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La lumière des parfaits

La lumière des parfaits

Titel: La lumière des parfaits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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avaient cependant croisé leur arme d’hast sous l’arestuel, au milieu de la hampe pour nous interdire l’entrée de la barbacane.
    Peu après, un frère portier nous accueillit avec chaleur, dans un parler français teinté d’un léger accent guttural. Il nous conduisit vers nos quartiers respectifs, tandis que des palefreniers, des Halbrüder , saisissaient nos montures par la bride pour les mener à l’abreuvoir, les étriller et leur offrir foin et avoine. En réponse à une question du chevalier Raymond de Carsac, le frère portier nous précisa que nos effets nous seraient portés prochainement.
    Nous logerions, Foulques, Raymond, nos écuyers et moi, dans le Mittelschloss , lieu de résidence des chevaliers en pèlerinage. Non sans un humour teutonique, le frère nous expliqua que le Mittelschloss abritait le Palais du Hochmeister , le grand réfectoire où nous prendrions nos repas et… l’enfermerie pour y panser les navrures que notre vaillance au combat pourrait entraîner.
    « L’enfermerie, messires, l’antichambre du cimetière sis près de l’une des chapelles… » gloussa-t-il, au bord d’une hilarité qu’il crut contagieuse. À tort. Nous rîmes jaune.
    Le grand maître, Winrich von Kniprode, retenu dans la commanderie d’Elbing, ne serait de retour que pour la veille de la fête de la Nativité. En vertu de quoi, il avait fait savoir, avant son départ, qu’il ne nous recevrait que le lendemain de Noël.
    Nos serviteurs pourraient se rendre en la chapelle Saint-Laurent, tandis que nos écuyers et nous étaient invités à assister à l’office en l’église Notre-Dame.
    Nous comprîmes, au ton de sa voix, que l’invitation n’était autre qu’une indiction, les pèlerins de noble naissance devant participer aux offices de laudes et de vêpres, comme il sied à des moines-soldats. Certes, nous n’étions point moines, mais soldats ; aussi étions-nous dispensés par la Règle, si nous le souhaitions, des autres offices diurnes et nocturnes qui ne ponctuaient leur vie que cinq heures par jour en temps de paix !
    À la parfin, nous furent précisées les heures du dîner et du souper que nous devions prendre dans le grand réfectoire en compagnie des cent chevaliers et des six cents autres frères et domestiques de la garnison.
    Fritz, notre frère portier nous affirma que la plupart d’iceux comprenaient et parlaient notre langue. Cela nous serait utile lors des séances d’entraînement au combat auxquelles nous étions tous conviés. Mais point pendant les repas pris en commun. Car le silence y était de règle, pour mieux ouïr les lectures qui nous seraient faites.
    Foulques de Montfort s’en réjouit : il n’aurait pas à supporter nos clabaudages. Guy de Vieilcastel, Philippe de Castelja, Onfroi de Salignac, Guilbaud de Rouffignac et moi nous renfrognâmes. Quoique la question qui nous brûlait les lèvres était d’autre nature : savoir ce qui nous serait servi à dîner et à souper. De la soupe aux choux-navets ? Des harengs fumés ? Des fèves et autres pois chiches ? Et en guise de breuvage, l’eau de la rivière Nogat ? Vu l’austérité monacale de l’endroit, ici on ne devait pas badiner avec la Règle ! Nous nous jetâmes un regard inquiet. Nous n’avions pas les mêmes mises en bouche en notre duché d’Aquitaine ! Dieu soit loué. Nous nous accoisâmes cependant par égard pour notre hôte. Et après tout, n’étions-nous pas en pèlerinage pour mériter indulgence plénière ?
    Non sans malice, notre frère-servant nous rappela, pour le cas où le chevalier Wilhelm von Forstner ne nous l’aurait pas dit, que l’entraînement au poteau de quintaine, à l’épée et à la lance, se déroulait tous les jours, à l’intérieur et à l’extérieur des enceintes, de tierce jusqu’au dîner et de none jusqu’au souper, sauf les jours de carême et des fêtes religieuses suivies par l’Ordre. Mais bien sûr, le jour du Seigneur nous aurions quartier libre et pourrions nous livrer au passe-temps favori des chevaliers de l’Ordre : le jeu d’échecs…
    Foulques de Montfort, maître ès arts, se fendit le bec d’un large sourire.

    Nous prîmes notre premier et frugal repas une heure après sexte dans le Remter , le réfectoire, en compagnie de tous les frères, du plus humble jusqu’au Hochmeister . Trois tables étaient dressées. La première pour le grand maître, le Marschal , le maréchal qui faisait fonction de chef militaire

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