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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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n’avez rien voulu entendre. Sans doute ne sera-t-il
pas ravi de constater que tout est de votre faute.
    L’homme la fixa
avec des yeux ronds. Jamais une fille ne lui avait parlé avec tant d’effronterie.
Il commençait à comprendre pourquoi l’évêque tenait tant à la voir.
    — Soit,
admit-il à contrecœur. Ton frère n’a qu’à venir.
     
     
    Le voyage fut
harassant, car les membres de l’escorte, dans leur hâte de retrouver leurs
foyers, chevauchaient du matin au soir. Jeanne n’en souffrit guère ; bien
au contraire, elle était fascinée par les changements perpétuels du paysage
 – et par le monde neuf qui lui entrouvrait chaque jour un peu plus ses
portes. Elle était enfin libre, débarrassée d’Ingelheim et de ses étroites
frontières. Ivre de curiosité, elle traversait les misérables hameaux et les
villes grouillantes avec le même ravissement. Jean, en revanche, ne tarda pas à
se montrer nerveux, irrité qu’il était par le manque de nourriture et de repos.
Jeanne tenta à plusieurs reprises de l’apaiser, mais sa bonne humeur ne faisait
que jeter de l’huile sur le feu.
    Ils arrivèrent
aux portes du palais épiscopal le dixième jour, vers midi. L’intendant gratifia
d’un regard réprobateur les deux enfants, crottés et vêtus de hardes paysannes,
et ordonna aussitôt qu’on leur donnât un bain et des vêtements propres avant de
les présenter à l’évêque.
    Pour Jeanne,
accoutumée à se tremper en hâte dans le ruisseau glacé qui coulait derrière la
chaumière, ce fut une extraordinaire expérience. Le palais disposait en effet
de bains couverts, avec de l’eau chaude, un luxe dont elle ne soupçonnait même
pas l’existence. Elle y resta immergée près d’une heure, pendant que des
servantes frottaient inlassablement sa peau jusqu’à la rendre toute rose. Elles
lui lavèrent le dos avec une infinie délicatesse, considérant ses cicatrices
avec des froncements de sourcils réprobateurs. Elles rincèrent sa chevelure d’or
pâle et en firent des tresses étincelantes dont elles encadrèrent son visage.
Ensuite, elles lui présentèrent une belle tunique de lin vert. La texture en
était si douce, et la trame si fine, que Jeanne eut peine à croire qu’elle eût
pu être confectionnée par des mains humaines. Quand elle fut vêtue de pied en
cap, les femmes lui apportèrent un miroir. Jeanne y découvrit le visage d’une
étrangère. Jamais elle n’avait contemplé ses propres traits, hormis à la
surface mouvante et boueuse de la mare du village. La netteté de l’image que
lui renvoyait le miroir la laissa pantoise. Elle brandit l’objet devant elle et
s’étudia d’un œil critique.
    Elle n’était pas
belle, elle le savait déjà. Elle ne possédait ni le front haut et pâle, ni le
menton délicat, ni les épaules menues, ni la silhouette gracile si chers aux
ménestrels et aux galants. Elle avait la complexion et l’aspect robuste d’un
garçon. Son front était trop bas, son menton trop ferme, ses épaules trop
droites pour qu’on pût la trouver belle. En revanche, sa chevelure  – celle
de sa mère  – était ravissante, de même que ses yeux gris-vert, ourlés de
longs cils. Avec une moue, elle rendit le miroir. L’évêque ne l’avait pas
mandée pour sa beauté.
    Jean la
rejoignit, également resplendissant dans sa tunique neuve et sa cape de lin
bleu. Les deux enfants furent conduits à l’intendant du palais.
    — Voilà qui
est mieux, dit celui-ci en les détaillant des pieds à la tête. Et maintenant,
suivez-moi.
    Ils remontèrent
une longue galerie dont les murs étaient couverts d’immenses tapisseries
tissées de fil d’or et d’argent. Le cœur de Jeanne battait la chamade. Ils allaient
rencontrer l’évêque.
    Saurai-je
répondre à ses questions ? M’acceptera-t-il dans son école ? Elle tenta de se souvenir de certaines choses qu’elle avait
apprises, mais son esprit resta désespérément vide. Quand elle songea à
Asclepios et aux espoirs qu’il avait placés en elle, son estomac se noua.
    Ils firent halte
devant une énorme double porte de chêne. Derrière, on devinait des éclats de
voix et un grand cliquetis de vaisselle. L’intendant fit signe à un valet de
pousser les portes.
    Jeanne et Jean
franchirent le seuil et s’arrêtèrent net, bouche bée. Deux cents personnes au
bas mot étaient réunies dans la salle de banquet, assises autour d’immenses
tables croulant sous les victuailles. De

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