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La Marquise de Pompadour

Titel: La Marquise de Pompadour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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elle les dénatura, la musique sautillante devint une plainte d’une infinie tristesse…
    Nous n’irons plus au bois… les lauriers… sont flétris…
    La dernière note tomba dans le silence, pareille à un soupir… à une larme de musique.
    Le dernier mot se perdit dans un râle étouffé. Elle mit ses deux mains sur ses yeux, et, les coudes sur les touches du clavecin, répéta :
    – Flétris à jamais !… comme est flétri mon cœur ! Oh ! perdue, perdue !…
    A ce moment précis, Jeanne tressaillit violemment. Elle laissa tomber ses mains de ses yeux et, le cœur bondissant, écouta… on venait d’ouvrir la grande porte de l’hôtel… en bas, il y avait des allées et venues…
    – Oh ! si c’était lui !… lui que j’ai appelé à mon secours… le chevalier d’Assas !
    Et son angoisse était telle qu’elle demeurait clouée à sa place.
    Un murmure indistinct lui parvenait… elle reconnaissait la voix de Noé, puis celle de M me  Poisson… puis la porte, à nouveau, s’ouvrait et se refermait…
    Alors, prise d’un espoir insensé, elle courut à la porte de l’atelier, passa sur le palier, se pencha… et soudain, elle vit M me  Poisson qui sortait du petit salon du rez-de-chaussée, un flambeau à la main, et qui montait l’escalier…
    Que se passait-il ?
    Pourquoi Héloïse Poisson avait-elle jeté un si étrange regard dans le petit salon avant de se mettre à monter ?
    Légère comme un sylphe, Jeanne bondit, rentra dans l’atelier, éteignit les flambeaux et se blottit derrière un paravent – précieux bibelot venu à grands frais du fond de la Chine.
    Héloïse ouvrit la porte et appela :
    – Jeanne, mon enfant, es-tu là ?…
    La matrone attendit un instant, puis se retira en grommelant :
    – Dans sa chambre sans doute ! Au fait, il vaut mieux la laisser dormir… il est inutile qu’elle sache quel hôte nous abritons ce soir… un hôte qu’on trouvera peut-être mort demain matin… mais est-ce ma faute ?…
    Jeanne demeura immobile pendant quelques minutes.
    Puis, quand le silence fut redevenu profond dans l’hôtel, quand elle n’entendit plus aucun bruit, elle se glissa à travers les meubles de l’atelier, descendit et s’arrêta devant la porte du petit salon.
    Elle éprouvait une insurmontable angoisse.
    Pourquoi ? Elle n’eût su le dire !
    Il n’y a rien de mystérieux et de redoutable comme une porte fermée derrière laquelle on suppose qu’il se passe ou qu’il s’est passé un événement considérable, peut-être terrible.
    Tout à coup elle se décida et ouvrit.
    Elle vit un jeune homme couché sur le canapé, et frissonna longuement :
    – Le chevalier d’Assas !…
    Son premier mouvement fut tout de joie instinctive : il avait donc reçu la lettre ! Il accourait donc à son secours !… Mais quoi ! Immobile ? Comme mort ? Sans souffle ? La figure violacée ?… Oh ! mais il allait mourir !… Seigneur ! Mort, peut-être !
    Elle bondit vers lui… Non… il vivait ! Un léger râle s’échappait de ses lèvres tuméfiées, les veines des tempes battaient et gonflaient… Les yeux étaient ouverts, et un rayon de ces yeux atones, vitreux, oui, un rayon d’amour monta vers elle et la fit palpiter…
    Elle comprit que ce beau chevalier se sentait mourir ! Elle comprit que sous ce front hardi, intelligent, harmonieux, à la minute tragique de la mort, il y avait pour elle une pensée d’amour pur et d’infini dévouement…
    Elle saisit sa main, se pencha :
    – Chevalier… m’entendez-vous ?… chevalier d’Assas ?… Oh !… il demeure inerte… il se meurt !… Pourquoi l’a-t-on laissé seul ici, sans secours ?…
    Pourquoi la Poisson s’est-elle éloignée ?… Horreur !…
    Elle a donc voulu le laisser mourir ?
    Toute droite, les yeux agrandis par l’épouvante de ce qu’elle croyait deviner, elle demeura un instant comme pétrifiée…
    Puis elle eut ce mouvement de tête qui est un défi à la destinée, un appel de bataille !…
    En quelques secondes, elle eut arraché le col qui enserrait le cou du chevalier, lacéré la dentelle de son jabot, ouvert l’habit, mis à nu la gorge et la poitrine…
    Un profond soupir gonfla cette poitrine et une larme perla aux paupières de ces yeux étrangement fixes d’où montait, comme du fond d’une tombe, un rayon d’amour…
    Jeanne portait toujours sur elle un flacon de sels, puissant révulsif qu’elle fit respirer au jeune homme.

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