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La nièce de Hitler

La nièce de Hitler

Titel: La nièce de Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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élection en septembre, et Hitler pensait que les chances du parti
étaient si bonnes qu’il renonça à ses soirées à l’Opéra, à ses séances de
cinéma et à son été à Obersalzberg afin de se consacrer à la campagne
électorale. Geli emmena à nouveau Henny passer juillet et août avec elle à Haus
Wachenfeld, et Heinrich Hoffmann leur postait chaque semaine des photographies
d’Hitler à Brème, Darmstadt, Leipzig ou Postdam, en train d’ébouriffer gaiement
les cheveux de blonds garçonnets, de tapoter les joues hâlées de fillettes en
costumes villageois, de serrer les mains des ouvriers dans les usines, de
partager le Wurst et la Sauerkraut d’un paysan sur son tracteur, de
féliciter un épicier pour la propreté de son magasin, d’étudier une carte dans
son avion spécial, de gratifier des dames âgées dont les votes lui étaient
acquis d’un salut guindé, de haranguer froidement une salle pleine à craquer de
ses SA minces et musclés pour qui il était de plus en plus un objet de
vénération. « Six discours d’affilée et pas un mot sur les Juifs, écrivit
Hoffmann, nous n’offensons personne ces temps-ci. »
    Avec le Leica de son père, Henny prit des
photographies de Geli assise sur la terrasse nord, sa jupe blanche à fleurs
relevée à mi-cuisse pour que le choucas Schatzi se perche sur son genou, Geli
imitant la pose flamboyante de Lilian Harvey devant le cinéma Mirabell à
Salzbourg, Geli allongée sur une prairie et riant de bon cœur avec son frère
Léo, une cigarette Prinz Josef à la main, Geli endormie nue sur la plage Freikörperkultur, un essaim de papillons voletant doucement sur sa peau
bronzée.
    Craignant que les communistes ne cherchent à
lui nuire en kidnappant ou en blessant sa nièce, Hitler avait donné des leçons
de tir à Geli et à Henny, et leur avait confié son Walther 6.35 et quatre
boîtes de munitions pour qu’elles deviennent de bonnes tireuses. Elles s’exerçaient
sur des pommes de pin dans les bois près de la pension Moritz ou descendaient
le Kehlstein jusqu’aux écuries du Doktor Seitz, où elles tiraient sur des
boîtes de conserve posées sur les barrières. Elles aimaient la virilité de cet
exercice. Elles se prenaient pour des gangsters de Chicago, ou pour Jack Hoxie
ou William S. Hart dans un western américain.
    Un après-midi, en rentrant à Haus Wachenfeld, Henny
dit à son amie qu’elle avait une confession à lui faire. Quelques mois
auparavant, Hitler avait dîné chez les Hoffmann. Après le dîner ils avaient
joué du Wagner au piano, et le leitmotiv de La Force du destin de Verdi,
ensuite Hitler et son père étaient sortis et elle était restée seule à la
maison. Soudain elle avait entendu la porte d’entrée s’ouvrir : c’était Hitler
qui était revenu chercher sa cravache qu’il avait oubliée.
    — Tu ne trouves pas ça bizarre, qu’il ait
toujours ce truc avec lui ?
    — Je n’ai plus trop la notion du bizarre,
répondit Geli en haussant les épaules.
    — Bref, il se plante sur le tapis rouge de
l’entrée, sa cravache dans une main et son feutre dans l’autre, et là, il me
demande le plus sérieusement du monde si je veux l’embrasser !
    Geli se força à sourire.
    — Et tu l’as fait ?
    — Bien sûr que non ! Je lui ai dit :
« Non, je vous en prie, vraiment pas, Herr Hitler ! Il me serait
impossible de vous embrasser. » Et il est parti sans demander son reste.
    — Sans essayer de te persuader ?
    Henny secoua la tête et demanda :
    — Et toi, il t’a persuadée ?
    — Un peu.
    — De faire l’amour ?
    — On se touche de temps en temps. Et
jamais en public. Il faut sauver les apparences. Quelques baisers. On se prend
par le bras. Des regards tendres. Une main sur mon sein, trois fois maintenant.
Vite fait, comme un petit garçon craintif.
    — Tu n’es pas frustrée ?
    — Oh, tu sais, l’éthique de cette
situation est un peu floue.
    Un choucas inconnu d’elle s’éleva dans les
airs et parcourut quelques mètres pour se poser sur la verte pelouse de l’hôtel
Zum Türken. Des femmes placides vêtues de robes d’été blanches savouraient des
cocktails à l’ombre d’un arbre et fixaient le pistolet dans sa main.
    — Je pense que mon oncle est un voyeur, dit-elle
sans raison particulière.
    — Tu poses toujours pour lui ?
    Quelle trahison pouvait encore la surprendre
désormais ?
    — Comment le sais-tu ? demanda Geli.
    — Nous avons vu les

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