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La Marquis de Loc-Ronan

La Marquis de Loc-Ronan

Titel: La Marquis de Loc-Ronan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ernest Capendu
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Carrier, entra dans le poste des sans-culottes, et fit porter les différents ordres qu’il venait de rédiger aux chefs de corps de la garnison.
    Puis s’enveloppant dans un épais manteau, vêtement parfaitement justifié par la rigueur du froid, il s’achemina vers Bouffay. Il avait gardé sur lui, par mesure de précaution, un blanc-seing du citoyen représentant.
    Ce blanc-seing, joint aux pièces fausses fabriquées par Pinard et qui faisaient de Fougueray un personnage officiel, il n’y avait nul doute que les geôliers ne lui obéissent sans la moindre hésitation.
    Aussi, fut-ce d’un ton de maître qu’il éleva la voix en s’adressant au gardien général des prisonniers. Il demanda le porte-clefs Piétro. Un sans-culotte s’empressa de l’introduire dans la première cour, et le conduisant à travers un véritable dédale de corridors et d’escaliers, le mit en présence d’un homme de petite taille, maigre et délicat d’apparence, au teint fortement basané et à l’œil expressif.
    Cet homme était le geôlier Piétro qui, en apercevant Fougueray, laissa échapper un geste du plus profond étonnement. Le sans-culotte se retira. Les deux hommes demeurèrent seuls dans une sorte de chambre mal éclairée par une fenêtre garnie de barreaux, et qui servait de gîte au geôlier. Piétro joignit les mains en poussant une exclamation.
    – Sainte madone ! dit-il en dialecte napolitain. Toi ici, Diégo !
    – Est-ce que tu ne m’attendais pas ? répondit Fougueray en prenant l’unique siège qui se trouvait dans la pièce, et en s’asseyant avec l’aplomb d’un maître qui se sait en présence de son subordonné.
    – Non ; je te croyais encore à Paris où je t’avais rencontré il y a deux mois.
    – Heureusement pour toi encore.
    – Sans doute, et je ne le nie pas.
    – Tu te rappelles donc ce que tu me dois ?
    – Comment l’oublierais-je ? Sans toi je serais mort de faim et de misère ! Tu m’as recueilli, tu m’as donné de l’argent pour venir à Nantes, où tu me procurais une place. Grâce à toi, j’existe encore, et quoique le métier ne soit guère de mon goût, comme il me nourrit, je m’y résigne.
    – À propos, caro mio, j’ai toujours oublié de te demander pourquoi tu avais quitté le pays ?
    – Nos bandes avaient été détruites.
    – Par qui ?
    – Par les carabiniers, donc !
    – Comment ! vous vous êtes laissé battre par ces drôles ?
    – À la première rencontre, Cavaccioli avait été tué. La désunion s’est mise parmi nous. Alors chacun tira de son côté. Sachant bien que si j’étais pris je serais pendu, je passai en Sicile avec ma femme. Là je la perdis en peu de temps. C’est la fièvre qui me l’a tuée. Alors me trouvant seul au monde, je pensai à aller à l’étranger. Un patron de barque, de mes amis, me jeta en Sardaigne : de là je gagnai la Corse, puis la France. J’espérais, une fois à Paris, me tirer d’affaire, car on prétendait qu’il était facile d’y faire des siennes ; mais…
    – Tu t’étais trompé !
    – Je le sais.
    – Ce qui fait que je te trouvai un jour mourant de misère et de faim, comme tu le dis très bien toi-même, et que j’eus compassion de toi.
    – Aussi te suis-je dévoué, Diégo !
    – C’est ce que nous verrons.
    – Mets-moi à l’épreuve.
    – Patience ! D’abord, commence par me rendre compte de l’état des deux prisonniers que le citoyen Pinard t’a confiés.
    – Ah ! ces deux hommes dont l’un se nomme Jocelyn ?
    – Oui.
    – C’est d’eux qu’il s’agit ?
    – Précisément.
    – Ils sont là !
    – Dans la salle commune ?
    – Sans doute ; il n’y a de place nulle part.
    – Tu vas me conduire près d’eux.
    – Il vaut mieux qu’ils viennent ici.
    – Pourquoi ?
    – Tu n’as donc pas encore visité les prisons ?
    – Non.
    – Alors viens avec moi. Tu vas voir pourquoi je te conseille de ne pas entrer.
    Diégo se leva, et les deux hommes sortant de la petite pièce traversèrent un large corridor et se trouvèrent en face d’une porte toute bardée de barres de fer et de plaques de tôle. Piétro souleva le trousseau de clefs pendu à sa ceinture, suivant la coutume traditionnelle. Il en choisit une qu’il introduisit dans l’énorme serrure de la porte ; puis il fit jouer deux verrous et poussa le battant de chêne massif.
    Une bouffée de vapeur fétide, apportant une odeur affreuse vint frapper

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