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La guerre des rats(1999)

La guerre des rats(1999)

Titel: La guerre des rats(1999) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Robbins
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coup, que ce soit toi ou moi.
    — Vasha, fit Tania, tendant la main, paume ouverte, comme pour accepter une pièce de monnaie. Tu dis toujours qu’un tireur doit garder sa position secrète.
    Elle tendit le bras vers Danilov pour réclamer une explication sur la présence du commissaire et du haut-parleur.
    — Exactement, répondit Zaïtsev avec un grand sourire. Et c’est pour ça qu’on essaie quelque chose d’inattendu, aujourd’hui. (Il prit le périscope de Tania, le posa dans sa main tendue.) Tu voulais chasser. On va chasser.
    Il s’éloigna en rampant pour mettre en place son subterfuge, le mannequin rembourré de coton qu’il avait ramené de l’usine Lazur. Il l’installa derrière la deuxième pile de briques, celle de droite, le pencha en avant et juste assez sur la gauche pour que son casque soit visible uniquement d’un angle de vingt-cinq degrés environ au sud-ouest. Enfin, il planta un tuyau derrière le dos du mannequin pour le soutenir.
    Zaïtsev n’utilisait pas souvent les mannequins. Aucun des lièvres ne le faisait. Leur spécialité, c’était le contraire, comme Tania l’avait souligné à juste titre : les lièvres s’efforçaient d’être invisibles. Destinés à attirer l’attention, les mannequins correspondaient davantage au style des ours, plus portés sur l’affrontement. Zaïtsev avait entendu dire que des gars de Viktor sortaient de leur trou et chargeaient pendant un combat. Ce n’était pas de cette façon qu’un tireur d’élite devait opérer, estimait Zaïtsev, mais il n’aurait jamais eu le front d’expliquer à Viktor Medvedev comment il devait chasser ou ce qu’il devait apprendre à ses hommes. Charger en hurlant, ce n’était pas pour les petits tueurs agiles de Zaïtsev.
    Les mannequins étaient cependant toujours disponibles. Leur production était devenue une activité artisanale clandestine pour le millier de femmes restées dans leur ville de Stalingrad. Zaïtsev se les représenta assises en cercle sous une lanterne dans un trou d’obus recouvert de planches ou dans une cave, fabriquant des mannequins avec de vieilles couvertures, les bourrant de crin de matelas et leur donnant des noms. C’était ainsi que combattaient ces vieilles, avec une aiguille et du fil. Il baptisa le sien Piotr et lui tapota l’épaule.
    Satisfait de son installation, le Lièvre prit position à dix mètres du mannequin, sur la droite. Avec sa pelle, il creusa une fente dans le bord de la tranchée, disposa une brique de chaque côté pour l’entourer d’une embrasure. Puis il plaça ses gants dans le creux, appuya son fusil dessus, face à l’angle de vingt-cinq degrés d’où l’on pouvait voir la tête de Piotr. De son pouce dressé, il fit signe à Danilov, qui attendait, assis sur le sol de la tranchée.
    Le commissaire pressa le bouton du micro, souffla dedans. Le haut-parleur émit un craquement d’arbre qui se fend. Le volume était au maximum.
    Danilov étala quelques feuillets sur ses genoux, approcha le micro de sa bouche pour entamer son opération d’agit-prop. Zaïtsev écouta les mots étrangers sortir du haut-parleur. Il n’avait jamais entendu d’allemand avant de venir à Stalingrad. Les quelques mots prononcés par des prisonniers, des déserteurs et des mourants, ou criés pendant les combats au corps à corps dans les maisons du centre, lui avaient laissé l’impression d’une langue hideuse, faite pour les batailles. On parlait l’allemand dans le fond de la gorge, on le mâchait avec les dents. Le russe, en revanche, lui semblait gouleyant. On le faisait tourner dans la bouche comme un cognac. On le murmurait à une amante par un trou de serrure pour la convaincre d’ouvrir sa porte. L’allemand était une langue qui servait à enfoncer les portes.
    Zaïtsev fit aller ses yeux de Danilov à Tania qui, abritée, inspectait le terrain avec son périscope. Il préférait, lui, utiliser sa lunette. Le grossissement 4 offrait une portée moins longue mais une image plus nette. Il balaya lentement le champ qu’il avait délimité. Bien que la matinée s’avançât, il avait encore le soleil derrière lui.
    La voix amplifiée de Danilov déchira l’air. Les consonnes allemandes, encore durcies par le haut-parleur, allèrent percuter le flanc de la colline. C’est insupportable, estima le Lièvre, même s’ils ne comprennent pas un mot de ce qu’il dit.
    Les tracts posés sur les genoux du zampolit étaient de ceux que les deux

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