La naissance du roi Arthur
avait une sœur du nom de
Gwendolyn, et qu’elle plaisait beaucoup à Merlin.
Cependant, Uther avait convoqué tous ses vassaux à Tintagel.
Et quand ils furent tous rassemblés, il fit venir la duchesse, ses parents et
ceux de son défunt mari. Et devant tous, il déclara qu’il s’en remettait entièrement
à ses barons pour trouver le moyen de conclure la paix et d’offrir une
réparation suffisante à la famille du duc Gorlais. Les barons délibérèrent
entre eux et dirent qu’ils acceptaient de trancher la question à condition
qu’Urfin fût leur porte-parole, car ils savaient bien qu’il était le plus
habile d’entre eux. Quant aux parents de la duchesse et à Ygerne elle-même,
après avoir pris avis de leurs conseillers, ils déclarèrent s’en remettre en
tous points à ce que déciderait l’assemblée.
C’est alors qu’Urfin prit la parole : « Seigneurs,
voici ce que nous proposons. Vous savez que le duc est mort par la faute du
roi, mais qu’en réalité il n’avait pas mérité cette mort, car c’était un homme
bon et loyal qui s’est laissé emporter par une colère irréfléchie. Vous savez
également que sa femme, qui est la meilleure dame du royaume, la plus belle et
la plus vertueuse qu’on puisse trouver sur cette terre, se trouve présentement
sans protection, avec deux enfants à charge et une terre que le roi a dévastée.
D’autre part, les parents du duc ont beaucoup perdu avec la mort de leur
seigneur. Il est donc juste que le roi, afin de gagner leur pardon et leur
amitié, répare en partie les torts qu’ils ont subis. Enfin, comme vous le
savez, le roi n’a pas de femme, et il serait grand temps que le royaume ait un
héritier légitime. Je déclare donc, au nom de tous les barons réunis ici
aujourd’hui, que le roi ne peut réparer le préjudice causé qu’en épousant la
duchesse Ygerne, cela pour le bien de tous et en vertu du droit qu’a la
duchesse d’obtenir des compensations. Ensuite, je propose qu’il marie la fille
aînée du duc, celle qui a pour nom Anna, au roi Loth d’Orcanie, ici présent, et
qu’il fasse en sorte que les autres parents du duc le considèrent désormais
comme leur ami, leur seigneur et leur roi légitime. Telle est la proposition
que nous vous soumettons à tous. »
À l’unanimité, l’assemblée des barons accepta la proposition
présentée par Urfin, et la duchesse et ses parents firent de même. « Ce
n’est pas suffisant, dit encore Urfin. Il faut que le roi Loth d’Orcanie donne
son avis. » Loth se leva et dit qu’il acceptait avec joie d’épouser la
jeune Anna, fille aînée du duc Gorlais et d’Ygerne de Tintagel. Alors, Urfin se
tourna vers Uther et lui demanda s’il confirmait le jugement rendu par
l’assemblée. « Oui, répondit le roi, à condition que la duchesse Ygerne
veuille bien elle-même, en personne, accepter cette juste réparation des torts
qu’elle a subis. » On attendit qu’Ygerne voulût bien parler. Elle s’entretint
quelques instants avec ses parents et ses conseillers, puis elle se leva et dit
d’une voix qui ne tremblait pas : « J’accepte la proposition qui
m’est faite et je m’en remets entièrement à la loyauté du roi sous la caution
de tous les barons aujourd’hui rassemblés à Tintagel. »
C’est ainsi que la paix fut rétablie entre le roi et la
famille de Tintagel. Quelques jours plus tard, Uther Pendragon épousa la belle
Ygerne, pour laquelle il avait tant soupiré en secret. Treize jours seulement
s’étaient écoulés entre le jour des noces d’Uther et d’Ygerne et la nuit où il
avait couché avec elle dans la forteresse de Tintagel. Et, le lendemain, Uther
donna en mariage la fille d’Ygerne au roi Loth d’Orcanie. C’est de cette union
que naquirent plus tard Gauvain, Agravain et Gahériet qui s’illustrèrent parmi
les compagnons de la Table Ronde, et aussi, par suite d’une méprise fatale, et
du seul fait d’Anna, celui qui apporta la honte sur le royaume de Bretagne et
le rendit orphelin. Mais ceci est une autre histoire.
Ygerne de Tintagel avait eu une seconde fille de son union
avec le duc Gorlais, et cette fille se nommait Morgane. Elle était très belle
et de visage avenant, et surtout très douée pour les études : elle apprit
ainsi les sept arts et acquit de surprenantes connaissances dans les sciences
de la nature, ainsi qu’en astrologie et en magie, car elle connaissait les
charmes et les enchantements des anciens
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