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La jeune fille à la perle

La jeune fille à la perle

Titel: La jeune fille à la perle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Tracy Chevalier
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lever et
ensuite de s’asseoir, d’abord en se penchant en arrière, puis en avant.
    Je crus qu’il avait oublié que
j’observais tout cela depuis un coin de l’atelier, quand je l’entendis me
dire : « Griet, allez me chercher la houppette de Catharina. »
Il lui demanda de la tenir contre son visage, puis de la poser sur la table
sans la lâcher et enfin de la laisser sur le côté. Il me la tendit alors.
« Remportez-la », dit-il.
    Quand je revins, il lui avait
donné une plume et une feuille de papier. Assise sur la chaise, penchée en
avant, elle écrivait, un encrier près d’elle. Il ouvrit deux des volets du
haut, en ferma deux d’en bas. La pièce s’assombrit, mais la lumière éclairait
son front arrondi, son bras posé sur la table et la manche de son mantelet
jaune.
    « Avancez légèrement la
main, dit-il. Comme ça. »
    Elle se mit à écrire.
    « Regardez-moi »,
dit-il.
    Elle le regarda.
    Il alla chercher une carte dans
le débarras, l’accrocha au mur derrière elle, puis il l’enleva. Il essaya un
petit paysage, un tableau représentant un bateau, le mur nu. Puis il disparut
au rez-de-chaussée.
    En son absence, j’observai
l’épouse de Van Ruijven. Peut-être était-ce impoli de ma part, mais je tenais à
voir ce qu’elle allait faire. Elle ne bougea pas. Elle sembla s’installer plus
complètement dans la pose. Le temps qu’il revienne avec une nature morte aux
instruments de musique, on aurait pu croire qu’elle avait toujours été assise à
cette table, en train d’écrire une lettre. J’avais entendu dire qu’il l’avait
déjà représentée jouant du luth dans un tableau antérieur à celui du collier de
perles. Depuis, elle devait avoir compris ce qu’il voulait d’un modèle.
Peut-être était-elle tout simplement pour lui le modèle parfait.
    Il accrocha le tableau derrière
elle et se rassit pour l’étudier. Tandis qu’ils se regardaient mutuellement,
j’eus l’impression que je cessais d’exister. J’aurais voulu retourner à mes
couleurs, mais je craignais de troubler cet instant.
    « La prochaine fois que
vous viendrez, mettez des rubans blancs dans vos cheveux plutôt que des roses
et servez-vous d’un ruban jaune pour les attacher sur votre nuque. »
    Elle acquiesça d’un signe de
tête des plus discrets.
    « Détendez-vous. »
    Quand il eut pris congé d’elle,
je me sentis libre de m’en aller.
     
    *
     
    Le lendemain, il approcha une
autre chaise de la table. Le jour suivant, il apporta le coffret à bijoux de
Catharina et le posa sur la table. Les serrures des tiroirs étaient incrustées
de perles.
    Alors que je travaillais dans
le grenier, Van Leeuwenhoek amena sa chambre noire. « Il faudra qu’un jour
vous ayez la vôtre, lui dit-il de sa voix grave. Mais je dois reconnaître que
cela me donne l’occasion de voir ce que vous peignez. Où est le modèle ?
    Elle n’a pas pu venir.
    C’est ennuyeux.
    Non. Griet ! »
appela-t-il.
    Je descendis l’échelle. En me
voyant entrer dans l’atelier, Van Leeuwenhoek me regarda, stupéfait. Il avait
les yeux d’un brun très clair et de lourdes paupières qui lui donnaient l’air
somnolent. En fait, loin d’être somnolent, il était éveillé et intrigué, les
lèvres crispées. Si étonné fût-il de me voir, il garda une expression pleine de
bienveillance et, une fois revenu de sa surprise, il s’inclina même pour me
saluer.
    Aucun monsieur ne s’était
jamais incliné devant moi. Je ne pus m’empêcher de sourire.
    Van Leeuwenhoek rit. « Que
faisiez-vous là-haut, ma chère enfant ?
    — Je broyais des couleurs,
Monsieur. »
    Il se tourna vers mon maître.
« Une assistante ! Quelle autre surprise me réservez-vous ?
Bientôt, vous lui enseignerez à peindre vos modèles à votre place ! »
    Sa remarque n’eut pas l’air
d’amuser mon maître. « Griet, dit-il, asseyez-vous de la même façon que
l’épouse de Van Ruijven l’autre jour. »
    J’avançai avec inquiétude vers
la chaise et m’assis, veillant à me pencher en avant, comme elle.
    « Prenez la plume. »
    Je la pris. Ma main tremblait,
la plume vibrait. Je plaçai mes mains ainsi que je le lui avais vu faire, et
appris à écrire mon nom, mais pas grand-chose d’autre. Au moins, je savais
tenir une plume. Je jetai un coup d’oeil sur les feuilles de papier, curieuse de
savoir ce que l’épouse de Van Ruijven avait écrit. J’arrivais à peu près à lire
des ouvrages aussi

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