La mythologie : Ses dieux, ses héros, ses légendes
où s’abritait la Sybille de
Cumes, une femme de grande sagesse qui connaissait l’avenir et le conseillerait.
Il la trouva et elle lui dit qu’elle le guiderait jusqu’au monde souterrain, où
son père Anchise – mort juste avant la grande tempête – lui révélerait tout ce
qu’il souhaitait apprendre. Toutefois, elle le mit en garde, car il s’agissait
là d’une entreprise à ne pas prendre légèrement :
Troyen, fils d’Anchise, la descente de l’Averne
est aisée.
Toute la nuit, tout le jour, les portes du
sombre Hadès sont ouvertes.
Mais revenir sur ses pas, respirer à nouveau
le doux air du ciel,
Voilà qui demande un rude labeur, en vérité.
Néanmoins, s’il s’y décidait, elle l’accompagnerait
jusque-là. Mais avant tout autre chose, il lui fallait trouver un rameau d’or
qui poussait sur un arbre de la forêt ; il le cueillerait et
l’emporterait, car il ne serait admis dans le Hadès que s’il tenait ce rameau à
la main. Il se mit aussitôt en quête, accompagné du toujours fidèle Achate.
Sans grand espoir, ils pénétrèrent dans l’épaisseur de ces bois touffus, où
trouver quoi que ce soit semblait tout à fait impossible. Mais soudain ils
aperçurent deux colombes, les oiseaux de Vénus. Les deux hommes les suivirent
tandis qu’elles volaient lentement, les entraînant de plus en plus loin,
jusqu’à ce qu’ils se retrouvent au bord du lac Averne, une nappe d’eau sombre
et nauséabonde. Là, avait dit la Sybille à Enée, là s’ouvrait la caverne d’où
partait la route du monde souterrain. Et là aussi les colombes arrêtèrent leur
vol ; elles planèrent au-dessus d’un arbre et le feuillage de cet arbre
était traversé d’un éclair jaune et brillant. C’était le rameau d’or. Enée le
cueillit avec joie et le porta à la Sybille. Puis ensemble, prophétesse et
héros entamèrent leur voyage.
Avant Enée, d’autres héros l’avaient déjà entrepris sans le
trouver particulièrement terrifiant. La foule des ombres avait bien, en fin de
compte, terrifié Ulysse, mais Thésée, Hercule, Orphée, Pollux ne s’étaient par
heurtés à de grandes difficultés en cour de route. Et la timide Psyché, qui s’y
était rendue seule pour demander à Proserpine le charme de beauté réclamé par
Vénus, n’avait rien vu de pire que Cerbère, le chien tricéphale, et celui-ci
s’était aisément laissé amadouer par l’octroi d’un peu de gâteau. Mais le héros
romain ne vit qu’une accumulation d’horreurs. Les préparatifs auxquels crut
devoir se livrer la Sybille étaient calculés pour effrayer jusqu’aux plus
courageux. Au cœur de la nuit, devant la sombre caverne qui s’ouvrait au bord
du lac obscur, en holocauste à Hécate, la redoutable déesse de la Nuit, elle
offrit quatre bœufs noirs comme le jais. A l’instant où elle déposa les
offrandes rituelles sur l’autel rouge de flammes, la terre gronda et trembla
sous leurs pieds et au loin, des chiens hurlèrent dans l’obscurité. Avec un cri
à Enée : « A présent, fais appel à toute ta vaillance ! »
elle se précipita dans la caverne où il la suivit, impavide. Ils se trouvèrent
bientôt sur une route enveloppée d’ombre, une ombre qui leur permettait
toutefois d’apercevoir des formes terrifiantes alignées les unes à droite, les
autres à gauche, la blême Maladie et le Souci rongeur, la Famine qui porte au
crime ; la Guerre qui donne la Mort et la folle Discorde, avec ses cheveux
ensanglantés et entrelacés de serpents, et bien d’autres encore, tous fléaux
pour les mortels. Enée et la Sybille traversèrent leurs rangs sans être
molestés et arrivèrent enfin en un lieu où, sur un cours d’eau, un vieillard
manœuvrait une barque à l’aide d’un aviron. Et là ils virent un spectacle
pitoyable : sur la berge, une foule d’ombres, aussi nombreuses que les
feuilles qui tombent dans la forêt au premier froid de l’hiver, toutes tendant
les mains et suppliant le nocher de les transporter sur la rive opposée. Mais
le vieil homme lugubre choisissait parmi elles ; il en admettait
quelques-unes sur sa nacelle et repoussait les autres. À Enée, qui observait la
scène avec stupeur, la Sybille dit qu’ils avaient maintenant atteint le point
de rencontre des deux grands fleuves du monde souterrain, le Cocyte – dont le
nom à lui seul parle de lamentations – et l’Achéron. Le nautonnier se nommait Charon
et ceux qu’il refusait d’admettre dans sa
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