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La guerre des rats(1999)

La guerre des rats(1999)

Titel: La guerre des rats(1999) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Robbins
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sections d’assaut, organisation paramilitaire forte d’un demi-million d’hommes que Hitler appelait ses « soldats politiques dans la bataille pour reprendre la rue aux marxistes ». Pendant les réunions et les retraites, Heinz fut soumis à une discipline quasi militaire, admis dans le labyrinthe des visées politiques du Führer, et incité à se méfier de tout ce qui n’était pas « aryen ».
    La ferveur de ses camarades l’inquiétait. Les sections d’assaut se battaient dans la rue à coups de poing et de bouteille contre les sympathisants communistes. Ils marchaient au pas de l’oie pour soutenir la folle ascension de Hitler vers le pouvoir. Quand on les arrêtait, ils brisaient les vitres des postes de police en jetant bancs ou téléphones contre les fenêtres. Heinz était incapable de prendre part à ces violences. Il était paralysé par une peur dont il ignora l’existence jusqu’au jour où ses camarades se ruèrent sur une foule de rouges. Il demeura au bord de la mêlée, figé par sa frayeur. Il quitta les chemises brunes deux mois après y être entré et fut traité de lâche.
    Refusant cette étiquette infamante pour son fils, le baron décida que l’erreur venait de lui. Les SA étaient trop prolétariennes, et Heinz trop raffiné pour les rustres qui les composaient. Sa place était dans le Jung-deutsche Orden, l’Ordre des jeunesses allemandes, le Jungdo.
    Le jeune Thorvald y trouva ce qui lui convenait : un foyer idéologique pour les fils de la bourgeoisie. Les Jungdo marchaient au pas de l’oie, mais uniquement parce que c’était la mode et qu’ils ne voulaient pas apparaître moins engagés pour la cause nationale-socialiste que les autres mouvements. Mais, à la différence des Jeunesses hitlériennes et des SA, les Jungdo ne brisaient pas les rangs pour se précipiter sur un groupe d’hommes et de femmes portant des banderoles communistes, ni pour jeter des pierres et des bouteilles aux orateurs bolchéviques. Au lieu des fêtes imbibées de bière des SA, ils participaient à des meetings fraternels et patriotiques. Les membres du Jungdo se comportaient en hommes éduqués pour commander, non pour prendre part aux échauffourées. Heinz passait ses week-ends en camps de plein air, pratiquant la marche et le sport. Le Jungdo imposait une liste de lectures reprenant fidèlement les auteurs préférés du Führer. Heinz fut ainsi introduit aux conceptions du grand philosophe Nietzsche, selon qui une race héroïque de surhommes se hisserait au-dessus de la morale conventionnelle pour balayer la décadence mondiale. Dans Le Monde comme volonté et comme représentation de Schopenhauer, une des lectures favorites de Hitler pendant la Première Guerre mondiale, Heinz découvrit qu’on pouvait concevoir la volonté comme une force. Il s’émerveilla devant les leçons de sélection darwinienne, devant les parallèles inattendus qu’Oswald Spengler établissait entre mathématiques, physique, culture et histoire dans Le Déclin de l’Occident.
    L’enthousiasme du jeune homme pour la vision hitlérienne de l’Allemagne grandit à mesure qu’il discerna les influences à l’œuvre derrière les idées du Führer. Grâce aux conseils des orateurs du Jungdo, aux discussions prolongées tard dans la nuit avec ses camarades, il prit conscience du péril rouge. Il comprit que les riches commerçants juifs tenaient les cordons de la bourse, étranglant une nation aryenne cherchant une embellie économique.
    En été 1933, Heinz éprouva un sentiment d’appartenance qu’il ne connaissait pas avant d’avoir adhéré au Parti nazi. Comme les autres rejetons des familles riches, il était trop habitué à sa position sociale et se sentait exclu de la vie. Il partageait au moins ce sentiment avec les ouvriers et les garçons de ferme grossissant les rangs des SA et des Jeunesses hitlériennes. L’économie était tellement ralentie que la jeunesse allemande se sentait isolée d’elle-même. Ses espoirs et ses rêves avaient été hypothéqués, son destin enchaîné au naufrage passé du pays. Ce n’était pas un passé de gloire impériale, comme celui dont leurs parents gardaient le souvenir. Les jeunes Allemands de 1933 avaient grandi dans les années d’après-guerre, après la défaite et la honte, dans une Allemagne maintenant embourbée dans une crise mondiale.
    Il n’y avait eu aucun havre intellectuel ou philosophique pour Heinz avant le Jungdo. Il avait lu des

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