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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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qu’elle put afin de le montrer à tous. Le soleil frappa ses pierreries,
faisant jaillir un rayon d’or.
    — Hosanna
in excelsis... entonna-t-elle à pleins poumons.
    À mesure que les
vigoureux accents du cantique tombaient en pluie sur la foule, des visages
inondés de larmes se tournèrent vers elle. Les prêtres et les moines présents
joignirent leurs voix à celle de Jeanne, agenouillés sur les pavés au milieu
des gens du peuple, maçons et couturières.
    — Christus
qui venitin nomine Domini...
    Un nouveau fracas
couvrit le chant, suivi par un grincement de mauvais augure. Les portes de la
ville semblaient sur le point de céder. Déjà, elles laissaient filtrer un rai
de lumière venu de l’extérieur.
    Mon Dieu, se dit Jeanne. Et si les infidèles réussissaient à entrer ? Jusqu’alors, cette hypothèse lui avait paru presque impensable. Un flot de
souvenirs la submergea sans crier gare. Elle revit les Normands envahir la nef
de la cathédrale de Dorstadt, haches et glaives brandis. Elle vit Jean inerte,
la tête fendue, elle entendit les cris épouvantables des mourants... et
Gisla... Gisla...
    Sa voix trembla,
puis mourut. Les badauds levèrent sur elle cent regards inquiets. Continue, s’exhorta-t-elle, continue de chanter. Mais son esprit était paralysé.
Les paroles du cantique se dérobaient à elle.
    — Hosanna
in excelsis ! reprit une voix chaude, profonde
et vibrante, juste à côté d’elle.
    Elle reconnut
Léon, cardinal de l’église des Sancti Quattro Coronati, qui venait de la
rejoindre au sommet de la muraille. L’énergie de sa voix l’arracha à sa lugubre
rêverie, et ils reprirent leur chant en chœur.
    — Par saint
Pierre !
    Une vibrante
clameur monta de l’est. Les gardes postés sur le chemin de ronde sautaient de
joie.
    — Dieu soit
loué ! criaient-ils. Nous sommes sauvés !
    Jeanne scruta la
plaine. Une puissante cavalerie galopait vers la ville. Ses bannières
flottantes portaient l’emblème de la Croix et de saint Pierre.
    Les Sarrasins
lâchèrent leurs béliers et coururent vers leurs chevaux.
    Jeanne plissa les
yeux. Les cavaliers se rapprochaient à vue d’œil. Soudain, elle poussa un cri
aigu.
    À la tête de l’avant-garde,
lance brandie, aussi héroïque que les dieux de sa mère, elle venait de
reconnaître Gerold et sa crinière de feu.
     
     
    La bataille qui
suivit fut âpre et sans merci. L’attaque des Bénéventins avait pris les
Sarrasins au dépourvu. Ils furent refoulés loin des murs de Rome, et forcés de
battre en retraite jusqu’à la côte. Là, les infidèles embarquèrent leur butin
sur leurs vaisseaux et reprirent la mer. Dans leur hâte, ils laissèrent
derrière eux un grand nombre des leurs. Pendant plusieurs semaines, Gerold et
les siens sillonnèrent les côtes romaines pour traquer les bandes de maraudeurs
sarrasins.
    Rome était sauve.
Les Romains oscillaient entre la joie et le désespoir  – joie d’être
délivrés, désespoir de voir Saint-Pierre détruite. La splendide basilique, en
effet, n’était plus que l’ombre d’elle-même. L’antique croix d’or qui se
dressait sur la tombe de l’Apôtre avait disparu, de même que le retable d’argent
byzantin offert par le grand empereur Charlemagne. Les infidèles avaient
arraché les entablements d’argent des portes et les plaques d’or qui décoraient
le sol. Ils étaient allés  – Dieu les pourfende ! – jusqu’à
emporter le maître-autel. Ne parvenant pas à déplacer le sarcophage de bronze
contenant les restes du prince des Apôtres, ils l’avaient éventré avant de
profaner et de disperser les cendres sacrées.
    La chrétienté
tout entière était endeuillée. Les plus nobles signes du passage des siècles,
jusqu’alors préservés derrière les portes inviolables du plus ancien et du plus
grand des sanctuaires chrétiens, étaient effacés. D’innombrables générations de
pèlerins, parmi lesquels on comptait les plus grands princes du monde, s’étaient
humblement prosternées sur ces dalles sacrées. Les dépouilles de dizaines de
pontifes reposaient entre ces murs. L’Occident ne possédait aucun lieu plus
saint. Et cependant, ce sanctuaire de la Vraie Foi, que ni les Goths, ni les
Vandales, ni les Grecs, ni les Lombards n’avaient osé bafouer, était tombé aux
mains d’une horde de brigands venus d’Afrique.
    Serge endossa la
culpabilité de ce désastre. Il se retira dans ses appartements, refusant de
voir quiconque

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