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La nièce de Hitler

La nièce de Hitler

Titel: La nièce de Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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millier de commerçants, ouvriers, aspirants officiers, et
étudiants, défilant tous « à la va-comme-je-te-pousse », selon les
termes d’un témoin.
    Vers midi, il faisait gris et froid, et les
premiers flocons commencèrent à tomber alors que les putschistes traversaient
la Marienplatz où le drapeau nazi flottait en haut de l’hôtel de ville, en
direction de la Feldherrnhalle, bâtiment gris à arcades de style florentin, dont
l’accès était bloqué par une centaine de policiers en uniforme vert. Scheubner-Richter
serra la main de Rosenberg avec ces mots « Ça va mal finir », puis il
prit le bras d’Hitler et retira son pince-nez, en lui disant : « C’est
peut-être la dernière fois que nous marchons ensemble. »
    Les manifestants chantaient Ô Deutschland
hoch in Ehren, et ceux qui avaient des carabines et des baïonnettes mirent
la police en joue.
    — Rendez-vous ! Rendez-vous ! s’écria
Hitler.
    C’est alors qu’un coup de feu retentit, qu’un
sergent de police fut tué. Les policiers hésitèrent, puis, une fraction de
seconde avant d’en recevoir l’ordre, ils ouvrirent le feu sur le cortège. Scheubner-Richter
fut tué dès les premières salves, et dans sa chute il tira si violemment sur le
bras d’Hitler que celui-ci en eut l’épaule gauche démise. Ulrich Graf, le garde
du corps d’Hitler, se jeta devant lui et fut touché onze fois avant de tomber, mais
survécut. Alfred Rosenberg rampa vers l’arrière. Le vieux soldat Ludendorff se
plaqua au sol dès le début de la fusillade, se protégeant derrière le corps de
Scheubner-Richter jusqu’au retour du calme, puis se releva et reprit sa marche
en avant, l’œil courroucé, la main dans sa poche gauche, toujours persuadé que
personne ne le tuerait, ce qui fut le cas.
    Hermann Göring, qui, en tant qu’as de l’aviation,
avait été décoré de la plus haute distinction militaire allemande, Pour le
Mérite, et la portait ostensiblement sur sa belle veste de cuir noir, fut
touché en haut de la cuisse et à l’aine. Il gagna le Palais de la Résidence à
quatre pattes et se cacha derrière les statues des lions, où il fut découvert
par un ami et amené chez le premier médecin qu’ils trouvèrent, au 25, Residenzstraße.
Lorsque cet ami lui demanda de l’aide, le docteur Robert Ballin répondit :
    — Naturellement, je porterai assistance à
tout homme blessé, mais je dois attirer votre attention sur le fait que ce sont
des Juifs qui demeurent ici.
    Ils entrèrent néanmoins.
    On compta vingt tués, dont quatre policiers, et
des centaines de blessés dans cette escarmouche qui n’avait duré que quelques
minutes. Sur les seize nazis qu’Hitler allait transformer en héros et martyrs, il
y avait quatre commerçants, trois employés de banque, trois ingénieurs, un
chapelier, un serrurier, un sommelier, un domestique, un capitaine de cavalerie
à la retraite, et un conseiller de la Cour suprême de Bavière, sur qui on
trouva le brouillon taché de sang d’une nouvelle constitution nazie.
    Ainsi se termina le putsch. Par la suite, un
journaliste nommerait ce jour Kahrfreitag, Vendredi Kahr, un jeu de mots
sur vendredi saint en allemand, Kar-Freitag. Quelques-uns des
révolutionnaires se réfugièrent dans un pensionnat de jeunes filles tout proche,
rampant sous les lits pour échapper à la police ; d’autres cachèrent leurs
armes dans les fours et les sacs de farine d’une Konditorei  ; d’autres
encore reprirent tout bonnement leur travail comme s’ils n’avaient été que des
badauds.
    Avec l’aide du docteur Walter Schultze, Hitler
quitta les lieux, au supplice, les cheveux dans les yeux, blême de honte et de
déception, et monta dans une Opel jaune avec une croix rouge sur le côté. Un
vieil ami, Emil Maurice, prit le volant et le conduisit vers la frontière
autrichienne, au sud, aussi vite que possible.
    — Quel fiasco ! soupira Hitler.
    Puis il se tut jusqu’à Murnau ; là, il se
souvint que Ernst Hanfstaengl, l’attaché de presse du parti auprès des journaux
étrangers, possédait une maison de campagne dans les environs, à Uffing, sur le
lac Staffelsee.
    Ils s’y rendirent. Le silence était stupéfiant.
Les champs et la pelouse étaient recouverts de neige. Un fermier menait ses
vaches laitières le long du mur de granit haut d’un mètre cinquante qui
entourait la propriété. Emil Maurice et le docteur Schultze se firent tout
petits dans la voiture, tandis qu’Hitler

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