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La Marquise de Pompadour

Titel: La Marquise de Pompadour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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étaient arrivés au bout du grand salon, à l’entrée d’une sorte de pièce qui était réservée pour le roi, au cas où Sa Majesté eût été indisposée, ou simplement eût voulu se reposer.
    Jeanne s’assit dans un fauteuil que lui céda galamment un seigneur qui s’y trouvait.
    En même temps, elle répondait à Saint-Germain :
    – Merci, monsieur, de votre hommage ; il m’est d’autant plus précieux qu’on le dit rare et sincère.
    – En effet, madame, dit le comte avec une gravité mélancolique, je ne l’adresse qu’à ceux qui le méritent…
    Tournehem, voyant Jeanne engagée dans un entretien qui semblait fort l’amuser, se mit à examiner l’assemblée, et peu à peu se perdit dans la foule.
    – Et quelles sont, reprit Jeanne, les personnes qui vous semblent mériter votre hommage ?
    – Il y en a fort peu, madame, parce que, en regardant les gens d’assez près, on finit toujours par leur découvrir une tare, un vice caché… Or j’ai le malheur d’être curieux, et le malheur plus grand encore de voir trop bien…
    – Oui : on dit que vous avez la double vue…
    – Vraiment ? fit le comte, on dit cela ? Eh bien, il faut laisser dire. Mais pour en revenir à la question que vous me faisiez l’honneur de m’adresser, j’ajouterai que personne, au fond, ne mérite entièrement l’hommage du philosophe…
    – Merci ! fit Jeanne en riant.
    – Seulement, il est des gens auxquels un homme de cour comme moi ne peut se dispenser d’adresser un salut de respect apparent et de pitié réelle…
    – Quelles gens ?…
    – Mais d’abord le souverain !… Il est impossible de ne pas saluer le souverain, si vicieux et taré qu’il soit…
    – Ensuite ? fit Jeanne en pâlissant.
    – Ensuite… la souveraine !…
    – Et puis ?…
    – Et puis, c’est tout !…
    – Ainsi, comte, vous ne vous croyez tenu à l’hommage qu’en vers le roi et la reine ?
    – C’est vrai, madame…
    – Et pourtant, vous m’avez offert cet hommage !… Je ne suis pas reine, moi !…
    – Bah ! Si vous ne l’êtes pas, vous le deviendrez, dit Saint-Germain avec un calme glacial.
    – Monsieur ! monsieur ! que voulez-vous dire ? balbutia Jeanne.
    – Rien que ce qui doit être, madame ! fit le comte d’une voix basse et rapide. M me  de Châteauroux l’est bien devenue, elle !… Et d’autres !… Ah ! prenez garde, mon enfant, ajouta-t-il en changeant brusquement de ton, c’est là une triste royauté… indigne de vous, de votre belle intelligence et de votre noble cœur… tenez, je vous dirais que je salue les souverains d’un respect apparent et aussi d’une pitié réelle… La pauvre reine Marie mérite cette pitié… prenez garde de la mériter aussi un jour !…
    – Taisez-vous, monsieur ! balbutia Jeanne épouvantée par cet homme qui lisait à livre ouvert au plus secret de son cœur. Taisez-vous, je vous en supplie !…
    – Soit ! fit le comte. Ne parlons plus de votre souveraineté… parlons des joies plus vraies, plus profondes et plus humaines auxquelles vous étiez destinée… L’amour, madame, le véritable amour appuyé sur le dévouement d’une âme pure et généreuse… voilà ce qui devrait tenter une nature d’élite comme vous !… Je vous le dis : vous avez à choisir entre le bonheur et la souveraineté… La souveraineté, c’est Louis XV qui vous l’offre…
    – Et le bonheur ? demanda Jeanne pensive.
    – Regardez ! dit le comte.
    Et, d’un coup d’œil, il désigna le chevalier d’Assas qui s’avançait vers Jeanne.
    En même temps l’étrange personnage disparut dans un groupe d’invités, laissant la jeune femme profondément troublée, effrayée, palpitante…
    Elle leva son doux regard sur le chevalier qui venait à elle en souriant, en mettant dans ses yeux tout ce qu’il avait d’adoration dans le cœur…
    Ah ! celui-là l’aimait ardemment, pour la vie, de tout son être !…
    – Choisir ! murmura Jeanne. La souveraineté !… Le bonheur !… Et elle allait tendre la main au chevalier. Elle le regardait déjà avec une expression qui mettait une extase dans le cœur de d’Assas…
    Tout à coup, de violents remous se firent dans le salon… Des cris éclatèrent…
    – Le roi !… Le roi !… Vive le roi !…
    La foule passa rapide, violente, exaltée, entre Jeanne et le chevalier qui furent refoulés, chacun de son côté. Jeanne s’était dressée toute droite,

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