La mythologie : Ses dieux, ses héros, ses légendes
cria : « Si je te tue, je
rendrai ton corps à tes amis ; fais de même pour moi ». Mais Achille
répondit : « Insensé, entre les moutons et les loups pas plus qu’entre
toi et moi il n’y a de traité qui tienne » . Parlant
encore, il jeta sa lance. Elle manqua son but mais Athéna la ramena. Alors
Hector toucha sa cible, le centre du bouclier d’Achille. Mais à quoi bon ?
Cette armure était magique, elle ne pouvait être transpercée. Hector se tourna
rapidement vers Déiphobe pour lui emprunter sa lance, mais Déiphobe n’était plus
là. Hector comprit ; Athéna l’avait trompé et il ne lui restait aucun
espoir de salut. « Les dieux m’ont condamné », se dit-il, « je
ne mourrai pas sans combattre, mais dans un grand fait d’armes que les hommes
encore à venir se raconteront les uns aux autres. » Il tira son épée, sa
seule arme à présent, et il s’élança sur son ennemi. Mais Achille avait une
lance, celle-là même qu’Athéna lui avait rendue. Avant qu’Hector ait pu
approcher, Achille, qui connaissait bien cette armure prise par Hector sur le
corps de Patrocle, visa une ouverture près de la gorge et y plongea la pointe
de son arme. Hector tomba, mourant enfin. Avant son dernier souffle, il pria :
« Rends mon corps à mon père et à ma mère ». « Pas de prière de toi à moi, chien », répondit
Achille. « Je voudrais pouvoir dévorer ta chair sanglante, pour le mal que
tu m’as fait. » Alors l’âme d’Hector s’envola de son corps vers le Hadès, pleurant
son destin et laissant derrière elle vigueur et jeunesse.
Achille dépouilla le corps de l’armature sanglante et les
Grecs accourus s’émerveillaient de le voir, gisant là devant eux, si grand et
si noble aussi. Mais l’esprit d’Achille se tournait vers d’autres objets. Il
transperça les pieds de l’homme mort et avec des lanières de cuir, il les
attacha à l’arrière de son char, laissant pendre la tête jusqu’au sol. Alors il
cravacha ses chevaux, et plusieurs fois, autour des murs de Troie, il traîna ce
qui restait du glorieux Hector.
Quand enfin son âme violente fut rassasiée de vengeance, il
s’arrêta près du cadavre de Patrocle et dit : « De la maison de Hadès
où tu demeures maintenant, entends-moi. J’ai traîné Hector derrière mon char et
devant ton bûcher funéraire, je le ferai dévorer par les chiens. »
Dans l’Olympe, cependant, la discorde régnait. À l’exception
d’Héra, Athéna et Poséidon, ces outrages à un mort déplaisaient à tous les
immortels et surtout à Zeus. Il envoya Iris à Priam avec l’ordre de se rendre
sans crainte devant Achille avec une riche rançon et de lui réclamer le corps d’Hector.
De plus, la messagère devait dire au vieux Roi qu’Achille, tout violent qu’il
fut, n’était pas foncièrement mauvais mais capable d’accueillir ainsi qu’il
convenait un suppliant.
Alors le vieux Priam chargea un char de trésors fabuleux, de
tout ce que Troie possédait de plus précieux, et il traversa la pleine jusqu’au
camp grec. Hermès vint à sa rencontre et s’offrit à le guider jusqu’à la tente
d’Achille. Ainsi escorté, le vieillard passa devant les gardes et se présenta
devant celui qui avait tué et maltraité son fils. Il lui étreignit les genoux, il
baisa ses mains, et Achille fut pénétré de respect et de gêne, comme aussi tous
ceux qui assistaient à la scène et qui échangeaient entre eux des regards
furtifs. « Souviens-toi, Achille », dit Priam, « souviens-toi de
ton propre père, aussi chargé d’ans que moi et pleurant un fils comme moi. Et
cependant je suis bien plus à plaindre que lui, moi qui me suis imposé ce qu’aucun
autre homme ne s’est encore jamais imposé, tendre la main au meurtrier de mon
fils. »
A ces mots, le cœur d’Achille fut ému de chagrin. Doucement,
il releva le vieil homme. « Assieds-toi près de moi, laissons notre peine
s’apaiser en nous. Le malheur est le lot des hommes, mais nous devons cependant
garder notre courage. » Alors il donna à ses serviteurs l’ordre de laver
et d’oindre le corps d’Hector et de le couvrir ensuite d’un vêtement précieux, de
peur qu’à le voir si affreusement mutilé le vieux Priam ne pût contenir sa
colère. Lui-même craignait de ne pouvoir se maîtriser si Priam le vexait.
« Combien de jours vous faut-il pour ses funérailles ? »
demanda-t-il. « Car jusque-là je retiendrai les Grecs loin du
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