes héroïques. Je suis fière d’être un de ses lièvres.
    — Après que l’entrepôt a sauté, vous avez couru dans les rues pour rejoindre les lignes russes ?
    — L’explosion couvrait le bruit que nous faisions. Je ne m’entendais pas courir. L’adjudant-chef fonçait devant, nous l’avons suivi. Ce n’était pas à moi de décider, mais je pense que la décision était bonne.
    Danilov referma son cahier.
    — Une dernière question, soldat Tchernova. En ces heures de péril, il importe que la Russie soit défendue par des combattants, disons, engagés. En tant que femme, mourrais-tu pour la rodina ? Serais-tu prête à donner ta vie ?
    Salaud de rouge, pensa-t-elle. Ta question exhale la même puanteur que celles des casquettes vertes sur la route de Stalingrad.
    — Camarade commissaire, je ne mourrai pas pour la patrie en tant que femme mais en tant que russe, répondit Tania, inclinant la tête comme si elle le mettait en joue avec son fusil à lunette. Et je ne mourrai certainement pas en lâche, camarade.
    Danilov fourra le cahier sous son bras, descendit de sa caisse. Il était à peine plus grand debout que Tania assise.
    — Bien sûr, dit-il, boutonnant sa capote.
    Il tendit une main flasque, Tania la serra et le regarda s’éloigner. Zaïtsev adressa un signe de tête au petit commissaire quand il passa devant lui.
    Tania glissa sa cuillère dans sa botte, posa son assiette et retourna devant les cibles sur lesquelles trois soldats continuaient à s’entraîner. Elle s’agenouilla derrière sa caisse, poussa des douilles vides sur le côté, se fourra des boulettes de papier dans les oreilles et actionna la culasse de son arme. Fixant le cercle le plus petit à travers sa lunette, elle replia la deuxième phalange de l’index sur la détente. La cible montait et descendait au rythme de ses battements de cœur. Respirant faiblement, elle attendit que sa main s’affermisse. Au bout de quelques secondes, la cible s’immobilisa au centre du réticule. Elle semblait immense, immanquable ; elle appelait la balle. Tania pressa lentement et régulièrement la détente. Le fusil claqua, frappa son épaule endolorie. Dans la lunette, elle vit apparaître l’haleine rouge du mur de briques, touché au centre du cercle le plus petit. Tania ramena la culasse en arrière pour faire feu de nouveau.
    La séance de l’après-midi commença quand Zaïtsev appela :
    — Les lièvres ! On y va ! Prenez vos armes ! Portant son fusil en travers des épaules comme un joug, il fit monter ses élèves au premier étage de l’usine Lazur. Ils se faufilèrent dans un dédale de métal tordu et de poutres calcinées jusqu’à une rangée de fenêtres grises de suie donnant sur le no man’s land du dépôt ferroviaire. Zaïtsev fit halte à quelques pas de l’une des larges ouvertures, qui avait perdu depuis longtemps carreaux et châssis. Ses bottes crissèrent sur le verre brisé.
    Il tendit le bras vers les bâtiments tenus par les Allemands, de l’autre côté du no man’s land. L’air était vif, première floraison blanche de l’hiver russe.
    — Vous regardez l’ouest, dit-il. En ce moment, le

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